Station de pompage de gaz - Sputnik Afrique, 1920, 08.10.2021
Crise du gaz 2021
L’augmentation du prix du gaz en Europe, enregistrée depuis le début de 2021, s’est accélérée en septembre. Si le 1er septembre, 1.000 mètres cubes se vendaient 614 dollars, contre plus de 1.030 dollars à la fin du mois.

Pourquoi la hausse des prix du gaz en Europe ne profite pas à la Russie?

© Sputnik . Stringer / Accéder à la base multimédiaUne entreprise gazière (image d'illustration)
Une entreprise gazière (image d'illustration) - Sputnik Afrique, 1920, 08.10.2021
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En dépit des voix voulant que la Russie soit la grande gagnante de la flambée des prix du gaz en Europe, un analyste du Fonds russe de la sécurité énergétique relate à Sputnik pourquoi la Russie n’en profite pas, ainsi qu’explique qu’en se glissant sur la route des énergies renouvelables, l’UE a mis de la pression sur l'énergie traditionnelle.
Alors que certains acteurs de la scène internationale pointent du doigt la Russie, en faisant allusion qu’elle aurait joué un rôle dans l’actuelle crise du gaz, comme si Gazprom profitait de la flambée des prix en Europe, Igor Iouchkov, analyste du Fonds russe de la sécurité énergétique nationale, au micro de Sputnik, explique que la Russie elle-même ne profite pas de cette situation, car "quand le prix devient très élevé, ça commence à tuer la demande".
"Maintenant, ceux qui n’utilisent que du gaz ont commencé à arrêter la production. Par exemple, une partie des entreprises qui produisent des engrais azotés, qui sont fabriqués à partir de gaz, se sont arrêtées et ne produisent plus rien du tout. Ce marché est réduit. Ensuite, les exploitations agricoles qui utilisent le gaz pour chauffer les serres, elles commencent à arrêter leurs activités. Avec des prix élevés, le marché commence à se resserrer. C'est pourquoi les fournisseurs ne profitent pas non plus des prix très élevés, le marché va diminuer et ils n'auront nulle part où livrer le produit", a expliqué l’interlocuteur de Sputnik.
Il n’est pas le seul à affirmer que la Russie est également affectée par cette flambée des prix. Notamment, la hausse des prix de l’énergie en Europe est une source de préoccupation pour la Banque centrale de Russie, parce que cela pourrait avoir un impact sur l'inflation importée, selon son vice-président Alexeï Zabotkine. Enfin, Vladimir Poutine a lui-même assuré le 6 octobre, lors d'une réunion avec les responsables du secteur énergétique national, que la Russie n'avait "pas besoin d'une telle agitation spéculative. Comme on le sait, il y a d'autres événements désagréables derrière ces agitations".
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Crise du gaz 2021
L’effondrement temporaire du prix du gaz est-il lié à une déclaration de Poutine?
Parmi d’autres raisons qui expliquent pourquoi la Russie n’a pas besoin des prix du gaz si élevés figure la concurrence avec d’autres sources d’énergie, selon l’analyste russe. Dans le contexte des prix trop élevés, les Européens se tourneraient plus vers les sources d’énergie renouvelables, laissant le gaz derrière, selon lui.

"Lorsque le prix du gaz a augmenté, l'Europe a commencé à consommer activement du charbon, et son prix a aussi connu une hausse record, parce qu'il est venu à manquer aussi. Et puis, on assiste à une concurrence avec des sources d’énergie renouvelables, même si les Européens les soutiennent généralement. Quand on préfère le gaz parce qu'il coûte 200 à 300 dollars pour 1.000 mètres cubes c’est une chose, mais lorsqu’il coûte 1.000 dollars pour 1.000 mètres cubes, c’est une tout autre histoire. Il est évident que les sources d’énergie renouvelables seront alors très attractives, même sur le plan économique. C'est pourquoi les prix surélevés du gaz ne sont pas favorables pour la Russie non plus", ajoute Igor Iouchkov.

Qui sont les coupables?

Selon l’expert dans le domaine énergétique, les sources d'énergie renouvelables sont notamment responsables de la situation actuelle en Europe. Ou plus précisément, la politique de leur développement accéléré. L'Union européenne a exercé des pressions sur l'énergie traditionnelle et a contraint les entreprises à mettre leurs installations hors service, rappelle Igor Iouchkov.

