Dromadaires botoxés, lions et guépards domestiqués: les caprices des nouveaux riches du Golfe

© REUTERS / Himanshu Sharma Мальчик ведет верблюдов на ярмарку в Нагауре
Мальчик ведет верблюдов на ярмарку в Нагауре - Sputnik Afrique, 1920, 10.12.2021
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Des dizaines de dromadaires ont été exclus d’un concours de beauté en Arabie saoudite pour avoir reçu des injections de botox. Une pratique condamnée par les défenseurs de la cause animale. Mais dans le Golfe, c’est un peu le cadet de leurs soucis.
La cause animale n’est pas la principale préoccupation des pays du Golfe. Lors du prestigieux concours de beauté des camélidés du roi Abdelaziz d'Arabie saoudite, plus de 70 dromadaires ont été disqualifiés. La raison: l’usage sur les animaux de médecine et chirurgie esthétiques. En effet, pour les tricheurs, il y aurait eu liftings, injection de botox, collagène et autres produits cosmétiques, ce qui entre en totale contradiction avec le règlement de l’épreuve.
Pendant près de quarante jours, quelque 33.000 propriétaires de dromadaires venus des quatre coins du monde (USA, Russie, France…), et bien évidemment des pays du Golfe, participent à ce grand événement. Plus de 100.000 touristes sont attendus chaque jour sur le site du festival d’une surface de 32 km², à 100 km au nord-est de la capitale saoudienne Riyad. Pas moins de 66 millions de dollars de prix sont en jeu. Pour départager les camélidés, les jurés de la compétition observent la forme de la tête, du cou, de la bosse, de la robe et de la posture des animaux.
Mais cette année l’Arabie saoudite a mis en place de nouvelles techniques pour contrer la fraude. En effet, selon les médias d’État saoudiens, les juges ont utilisé une technologie "avancée" pour découvrir la falsification de chameaux à une échelle jamais vue auparavant. Tous les concurrents ont d’abord été conduits dans une salle pour être examinés. Leurs tête, cou et torse ont ensuite été scannés avec des appareils à rayons X et à ultrasons 3D, et des échantillons de peau ont été prélevés pour analyse génétique et autres tests.

Des injections de botox sanctionnées

Face à la tricherie, les organisateurs sont "désireux de mettre fin à tous les actes de falsification et de tromperie dans l'embellissement des dromadaires" et promettent d'"imposer des sanctions strictes aux manipulateurs". Le porte-parole officiel de l’événement, Muhammad Al-Harbi, a précisé au micro de Sputnik que l’amende pourrait "s'étendre aujourd'hui entre 50.000 et 100.000 riyals", ce qui représente plus de 23 000 euros.
Les autorités saoudiennes ont ainsi pu décrire comment les faussaires procédaient. Le botox était injecté dans les lèvres, le nez, la mâchoire et d'autres parties de la tête des dromadaires pour détendre les muscles; des charges de collagène ont été utilisées et des hormones ont également été administrées pour stimuler la croissance musculaire. Des élastiques ont de surcroît été employés pour rendre les parties du corps plus grosses que la normale en limitant l’afflux sanguin.
Ces opérations de liftings sont monnaie courante. En 2018, douze chamelles avaient déjà été éliminées du concours en raison d’injections de botox. Des pratiques qui ont provoqué l’ire des défenseurs de la cause animale.
"Soumettre un animal à une procédure cosmétique, qu’il s’agisse de la coupe des oreilles, du dégriffage, de l’écornage ou de l’injection de produits de remplissage, est d’une cruauté inouïe et montre que les humains qui utilisent de telles tactiques sont extrêmement laids", commentait à la BBC Jason Baker, vice-président principal du groupe de défense des droits des animaux PETAAsie.
"Les problèmes de bien-être animal devaient être traités dans tout le Moyen-Orient", a-t-il poursuivi.

Au Golfe, on achète un lionceau comme on achèterait un chiot

Mais il y a du pain sur la planche. Les pays du Golfe participent également au commerce illicite d’animaux en voie de disparition. Malgré l’interdiction en 2017 de la possession d’animaux rares aux Émirats arabes unis, cet usage reste très répandu. Sur les réseaux sociaux, des membres des familles royales postent vidéos et photos sur leurs comptes Facebook et Instagram en compagnie de lions, de tigres, de guépards, de léopard ou encore de hyènes. Pour un montant avoisinant les 2.200 dollars, les nantis du Golfe peuvent s’offrir un lionceau blanc sur des réseaux frauduleux.
À Dubaï, l’instagrameur Humaid Abdulla Albuqaish, aux 2 millions d’abonnés, a son propre zoo privé qui attire des dizaines de touristes étrangers par jour. Moyennant 250 dollars, vous pouvez caresser des tigres, enlacer un guépard et jouer avec des singes. Dans les pays du Golfe, loin de la savane africaine, ces animaux seraient devenus un symbole de prestige et de richesse.
Ce commerce illégal représente plus 20 milliards de dollars à l’échelle de la planète. Un trafic lourd de conséquences pour la biodiversité.
"Le guépard est l’une des espèces les plus menacées au monde. Chaque année, plus de 300 bébés guépards sont capturés dans la corne de l’Afrique puis envoyés dans le Golfe. Ce qui représente la moitié des naissances", déplorait la documentariste Miyuki Droz Aramaki en janvier dernier.
De ce fait, plusieurs ONG se battent pour interdire ce trafic en provenance d’Afrique. Les organisations travaillent en effet avec les autorités du Somaliland pour créer un parc naturel et ainsi réduire cette traite.
Mais face à la satisfaction personnelle ou pour des concours de beauté, la cause animale est (très) loin de faire consensus dans les pays du Golfe.
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