Cours d'Anti-néolibéralisme
Avec l’aide de l’économiste Omar Aktouf, professeur titulaire à HEC Montréal et membre du conseil scientifique d’ATTAC Québec, Sputnik entame une série d’émissions dans le but d’expliquer les fondements de ce néolibéralisme qui génèrent les crises répétitives.

Critique du néolibéralisme: il faut un "leadership caractérisé par le partage et la confiance"

© Sputnik . Par Omar AktoufLe professeur Omar Aktouf
Le professeur Omar Aktouf - Sputnik Afrique, 1920, 18.01.2022
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Dans ce 30e cours d’"Anti-néolibéralisme", le Pr Omar Aktouf évoque les origines du pouvoir absolu des dirigeants d’entreprise dans le cadre de la dimension transcendantale que le management néolibéral attribue arbitrairement aux leaders. Il cite l’entreprise québécoise Cascades comme exemple d’une gestion renouvelée et réussie.
Au milieu des années 1970, alors que les produits et services venus de l’Asie de l’Est, le Japon et la Corée du Sud en particulier, et du Nord de l'Europe, dont l’Allemagne et les pays scandinaves, s’imposaient irrémédiablement sur le marché mondial en raison de leur qualité supérieure, les spécialistes en économie-gestion ont cherché à comprendre le secret de leur réussite fulgurante par rapport aux entreprises américaines ou européennes.
À ce titre, Omar Aktouf, professeur titulaire à HEC Montréal et membre du conseil scientifique d’ATTAC au Québec, explique auprès de Sputnik dans ce 30e cours d’"Anti-néolibéralisme" que la différence entre ces deux modèles "réside dans le fait qu’au Japon, par exemple, le côté humain est l’épicentre de tout ce qui se passe ou ne se passe pas, en termes de gestion des entreprises".
Et d’ajouter que pour résoudre les problèmes "du management traditionnel néolibéral, mais sans la prise en compte de l’aspect humain dans l’organisation des entreprises, les tenants du néolibéralisme ont inventé la figure du leader et le concept de leadership comme moyens de susciter l’adhésion des travailleurs grâce aux qualités personnelles innées des responsables. Ces derniers se sont vus attribués des pouvoirs absolus justifiés grâce à une dimension transcendantale supposée inaccessible au commun des mortels".

Le cas d’école de l’entreprise Cascades

"La reconstruction d'une forme de pouvoir plus conforme à l'esprit horizontal à la rationalité partagée, passe par le fait de céder et de donner des parcelles de pouvoir à tout agent que l'on veut responsable et preneur d'initiatives", affirme le Pr Aktouf, citant l’exemple "de l’entreprise multinationale québécoise Cascades qui emploie 15.000 personnes dans le monde".
Selon lui, "l’entreprise Cascades a un fonctionnement qui ne repose pas sur une rupture entre les dimensions sociale, humaine et économique. Au contraire, sa gestion s’apparente plutôt à un système de responsabilités partagées et la culture de l’entreprise est construite sur des relations de partage et de respect, et elle amène une productivité élevée".
Et de souligner que "contrairement au modèle traditionnel d’organisation construit sur la logique du contrôle du travail, la logique de l’autocontrôle doit se fonder sur un leadership caractérisé par le partage, le droit à l’erreur et la confiance. Cette façon de faire permet et encourage les processus de coopération, d’innovation et de créativité dans un contexte de satisfaction plus générale. La transgression du mythe de la gestion et la possibilité d’être interpellés semblent conférer aux dirigeants une base de légitimité et une capacité de mobilisation des volontés de leurs dirigés encore bien plus grandes et plus solides que ne le permettrait n’importe quelle forme de pouvoir autoritaire ou manipulateur".

Quid de la culture d’entreprise?

Enfin, il explique que "la mode de la culture d’entreprise, du management stratégique et du héros d’entreprise vient essentiellement du fait que, face à l’excellence d’autres modèles d’entreprise et de conduite du travail industriel, notamment japonais, le management classique se trouvait démuni. En un mot, il est apparu que rien ne pouvait valoir, en matière de motivation, l’engagement volontaire, l’adhésion spontanément et pleinement consentie. On s’est alors mis à parler de valeurs (croyances profondes qui prédisposent à certaines façons d’agir), de mythes et de symboles".
"En fait, pour qu’une autorité soit réellement acceptée et reconnue par ceux auxquels elle s’adresse, il faudrait qu’il y ait des conditions de transparence et d’équité ainsi que des rapports de travail très près du type informel et égalitaire", conclut-il.
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