Au Canada, bientôt des feux de forêt «d’un océan à l’autre»?

© Sputnik . Mark Redkin / Accéder à la base multimédiaFeu de forêt
Feu de forêt - Sputnik Afrique, 1920, 20.07.2021
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Après avoir connu une canicule meurtrière et historique, le Canada traverse une vague d’incendies de forêt dévastateurs. Selon Philippe Gachon, climatologue à Montréal, le pays manque à la fois d’experts et de pompiers sur le terrain pour affronter ce phénomène qui risque d’empirer.

300.000, c’est le nombre d’hectares de forêt qui pourraient partir en fumée d’ici à quelques jours au Canada, selon les projections de Philippe Gachon.

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Professeur de climatologie à l’Université du Québec à Montréal, il juge «de plus en plus préoccupante» l’ampleur des feux de forêt qui font rage dans les provinces de l’ouest et en Ontario:

«Je croise les doigts pour que le Canada ne vive pas le scénario qu’a connu l’Australie en 2019-2020. […] Mes collègues sont inquiets. Il se pourrait que deux feux de 140.000 hectares se rejoignent en Colombie-Britannique. Si la tendance se maintient, on parle peut-être d’une superficie record. C’est énorme», avertit-il au micro de Sputnik.

Le week-end dernier, les habitants de plusieurs localités de Colombie-Britannique ont dû être évacués devant la progression du brasier. Depuis l’arrivée du printemps, plus de 200.000 hectares de forêt ont déjà été carbonisés pour l’ensemble du territoire.Le 18 juillet, les services de gestion des urgences de la Colombie-Britannique ont informé que plus aucun logement temporaire n’était disponible pour héberger les gens évacués.

Les changements climatiques encore pointés du doigt

Selon Philippe Gachon, la situation n’a jamais été aussi critique. Cela ne relève pas seulement du discours écologiste, mais de la pure réalité scientifique, insiste-t-il. Combiné à la grande sécheresse, le mouvement des vents et des nuages chargés d’éclairs pourrait faire croître le brasier dans les régions concernées:

«On pourrait avoir des feux de forêt d’un océan à l’autre. Pour l’instant, on annonce de la pluie dans certains coins de la Colombie-Britannique mais à court terme, il ne pleut pas vraiment et il continue à faire chaud. […] Nous sommes encore devant de clairs et forts signaux du réchauffement climatique», constate le climatologue.

Le 16 juillet, la ministre des Forêts de la Colombie-Britannique Katrine Conroy a annoncé qu’une centaine de pompiers forestiers en provenance du Mexique débarqueraient dans la province pour épauler les services locaux. «Ces équipes sont un ajout bienvenu à nos propres pompiers et à nos contractuels qui travaillent extrêmement dur pour garder les communautés de la Colombie-Britannique en sécurité», a-t-elle fait savoir par communiqué.

Un puissant feu détruit la forêt autour de la centrale de Fukushima - Sputnik Afrique, 1920, 02.07.2021
Nouveaux ordres d'évacuation dans l'ouest du Canada

Pour le professeur de l’Université du Québec à Montréal, tous les renforts étrangers sont les bienvenus car les ressources disponibles risquent fortement d’être insuffisantes.

Des provinces «complètement débordées»

Le Canada pourrait manquer d’hommes sur le terrain, surtout dans le contexte où plusieurs États américains sont eux aussi déjà aux prises avec ce genre de problématique.

«Les provinces du Québec et maritimes sont les seules à pouvoir fournir et envoyer des renforts pour contenir le brasier. Parce que toutes les autres provinces sont complètement débordées. […] À l’échelle nord-américaine, tout va assez mal. Les ressources sont assez limitées en matière d’intervention», avertit le directeur du Réseau inondations intersectoriel du Québec.

Un feu de forêt dans la province canadienne de Colombie-Britannique, le 2 juillet 2021 - Sputnik Afrique, 1920, 05.07.2021
Des nuages «cracheurs de feu» géants repérés au Canada en proie à la canicule – images

Mais à part réduire la quantité de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, que faire pour anticiper de telles prévisions apocalyptiques? La solution se trouverait entre autres dans un meilleur financement de la recherche sur les changements climatiques. Dans ce domaine, le Canada serait nettement «en retard» par rapport aux pays européens, ce qui pourrait le désavantager à l’avenir:

«Toute l’économie dépend maintenant ici de la météo. La posture du Canada est scandaleuse: il n’investit pas assez. En six ans, le gouvernement Trudeau n’a jamais réussi à combler le gouffre créé par les coupures dans la recherche du gouvernement conservateur de Stephen Harper [2006-2015, ndlr]. Sous Harper, le Canada a réussi à combiner déni, ignorance, bêtise et inaction en matière de changement climatique», s’insurge le chercheur.

Pour Philippe Gachon, malgré son image de pays «progressiste», «le Canada ne passe pas à l’action». Devant un tel «sous-financement» de la recherche, impossible d’en arriver à une meilleure «prévisibilité». Une expertise dont dépend l’évacuation à temps des citoyens menacés par les feux de forêt, inondations, séismes et autres catastrophes naturelles potentiellement causées par le réchauffement.

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