L’Europe sur écoute : « je sais que tu sais que je sais »

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L’ampleur prodigieuse de la surveillance et des écoutes pratiquées par les services de renseignement américains contre les gouvernements d’Europe Occidentale apparaît au grand jour, alors que les relations américano-européennes se dégradent.

Le quotidien Le Monde rapporte qu’environ 70 millions de lettres et messages français ont été interceptés par les Américains le jour même de la visite en France du chef de la diplomatie américaine John Kerry. Un jour plus tard, lorsque deux fonctionnaires du Département d’État et du Conseil de sécurité nationale sont arrivés en Allemagne, le gouvernement allemand a fait savoir avec regret qu’il disposait d’informations sur la mise sur écoute par les Américaine du portable de la chancelière Angela Merkel.

Et puisque le sommet des 28 membres de l’UE se réunit ces jours-ci à Bruxelles, les Européens ont la possibilité inédite de dire de leur fameuse « voix commune » leur indignation aux Américains. De cette même voix dont ils menacent depuis longtemps de parler à la Russie.

Savez-vous ce que dira la « voix commune » ? Mais strictement rien ! Les toutes premières réactions des leaders européens montrent que rien ne sera entrepris pour sanctionner « le grand frère » d’outre-Atlantique, et ceci au moment où d’autres révélations de Snowden, notamment sur l’Allemagne et l’Italie, attendent leur tour d’être publiées. D’ailleurs, le député du parlement italien Claudio Fava a dit dans une interview à La Voix de la Russie qu’il n’attendait des Italiens que des protestations rituelles :

« Le gouvernement français était tout simplement obligé d’intervenir au moment où Snowden a remis au Monde les documents sur le programme d’écoute des Français par la NSA. C’est uniquement pour cette raison que Paris s’est permis de hausser le ton. J’ai par ailleurs l’impression que les services spéciaux français étaient eux aussi parfaitement au courant de l’écoute de leurs concitoyens. »

Bref, la situation qui s’est créée colle on ne peut mieux au titre de la comédie italienne Je sais que tu sais que je sais. On imagine facilement le scandale qui éclaterait au sommet de l’UE si la Russie ou, disons, l’Iran étaient impliqués dans l’écoute des Européens. Or, rien de tel ne se prépare contre « le grand frère » américain. Pourquoi ? Mais parce c’est un client riche, et tant pis s’il manifeste parfois des symptômes de sclérose ou de démence sénile.

Aussi, Washington ne s’est-il pas refusé à croire jusqu’aux derniers mois à la présence en masse de djihadistes en Syrie en présentant l’opposition syrienne comme un club de démocrates libéraux, alors même que depuis quelques années cette présence n’était pas un secret pour les journaux européens.

Dans cette situation, les États-Unis ont l’air d’un mauvais élève incapable de lire un seul livre tandis qu’il peut accéder à des millions de bouquins via Internet. Le cancre est cependant sauvé par sa grosse fortune et le caractère accommodant de ses « professeurs » européens. En effet, les Européens ne se sont dressés contre pas une seule grande initiative américaine depuis 2003. Il s’ensuit que les destinées de la planète sont toujours entre les mains des mêmes cancres. T


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