Au Cameroun, "les séparatistes ont décapité les symboles de l’État"

© AFP 2023 MARCO LONGARILes forces de police camerounaises
Les forces de police camerounaises - Sputnik Afrique, 1920, 03.03.2022
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L’horreur s’est à nouveau produite dans la partie séparatiste du Cameroun. Au moins six personnes, dont un maire et un sous-préfet, ont été tuées le 2 février dans une attaque à la bombe dans une localité du Sud-Ouest anglophone. Une attaque contre l’autorité étatique, qui traduit encore plus, selon des analystes, le pourrissement de la situation.
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L’information barre la Une des journaux ce 3 février et tous les qualificatifs sont mis en évidence pour décrire cet autre drame dans la crise séparatiste qui déchire les deux régions anglophones du Cameroun. La veille, une attaque aux engins explosifs improvisés (EEI) contre un convoi dans la localité d’Ekondo Titi, dans la région du Sud-Ouest anglophone du Cameroun, a fait six morts parmi lesquels le sous-préfet et le maire de cette commune, le chauffeur et des militaires, ainsi que plusieurs blessés, à l'occasion d'une tournée qui était effectuée dans cet arrondissement. Si l’attaque n’a pas été revendiquée, les autorités pointent du doigt les groupes armés séparatistes qui opèrent dans la région. Un drame qui amplifie, selon Hippolyte Eric Djounguep, chercheur non résident à Trends research & Advisory, l’affront fait par les séparatistes au pouvoir de Yaoundé.
"Les séparatistes ont décapité les symboles de l’État. Cette énième attaque des groupes armés contre les autorités est la preuve que ce conflit monte en intensité, qu'il résiste à l'usure du temps. Cela démontre aussi que les groupes armés maîtrisent tous les jours un peu plus les techniques de guérilla", explique au micro de Sputnik le spécialiste des conflits en Afrique subsaharienne.
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Des attaques récurrentes aux EEI

Dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest où vivent la majorité des anglophones du pays, l’armée et les groupes séparatistes s’affrontent quasi quotidiennement, depuis 2017, prenant en tenaille les civils, victimes collatérales d’exactions des deux camps. Depuis 2021, de nombreuses attaques aux EEI y sont régulièrement enregistrées. Le 24 novembre dernier, trois élèves et un enseignant avaient été tués dans une autre attaque à la bombe dans la même localité d’Ekondo Titi. Plus tôt, le 10 novembre, une série d’attaques aux engins explosifs contre des civils avait été enregistrée dans les deux régions séparatistes dont une à l’université de Buea, chef-lieu du Sud-Ouest. Un usage récurrent d’EEI contre des cibles civiles, qui marquait déjà, souligne Hippolyte Eric Djounguep, "l’entrée dans une autre dimension de la guerre, une sorte +d’intifada anglophone+ contre le pouvoir de Yaoundé".
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Selon un décompte du bureau humanitaire de l’Onu au Cameroun, rendu public au mois de février, au moins 11 attaques à la bombe artisanale ont été enregistrées dans la période du 1er au 31 décembre 2021 dans les deux régions. Sept attaques ont été perpétrées contre des dispensaires dont deux dans le Nord-Ouest et cinq dans le Sud-Ouest.

"L’urgence d’un cessez-le-feu"

Dans les discours officiels, Yaoundé évoque très souvent un retour progressif à la normale dans cette partie du pays, et la mise en place progressive des résolutions du "grand dialogue national" (GDN), tenu en 2019, pour résoudre la crise en cours. Cependant, rappelle Hippolyte Eric Djounguep, les attaques quotidiennes visant des cibles de gros calibres mettent à nue "la vulnérabilité des populations civiles prises aux pièges entre deux feux". Le spécialiste des conflits souligne encore "l’urgence d’un cessez-le-feu" avant toute démarche.
"Et ce n’est qu’après cette étape qu’il faut ouvrir un véritable dialogue inclusif, même avec les plus radicaux, pour espérer un retour à la normale", suggère-t-il.
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Pour rappel, en 2017, les séparatistes anglophones ont pris les armes contre le gouvernement de Yaoundé pour revendiquer la création d’un territoire indépendant. Les tensions avaient auparavant commencé en novembre 2016 sous la forme de revendications corporatistes: des enseignants déploraient la nomination de francophones dans les régions anglophones et des juristes désapprouvaient la suprématie du droit romain au détriment de la Common Law anglo-saxonne. Seulement, au fil des ans, le conflit s’est enlisé. Selon le dernier rapport de l’ONG Human Rights Watch (HRW) publié en janvier 2022, ce conflit a déjà fait plus de 4.000 morts civiles et poussé plus d’un million de personnes à abandonner leurs foyers. Des milliers d’hommes et de femmes y ont besoin d’assistance.
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