«Nos frères talibans» coûteront-ils l’élection à Justin Trudeau?

© Sputnik . StringerTaliban fighters (a terrorist group banned in Russia) pose for a photo in Kabul, Afghanistan.
Taliban fighters (a terrorist group banned in Russia) pose for a photo in Kabul, Afghanistan.  - Sputnik Afrique, 1920, 27.08.2021
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Au Canada, la déclaration de la ministre libérale Maryam Monsef au sujet de ses «frères talibans*» sème toujours la controverse. Une affirmation perçue comme une véritable insulte par de nombreux vétérans du conflit en Afghanistan. En pleine campagne électorale, Justin Trudeau en paie-t-il déjà le prix? Sputnik fait le point.
«Nos frères, les talibans*»: en l’espace de quelques minutes, les propos de la ministre Maryam Monsef ont fait le tour des réseaux sociaux.165 Canadiens ayant laissé leur vie durant l’intervention en Afghanistan (2001-2014), certains observateurs ont interprété cette déclaration comme une grave insulte envers les soldats tombés au feu et les anciens combattants. «C’est un manque de respect pour tout ce que nous sommes comme pays», tonne Laurent Proulx:
«Nous sommes gouvernés par des wokes inconscients qui n’ont pas le moindre patriotisme en eux. C’est cette situation, bien plus que celle en Afghanistan, qui m’incite à me questionner sur les sacrifices que mes frères d’armes et moi avons faits pour ce pays», s’indigne ce vétéran du conflit et chef d’entreprise à notre micro.
Sénateur conservateur à Ottawa, Pierre-Hugues Boisvenu estime aussi qu’il s’agit d’une injure envers l’effort de guerre canadien dans ce pays d’Asie centrale. «La question qu’il faudrait poser à la ministre Monsef est la suivante: les talibans sont-ils des victimes à la lumière de sa déclaration?», s’insurge le sénateur.
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Plus de 40.000 militaires canadiens ont été déployés entre le début de l’intervention du Canada et l’évacuation de ses derniers ressortissants ainsi que des réfugiés afghans sélectionnés par Ottawa. La guerre d’Afghanistan est le plus long conflit auquel ait participé le pays de l’érable. 11 milliards d’euros ont été dépensés par le gouvernement central dans le cadre de cette intervention.

Un «commentaire très maladroit» pour une ministre féministe

En entrevue, le sénateur pointe aussi ce qu’il voit comme une contradiction entre le rôle de la ministre et sa «complaisance» envers les anciens et nouveaux maîtres de Kaboul: «Cette ministre a fait un commentaire très maladroit. Elle a oublié qu’elle était ministre dans un gouvernement démocratique et non citoyenne afghane sympathisant avec un gouvernement qui bafoue les droits des femmes. A-t-elle oublié qu’elle était ministre fédérale de la condition féminine ou simplement oublié qu’elle était une femme?», s’indigne l’ex-vice-président du comité permanent sénatorial sur la sécurité nationale.
Questionnée par les médias au sujet de sa déclaration qu’elle a lue lors d’un point de presse en ligne, Maryam Monsef a voulu se montrer rassurante quant à son patriotisme:
«La référence aux frères est une référence culturelle, mais laissez-moi être claire: nous ne soutenons pas les talibans et nous sommes horrifiés que les gains durement acquis au cours des vingt dernières années soient menacés», s’est justifiée la députée libérale d’origine afghane.
La déclaration de la ministre Monsef rappelle l’affaire Omar Khadr, observe le sénateur Boisvenu.

Le précédent Omar Khadr, combattant afghan indemnisé par Ottawa

En 2017, le gouvernement Trudeau a versé une indemnité de 10,5 millions de dollars (7,5 millions d’euros) à cet Afghan capturé à l’âge de quinze ans par les Américains, puis incarcéré à Guantanamo et au Canada.
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En 2010, la Cour suprême du Canada a conclu que la détention de l’ex-combattant mineur avait enfreint les «principes de justice fondamentale». Le versement de cette indemnisation par Ottawa avait suscité le même genre de réaction chez les vétérans et de nombreux politiciens, pour qui il s’agissait en quelque sorte d’un acte de trahison.
«C’est le problème des Libéraux et surtout de Justin Trudeau. Ils gèrent les enjeux de manière idéologique, que ce soit avec l’État islamique*, Al-Qaïda* ou les talibans. Leurs biais idéologiques ne changent pas. La gestion de la criminalité par Justin Trudeau est la même: ils visent la réhabilitation à tout prix. Les Libéraux sont habités par des fantasmes qui, par définition, ne tiennent pas compte de la réalité», fustige le sénateur.
La déclaration de la ministre survient à peine deux semaines après le début de la campagne électorale fédérale.

Les talibans s’invitent dans la campagne électorale

Talonné par les journalistes, le Premier ministre fédéral, Justin Trudeau, a affirmé le 25 août qu’il n’avait «rien à ajouter» à la déclaration de sa ministre. Il en a aussi profité pour réitérer que son gouvernement n’allait pas reconnaître le nouveau régime taliban, une posture qui est également celle de son principal adversaire, Erin O’Toole, le chef du Parti conservateur. La déclaration malheureuse de Maryam Monsef pourrait-elle nuire à la réélection des Libéraux de Trudeau? Pierre-Hugues Boisvenu estime qu’elle a déjà fait des dégâts:
«Ce sera un autre dossier qui réduira la crédibilité de Trudeau à gérer des affaires complexes», tranche-t-il.
*Organisations terroristes interdites en Russie.
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