"Ils ont non seulement fermé les centrales à charbon, mais les ont fait exploser, affirmant qu’elles ne reviendront plus. Et maintenant, elles seraient très utiles. Ou quand ils ont fermé les mines de charbon. Ils ne les ont pas mises en réserve ou conservation, mais les ont fermées définitivement. Et le gaz a aussi éprouvé de la pression. Ils l’ont rendu peu rentable", liste l’analyste.

Dans le bilan énergique, les sources d'énergie renouvelables ont occupé une place prioritaire, ce qui veut dire que toute l’énergie produite par ses sources a été vendue en premier. Et puis, s’il y a encore de la demande, ils se tournent vers l’énergie traditionnelle, notamment le gaz ou le charbon. Cela a poussé de nombreuses entreprises à fermer.

"Ainsi, quand il s'est avéré que les vents étaient moins forts cette année, ils se sont tournés vers le gaz, le gaz est déjà en déficit, et le GNL est parti sur les marchés asiatiques. Ils se sont alors tournés vers le charbon, le charbon est déjà en pénurie et le charbon lui-même est redirigé vers les marchés asiatiques et il n’y a plus assez de centrales à charbon en Europe, et voici le résultat de cette transition énergétique accélérée et du développement accéléré des énergies renouvelables. Dès qu'il échoue, les Européens se tournent vers l'énergie traditionnelle qu'ils ont eux-mêmes détruit pendant des décennies", précise l’interlocuteur de Sputnik.

Néanmoins, selon l'analyste du Fonds russe de la sécurité énergétique nationale, d’après les déclarations des responsables européens sur la question, cette expérience ne leur a rien appris. Ils martèlent qu’il faut continuer à encore plus développer les énergies renouvelables pour que la situation se stabilise.

"Personne ne veut reconnaître ses erreurs. S'ils construisaient de cette manière le marché de l’énergie, alors ils disent que nous avons bien fait, nous devons juste faire encore plus comme nous l'avons fait, alors tout ira bien", ironise l’expert.

Et jusqu’à quand la crise?

Il est fort probable que les prix du gaz, qui enchaînent les records historiques, ne baissent pas avant le printemps, estiment de nombreux responsables politiques européens. D’après l’interlocuteur de Sputnik, la demande et le prix seront élevés pendant toute la saison hivernale, environ jusqu’au "mois de mars-avril 2022".
Vladimir Poutine - Sputnik Afrique, 1920, 06.10.2021
Crise du gaz 2021
Poutine: "les Européens visent la neutralité carbone aux dépens de la Russie"
Interrogé sur les raisons qui expliquent que les Européens n’aient pas prévu de remplir leurs stocks avant l’arrivée de la saison de chauffage, l’analyste du Fonds russe de la sécurité énergétique nationale a détaillé au micro de Sputnik que l’Union européenne avait du mal à évaluer la situation quand les prix du gaz ont commencé leur montée durant l’été, atteignant 400 voire 500 dollars pour 1.000 mètres cubes. Ils ont estimé que cela serait un grand risque d’acheter du gaz à de tels prix, ajoute-t-il. Toutefois, maintenant les prix se sont envolés, et ils n’ont plus le choix à l'approche de la prochaine période de chauffage.

"Cette année, après la période de chauffage, les entrepôts souterrains ont été dévastés, puis à l’arrivée des chaleurs d’été, beaucoup d'énergie est allée à la climatisation. Et le prix du gaz ne cessait de monter, arrivant à 400 dollars les 1.000 mètres cubes. Les entreprises européennes auraient jugé ce prix de trop élevé, même plus élevé qu’en hiver. Ainsi, elles auraient cru que c'était un pic et que ce n’était pas un bon moment pour acheter du bleu et remplir les entrepôts, parce que ce serait moins cher plus tard", raconte Igor Iouchkov décrivant un scénario probable d’évolution de la situation.

Certes, les stocks européens ne sont pas vides et les Européens auront assez de gaz pour se chauffer et en distribuer à leur population, mais ils seront obligés d’importer plus de gaz par jour pendant toute la période de chauffage, car ils ne l’ont pas fait avant. La demande devrait donc persister jusqu’à l’année prochaine.

La flambée des prix du gaz en Europe

Le prix du gaz en Europe est passé jeudi 7 octobre sous la barre des 1.000 dollars pour 1.000 mètres cubes pour la première fois depuis le début du mois.
Après avoir atteint le 6 octobre un niveau record de 1.937 dollars pour 1.000 mètres cubes, le coût des contrats à terme sur le gaz de novembre du hub néerlandais TTF a chuté pour se fixer à 981,1 à 9h22, heure de Paris. Ce 8 octobre, il reste presque au même niveau en se négociant autour de 1.200 dollars.
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