Des milliers de tanks, d'avions, d'hélicoptères: les talibans désormais armés jusqu’aux dents grâce à l'US Army

© AP Photo / Rahmat GulUn soldat de l'armée afghane passe devant des véhicules MRAP (Mine Resistant Ambush Protected) laissés sur place après le départ de l'armée américaine de la base aérienne de Bagram, dans la province de Parwan, au nord de Kaboul, en Afghanistan, lundi 5 juillet 2021. Les États-Unis ont quitté l'aérodrome de Bagram en Afghanistan après presque 20 ans, mettant fin à leur "guerre éternelle", dans la nuit, sans avertir le nouveau commandant afghan plus de deux heures après leur départ.
Un soldat de l'armée afghane passe devant des véhicules MRAP (Mine Resistant Ambush Protected) laissés sur place après le départ de l'armée américaine de la base aérienne de Bagram, dans la province de Parwan, au nord de Kaboul, en Afghanistan, lundi 5 juillet 2021. Les États-Unis ont quitté l'aérodrome de Bagram en Afghanistan après presque 20 ans, mettant fin à leur guerre éternelle, dans la nuit, sans avertir le nouveau commandant afghan plus de deux heures après leur départ.  - Sputnik Afrique, 1920, 25.08.2021
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En récupérant des millions d’armes américaines de l’armée nationale afghane en déroute, les talibans ont mis la main sur l’un des plus importants butins de guerre du XXIesiècle. Une prise extravagante, mais qui n’a pas matière à menacer, en principe, les intérêts occidentaux, explique à Sputnik un ex-agent des renseignements.
«Évidemment, nous ne voulons pas voir d’armes ou de systèmes américains tomber dans les mains de personnes qui pourraient s’en servir pour nuire à nos intérêts et ceux de nos alliés. Néanmoins, je n’ai pas de solution politique à vous proposer aujourd’hui», regrettait devant la presse, le porte-parole du Pentagone ce 23 août.
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Face à la presse, l’entourage du Président Biden a tenté de sauver les meubles sur cette question particulièrement délicate. «Ces [hélicoptères, ndlr] Black Hawk n’ont pas été donnés aux talibans*. Ils ont été donnés aux forces de sécurité nationales afghanes pour qu’elles puissent se défendre à la demande expresse du Président [afghan, ndlr] Ashraf Ghani, qui est venu dans le Bureau ovale et a demandé une capacité aérienne supplémentaire, entre autres choses», justifiait ainsi récemment le conseiller américain à la défense Jake Sullivan.

83 milliards de dollars pour former et équiper l’armée afghane

Outre le fait que ce matériel constitue des milliards de dollars jetés par les fenêtres, l’armée américaine a de facto transféré indirectement une mine d’or militaire au groupe islamiste contre lequel elle s’est battue pendant vingt ans.
​Washington a dépensé environ 83 milliards de dollars pour former et équiper l’armée nationale afghane (ANA) au cours des deux dernières décennies, faisant de celle-ci une armée «aussi bien équipée que n’importe quelle autre armée dans le monde», affirmait le 8 juillet Joe Biden, qui voulait il y a quelques semaines rassurer sur la capacité afghane à résister à la poussée talibane.
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Entre 2003 et 2016, les États-Unis ont transféré 75.898 véhicules, 599.690 armes, 162.643 équipements de communication, 208 avions et 16.191 équipements de renseignement, de surveillance et de reconnaissance aux forces afghanes, selon un rapport du Government Accountability Officede 2017.
De 2017 à 2019, la cadence n’a pas ralenti: 7.035 mitrailleuses, 4.702 Humvees, 20.040 grenades à main, 2.520 bombes et 1.394 lance-grenades, entre autres équipements, ont été transférés à l’ANA, souligne un rapport publié l’année dernière par l’inspecteur général spécial pour la reconstruction de l’Afghanistan (SIGAR).

