«Aucun pays n'a intérêt à aller au contentieux»: un ministre togolais au sujet des frontières maritimes Ghana-Togo

CC BY 3.0 / Hansueli Krapf / Vue aérienne de Lomé
Vue aérienne de Lomé - Sputnik Afrique, 1920, 19.08.2021
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Le Togo et le Ghana intensifient leurs négociations depuis quelques mois dans l’espoir de trouver un accord sur leur frontière maritime. Un tracé projeté par le Ghana lui donnant un avantage sur un gisement pétrolier est contesté par le Togo. Au nom du principe de bon voisinage, toutefois, Lomé n'envisage pas d'action en justice contre son voisin.
Où se situera la frontière maritime entre le Togo et le Ghana? Les négociations autour de cette délimitation qui ont démarré en 2018 ont pris depuis quelques mois un tour accéléré.
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Un gisement pétrolier au cœur du différend

La mer regorge de ressources minières, dont le pétrole. Le golfe de Guinée est la «première région pétrolière en Afrique. Elle représente 8% des réserves mondiales», comme le rappelle cette note d’analyse scientifique publiée en septembre 2011 par le Groupe de recherche et d'information sur la paix (le GRIP, un centre de recherche indépendant établi en Belgique).
À la jonction entre l’espace maritime du Togo et celui du Ghana, se trouve justement un gisement pétrolier. Cet enjeu et les prétentions concurrentes des deux capitales ouest-africaines ont cristallisé le différend frontalier, qui existait «virtuellement» depuis bien longtemps.
Le tracé provisoire du Ghana empêcherait Lomé de tirer profit de cette ressource minière. D'où le refus opposé par ce dernier.
«Ce qui est sûr, c’est que le Ghana a son bloc pétrolier et le Togo a son bloc pétrolier. Nous ne voulons pas que dans le tracé, le bloc pétrolier du Togo soit aliéné au bloc ghanéen», affirme le ministre conseiller pour la Mer du Président Faure Gnassingbé, Stanislas Baba.
«Le Togo a ses zones de mouillage où les bateaux stationnent. Nous disons qu’il est souhaitable d’en tenir compte pour ne pas empiéter dessus pour des raisons économiques. Nous disons également que pour des raisons de trafic international, il est souhaitable que le Togo puisse avoir un accès conséquent à la haute mer. Ce que nous n’avons pas aujourd’hui si la proposition de tracé du Ghana est adoptée», détaille le ministre togolais.
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La convention de Montego Bay, et notamment son article 287 relatif au «choix de la procédure», ouvre à chaque État partie la possibilité d'opter pour un ou plusieurs moyens spécifiques pour le règlement des différends relatifs à l'interprétation ou l'application de ce traité. Dans une déclaration écrite en date du 12 avril 2019, le Togo a opté pour un recours soit devant le Tribunal international du droit de la mer, soit devant la Cour internationale de Justice pour le règlement de tout différend pouvant naître à l'occasion de la délimitation de ses frontières maritimes.

Le règlement par le dialogue

Mais cette option est loin de correspondre au choix fait par ce petit pays d’Afrique de l’Ouest dans le différend qui l’oppose actuellement au Ghana.
Dans les faits, les autorités togolaises privilégient plutôt la conduite d'un dialogue avec leur voisin de l’ouest afin de «parvenir à un accord mutuel».
Le ministre conseiller pour la Mer du Président togolais explique ce choix par la nécessité de maintenir de «bonnes relations de voisinage».
«Le Togo et le Ghana sont des pays frères et amis. Si nos deux pays ont pu trouver un terrain d’entente pour leur frontière terrestre, il n’y a pas de raisons qu’on n’en trouve pas pour les frontières maritimes. Le Ghana a fait le choix d'une ligne devant partager nos deux pays. Le Togo estime que cette ligne ne lui convient pas et a fait une contre-proposition le 28 juillet dernier. Voilà la base de nos discussions » affirme-t-il.
Pour l’officiel togolais, cette démarche répond aussi au souhait exprimé par les chefs d’État ouest-africains qui, en 2009, et à la suite de plusieurs incidents, ont invité les pays côtiers à privilégier la voie du dialogue dans le règlement de leurs différends relatifs à leurs frontières maritimes, plutôt que d’aller devant les tribunaux.
«Une juridiction peut vous donner raison aujourd’hui, sans que vous ayez la paix avec votre voisin, si celui-ci n’est pas d’accord», justifie Stanislas Baba.
Mieux, le ministre conseiller pour la Mer du Président togolais affirme que «l’Afrique est assez mûre pour avoir un dialogue responsable et délimiter des frontières sans qu’on soit obligé d’être départagé par des juridictions internationales».
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Durant la semaine du 16 août, plusieurs réunions se sont tenues à Accra et à Lomé entre les experts et les ministres des deux pays en charge des questions maritimes pour évaluer les différentes propositions. Stanislas Baba espère qu'une solution définitive pourra être trouvée rapidement.
«Notre souhait, c’est que d’ici à la fin de cette année, nous puissions boucler ce dossier. Nous le disons parce qu’aucun de nos deux pays n’a intérêt à aller au contentieux. L’expertise en la matière coûte cher. Le Ghana l’a fait avec la Côte d’Ivoire, et je ne pense pas que le pays soit prêt à se relancer dans  cette même aventure. Le Togo ne le veut pas en tout cas», a-t-il indiqué.
«Si le Togo a des ressources, nous préférerions les consacrer au développement, plutôt qu’à une bataille juridique», a conclu le ministre conseiller pour la Mer du Président togolais Faure Gnassingbé. Autant dire que le principe de bon voisinage sait fort bien s'accommoder de considérations économiques.
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