Le président tchèque Milos Zeman pro-Poutine ?

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Les Tchèques viennent de célébrer solennellement le 70e anniversaire de leur président, Milos Zeman.

Son nom apparaît de plus en plus souvent dans les nouvelles des agences d'information russes et étrangères. La revue EUROMAG l'a même nommé «la Personne de la semaine» pour sa proposition à la communauté mondiale de reconnaitre le fait que la Crimée était devenue une partie de la Russie. Et en plus, le leader tchèque a soutenu l'idée de la fédéralisation de l'Ukraine, a critiqué les actions des pouvoirs de Kiev, s'est violemment produit contre le régime des sanctions occidentales à l’égard de la Russie. À Moscou, on se rappelle que pendant la guerre en Ossétie du Sud, Milos Zeman n'a pas soutenu la Géorgie, s’est prononcé contre le déploiement dans le pays d'éléments du bouclier antimissile américain. Il était un des rares chefs d'État européens à avoir honoré de sa présence les JO à Sotchi.

Naturellement, le président de la République Tchèque est critiqué par ses adversaires politiques. Assez souvent, on le traite de politique pro-Poutine. Et comment apprécie-t-on Milos Zeman à Moscou ? L’historien slaviste, le professeur de l'Université russe des sciences humaines Vadim Troukhatchev répond à cette question :

« Non, on ne peut pas dire que Milos Zeman soit un politique d’orientation pro-russe. En effet, à côté de ses propos sur l'appartenance de la Crimée, il a critiqué assez durement la Russie à cause du Donbass. Et il a mis un temps considérable à se décider de désapprouver les sanctions, tout comme ses prédécesseurs au poste de chef d’Etat. Zeman accorde beaucoup d'attention au respect du droit international. C'est pourquoi il refuse catégoriquement de reconnaître l'indépendance du Kosovo. Et quand on parle de la Crimée, il indique que le processus du recoupage des frontières était lancé non par la Russie, mais par l’Occident, qui avait reconnu l’indépendance du Kosovo. Bref, Milos Zeman est un politique pragmatique qui a tout simplement rejeté les clichés occidentaux sur notre pays. Il tente de regarder les événements sans lunettes roses ou noires. Une telle position du président tchèque semble prorusse sur fond des critiques virulentes des autres politiques européens. »

LVDLR : Parmi les présidents tchèques, des personnalités importantes et toujours non ordinaires, quelle place Milos Zeman occupe-t-il ?

Vadim Troukhatchev : « C’est, bien sûr, une personnalité hors du commun. Il aime les plaisanteries, se permet parfois de gros mots. Il s’est exprimé en ces termes sur l’islam, les nouveaux chefs ukrainiens, et avant cela, sur les Allemands des Sudètes. Mais pour ce qui est de la politique réelle, il pèse toujours ses paroles. L'épate verbale ne l’empêche pas de construire de bonnes relations même avec l'Allemagne et l'Autriche, par exemple. La voix de Milos Zeman, comme, avant lui, celle de Vaclav Havel, Vaclav Klaus, est entendue loin en dehors de la République Tchèque. Quand le chef d’un État avec une population de 10 millions de personnes se comporte aussi indépendamment, en tentant de jouer un rôle particulier dans l'arène internationale, sans aucun doute, nous avons affaire à un politique unique.

LVDLR : Mais Milos Zeman n’a pas toujours manifesté une position à part. Après avoir obtenu le mandat présidentiel, il a fait ce que refusait de faire son prédécesseur, l'eurosceptique Vaclav Klaus. À savoir, il a hissé le drapeau de l’UE à Prague, puis, il a signé l'accord sur la création du fonds de stabilisation de l'Union européenne. Il était initialement orienté vers Bruxelles. Probablement, avec le temps, quelque chose change dans sa vision sur la grande famille européenne. La presse communique qu'il a invité Vaclav Klaus à la célébration de son 70e anniversaire... Glisse-t-il vers l'euroscepticisme ?

Vadim Troukhatchev : Je ne le crois pas. Zeman a toujours été un partisan de l'intégration européenne, mais il ne soutiendra pas a priori toutes les initiatives de Bruxelles.

LVDLR : Pour la Russie, vu la situation actuelle compliquée, le président Zeman est-il un partenaire avec lequel on peut communiquer?

Vadim Troukhatchev : Absolument, c'est un partenaire avec lequel on peut et on doit mener un dialogue. Chez nous, on sous-estime souvent la signification des pays plus petits que l'Italie. Cependant, ils peuvent parfois dire un mot décisif, particulièrement lorsqu’ils assurent la présidence de l'Union européenne. Je trouve que la Russie devrait accorder une attention plus grande à la République Tchèque, pays industriellement développé qui essaie de mener une politique indépendante sur la scène européenne. Et il ne faut pas oublier qu'aujourd'hui, elle est présidée par un homme qui a déclaré : «Il faut percevoir la Russie, comme le pays de Dostoïevski, de Tourgueniev, de Soljenitsyne, de Tchaïkovski et de Repine. Je la vois parmi les grandes puissances du monde. »

Bon anniversaire et meilleurs souhaits, monsieur le président ! /N

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