Ukraine : pourquoi McCain et Ashton soutiennent les manifestants

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Les démarches de l'ancien ministre des Affaires étrangères d'Allemagne Guido Westerwelle et de la ministre des Affaires étrangères de l'Union européenne Catherine Ashton à Kiev étaient étranges, pour ne pas dire plus, par rapport au comportement habituel des diplomates internationaux.

Au lieu de rencontrer des représentants officiels du gouvernement ukrainiens, ces derniers se sont ralliés aux manifestants anti-gouvernementaux, les incitant à poursuivre les protestations contre un gouvernement élu de façon démocratique et légitime. Deux sénateurs américains, John McCain et Chris Murphy, ont eux aussi galvanisé la foule, exhortant à ne pas céder et à réclamer l'association avec l'Union européenne : « L'Ukraine rendra meilleure l'Union européenne tout comme l'Union européenne améliorera l'Ukraine ». En quoi l'adhésion d'un pays européen à l'UE regarde des sénateurs américains serait un mystère si on n'oubliait pas que certains Américains continuent de croire que la guerre froide n'est toujours pas terminée et que la Russie reste l'ennemi numéro un qu'il faut anéantir à tout prix. En réalité il est évident que dans cette histoire de l'adhésion éventuelle de l'Ukraine à l'Union européenne, l'opinion du peuple n'a aucune valeur pour de nombreux hommes politiques américains et pour certains Etats membres de l'UE. Il importe que la Russie soit entourée d'Etats tampons et que sa progression vers la stabilité soit empêchée.

Dans cet ordre d'idées, certains journalistes abordant ce sujet contribuent eux aussi à diffuser des désinformations sur les événements réels. Ils n'écrivent pas que les gens ayant rempli les places ne sont qu'une partie de la population qui n'est pas d'ailleurs majoritaire. La majorité de la population occupe une position opposée et soutient les décisions du gouvernement. Il convient également de noter que les manifestants protestent contre la crise économique en Ukraine plutôt que de revendiquer un accord avec Bruxelles. Quant à ceux qui exigent l'association de l'Ukraine avec l'UE, ils sont en proie à l'illusion qu'après s'être joint à l'Europe, toutes les difficultés économiques et toutes les peines quotidiennes disparaîtront comme par un coup de baguette magique.

Malheureusement, c'est impossible. A vrai dire, nous autres, Européens, n'avons ni moyens économiques, ni envie de s'occuper des problèmes d'Ukraine, de dépenser pour elle des sommes colossales que l'UE n'a pu donner ni aux Grecs, ni aux Portugais.

Cette incompréhension n'est pas unique. Des erreurs et malentendus sont devenus évidents il y a un mois de la part de toutes les parties prenantes : d'une part, chez l'Allemagne et la Pologne et, de l'autre, chez la Russie et l'Ukraine.

En Allemagne, les démocrates chrétiens développent depuis déjà longtems les rapports avec l'opposition ukrainienne, plus particulièrement avec le boxeur-politique Vitali Klitchko. Il est un invité fréquent en Europe, son parti est financé et lui-même s'illusionne sur le soutien. En réalité, la CDU ne peut pas lui garantir son soutien sans faire peser une menace sur les relations entre l'Allemagne et la Russie, jusque là tout à fait positives. Ce n'est pas un hasard si, pendant la crise actuelle, la chancelière Merkel est beaucoup plus prudente que son ancien ministre des Affaires étrangères.

La Pologne mue par ses phobies anti-russes ataviques s'évertue constamment à pousser Bruxelles à s'ingérer dans les affaires intérieures des pays de l'ex-URSS. La Pologne, redoutant toujours « l'ours russe » et encouragée évidemment par des hommes politiques américains qui n'oublient toujours pas la guerre froide, tente de manipuler l'Europe en tant que levier, sans réfléchir aux aboutissements de son comportement pathologique.

Cependant c'est Kiev qui commet les erreurs les plus graves et négatives du point de vue de leurs retombées. Il paraît que M. Ianoukovitch n'a jamais eu des intentions authentiques d'adhérer à l'Union européenne, se rendant parfaitement compte des conséquences politiques, économiques et sociales de l'adhésion pour son pays en retard. L'économie de l'Ukraine est si faible que la levée des barrières douanières, même graduelle et partielle, conduira à la faillite de nombreuses entreprises locales. Ceci sans parler des nouveaux droits de douane qui seront obligatoirement introduits sur la frontière avec la Russie qui devra se protéger contre les fournitures européennes via l'Ukraine. En outre, certaines lois imposées par l'UE seront accueillies négativement aussi bien par le parlement que par la majorité de la population ukrainienne. En ce sens, il ne s'agit pas seulement de l'affaire de l'ex-première ministre d'Ukraine Ioulia Timochenko (soit dit en passant, il est souhaitable que certains dirigeants européens révèlent l'information qui leur permet d'affirmer que le verdict de la justice ukrainienne revêt un caractère politique et non pas pénal).

Selon toute vraisemblance, M. Ianoukovitch a entamé les négociations avec Bruxelles dans le but tactique de montrer que l'Ukraine pouvait opter pour une voie alternative (laquelle ne sera pas du goût du Kremlin) si Moscou continuait de durcir son chantage économique.

Enfin, l'erreur de la Russie, en quoi consiste-t-elle ? Après l'idylle qui avait suivi l'élection de Viktor Ianoukovitch, Gazprom s'est mis à exiger une hausse du prix de gaz absolument inacceptable pour le trésor ukrainien affaibli ou le transfert en sa propriété de l'ensemble du réseau ukrainien de distribution de gaz.

Dans ce contexte, Ianoukovitch a essayé de jouer toutes ses cartes. Il a déclenché par là un processus qui avait plongé dans le chaos lui-même et son gouvernement. L'erreur de la Russie consiste à avoir tenté outre mesure de prendre l'Ukraine à la gorge. Elle aurait pu user de la « force douce ». Cela aurait créé moins de problèmes et aurait assuré une efficacité plus grande et plus durable des relations bilatérales.   N

 

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