Black Hawk et A-29 Super Tucano

Aujourd’hui, une partie de cet arsenal à la pointe de la technologie se trouve donc dans les mains des «étudiants en religion», comme le confirme un récent rapport de l’inspection générale spéciale pour la reconstruction afghane (SIGAR) envoyé au Congrès.
© Wikipedia / Staff Sgt. Larry Reid Jr.Un A-29 Super Tucano de construction américaine, ici opéré par l'armée nationale afghane en 2016. Six de ces aéronefs ont été transférés des États-Unis à l'Afghanistan au second trimestre de 2021 et ont probablement été récupérés par les Talibans* lorsque ceux-ci ont repris le pouvoir en août 2021.
Un A-29 Super Tucano de construction américaine, ici opéré par l'armée nationale afghane en 2016. Six de ces aéronefs ont été transférés des États-Unis à l'Afghanistan au second trimestre de 2021 et ont probablement été récupérés par les Talibans* lorsque ceux-ci ont repris le pouvoir en août 2021.  - Sputnik Afrique, 1920, 21.09.2021
Un A-29 Super Tucano de construction américaine, ici opéré par l'armée nationale afghane en 2016. Six de ces aéronefs ont été transférés des États-Unis à l'Afghanistan au second trimestre de 2021 et ont probablement été récupérés par les Talibans* lorsque ceux-ci ont repris le pouvoir en août 2021.
Il demeure toutefois peu probable que les talibans* aient pu récupérer et puissent utiliser du «matériel sensible», explique au micro de Sputnik un ex-agent des renseignements en poste en Afghanistan.
«Ce qui est sûr, c’est que le matériel sensible a été évacué, détruit ou rendu inopérable. C’est ce qu’il s’est passé à la base de Bagram où le gros du matériel sensible a été évacué ou détruit», rappelle-t-il.
Celui-ci «n’imagine pas que du matériel sensible et toujours opérationnel soit resté sur place et qu’il puisse servir pour frapper les Américains et leurs alliés», même si c’est une réalité qu’il n’exclut pas complètement. Après tout, des erreurs peuvent se produire.
À titre d’exemple de «matériel sensible», dans les années 1990, des agents de la CIA avaient offert des valises contenant des milliers de dollars pour racheter des missiles Stinger mortels qu’ils avaient fournis aux moudjahidins pour combattre l’Union soviétique dans les années 1980.

Les talibans* capables d’opérer des chars M1 Abrams?

Difficile toutefois d’imaginer des talibans* opérer les hélicoptères Black Hawk ou encore les avions de combats légers A-29 qu’ils ont récupérés. Ceux-ci nécessitent un entretien, une logistique et des compétences qui ne sont, sauf surprise et pour l’heure, pas accessibles aux talibans*.
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En effet, «il a fallu aux Afghans et aux États-Unis beaucoup de temps pour développer une capacité aérienne indigène, et même alors, ils dépendaient des États-Unis pour maintenir ces avions dans le ciel», explique à The Hill Elias Yousif, directeur adjoint du Security Assistance Monitor Center for International Policy.
Pour les blindés par contre, c’est une autre histoire: d’après notre interlocuteur, si les djihadistes au Levant «ont été capables d’opérer des T-78», les talibans* «pourront certainement opérer des M1 Abrams».
«Ce que l’on risque de voir, c’est comme Daech* en Syrie ou en Irak: le groupe armé a récupéré et va opérer du matériel militaire de première nécessité. Ça va de l’arme individuelle au char lourd», explique l’ancien espion.
Au-delà des milliards de dollars dilapidés du jour au lendemain, le coût de la prise talibane de ce butin militaire se situe ailleurs: «Quand un groupe armé met la main sur des armes de fabrication américaine, c’est une sorte de symbole de statut. C’est une victoire psychologique», affirme Elias Yousif. Éventuellement aussi, des possibilités de faire des affaires avec d’autres pays ou entités.
Le ministre de la Défense russe s'est d'ailleurs dit inquiet que ces armes se retrouvent en mains talibanes. Cela constitue russe une menace sécuritaire pour son pays a affirmé le responsable. 
*Organisations terroristes interdites en Russie
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