Covid-19: Pénurie de masques? Au Togo, la solution est toute trouvée…

© Sputnik . Alphonse LogoLes masques de protection du styliste Saint-Addy, au Togo.
Les masques de protection du styliste Saint-Addy, au Togo. - Sputnik Afrique
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Pénurie de masques de protection ou prix dépassant les bourses des plus démunis? Pour y remédier, stylistes et couturiers du Togo font appel à leur imagination, distribuant ou mettant sur le marché des masques en tissus colorés, lavables et réutilisables. Prisés par la population, leur efficacité est, toutefois, mise en doute…

Ce sont des «cache-nez», comme on les appelle à Lomé, qui se fondent bien dans le paysage local. En arpentant la capitale togolaise, du boulevard du 13-janvier au marché des Féticheurs en passant par Dékon ou la cathédrale du Sacré-Cœur, il n’est pas rare de croiser quelque marchand, conducteur de taxi-moto ou même un piéton le visage à moitié couvert par une toile bariolée ou de couleur unie.

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Pagne wax, woodin, ou Hitarget, les cache-nez «made in Togo» ont le vent en poupe depuis le courant du mois de mars, après l’enregistrement du premier cas de coronavirus. Da Avélé, une vendeuse de tomates fraîches rencontrée au Grand marché de Lomé, explique à Sputnik son engouement pour ces masques locaux.

«Je les trouve géniaux ces cache-nez! Mes enfants m’en ont acheté trois de différentes couleurs. Je peux les laver chaque soir pour les porter à nouveau le lendemain. Et voilà, comme vous me voyez, je suis aussi protégée contre cette vilaine maladie. Si je ne le mets pas, mes enfants ne me laissent pas sortir pour venir au marché», explique-t-elle.

Depuis que le Covid-19 a commencé son expansion rapide dans la capitale togolaise, les gestes barrières se multiplient. Première précaution pour se protéger et freiner la contagion, le port des masques est encouragé du reste par les autorités togolaises. 

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Sauf que, par un jeu de l’offre et de la demande, les masques dits chirurgicaux ont disparu des pharmacies. Et pour le reliquat, le prix a quintuplé depuis début mars, atteignant parfois 1.200 francs CFA, (1,80 euro). Une protection très chèrement payée pour les 53,5% de la population dans ce pays vivant toujours sous le seuil de pauvreté. D’autant qu’ils doivent être changés régulièrement, constate amèrement Saint-Addy, styliste togolais qui fait partie des promoteurs des masques «made in Togo».

«Il y a un manque de cache-nez et les gens trouvent que c’est cher! La plupart n’ont pas les moyens. Là, beaucoup ont apprécié l’initiative, surtout qu’on peut les laver et les réutiliser», se félicite Saint-Addy.

Il y a une douzaine d’années, ce jeune Togolais a créé sa propre marque de vêtements «street wear» et «street look». Aujourd’hui il veut, dit-il, contribuer à la lutte contre le Covid-19 avec ses propres armes, et ce qu’il sait faire. Après en avoir distribué quelques centaines, gratuitement, fin mars, il a lancé un appel aux soutiens financiers pour répondre à la demande de masques, de plus en plus forte, et continuer ainsi à apporter son aide aux plus vulnérables.

«Un masque me coûte à la production 150 francs CFA (20 cents d’euro). Si une bonne volonté nous appuie financièrement, nous serons en mesure de faire en un temps record des milliers de masques pour satisfaire ceux qui en ont le plus besoin!», affirme Saint-Addy.
© Sputnik . Alphonse LogoLe jeune styliste Saint-Addy présentant un de ses masques dans sa boutique à Lomé.
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Le jeune styliste Saint-Addy présentant un de ses masques dans sa boutique à Lomé.

Mais le styliste togolais n’est pas le seul à s’être lancé dans la production de ces masques, disponibles, du reste, à tous les coins de rue entre 200 et 300 francs CFA (entre 30 45 cents d’euro), un prix abordable.

Distribution gratuite

D’autres créateurs et organisations de la société civile cherchent plutôt des moyens pour les mettre gratuitement à la disposition des plus vulnérables afin de leur éviter de contracter le virus.

Amenuvé Eusébio, sage-femme, est de ceux-là. Présidente d’une association de promotion et d’émancipation de la femme togolaise, elle se fait aider par une couturière pour produire des masques, qu’elle va distribuer gratuitement.

«Nous organisons des campagnes de sensibilisation pour dire à tout le monde, les femmes spécialement, qu’à défaut d’avoir des masques disponibles dans les pharmacies, il faut se rabattre sur ceux-ci. Et nous donnons l’exemple en confectionnant des masques que nous offrons aux femmes», a détaillé Amenuvé Eusébio au micro de Sputnik

Ces masques ne protègent pas totalement

Aussi bien Amenuvé que Saint-Addy conviennent, toutefois, que ces masques ne sont qu’un pis-aller. Ils protègent a minima contre la contagion mais «ne sont pas conformes aux normes», avoue même le second. Un constat que rejoignent les experts de la santé.

«On porte les masques pour empêcher que le virus ne tombe sur les lèvres ou le nez, qui sont ses voies d’accès à l’organisme humain. Or, les trous des tissus qui sont utilisés sont assez larges pour laisser passer le virus facilement. Donc oui, on se protège en portant ces masques non homologués. Mais on peut encore se faire facilement infecter», explique à Sputnik le professeur Mireille David, bactério-virologue et enseignante-chercheure à l’université de Lomé.

Trouver la meilleure solution pour une protection efficace des Togolais

Toutefois, l’Ordre national des pharmaciens semble déterminer à remettre de l’ordre dans les officines pour que les Togolais retrouvent des masques sécurisés, à prix raisonnables.

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«L’augmentation incompréhensible du prix des masques s’explique par le fait qu’au départ, c’était un produit qui n’était pas vendu dans les pharmacies, mais directement aux hôpitaux et uniquement à l’usage des médecins. Face à la demande grandissante, les fournisseurs ont affiché leurs prix et les pharmacies étaient obligées de s’y aligner. Mais nous allons régler tout cela bientôt», a rassuré Dr Innocent Kpéto, président de l’Ordre national des pharmaciens du Togo au micro de Sputnik.

L’Ordre des pharmaciens assure que tout est mis en œuvre pour que la livraison des masques dans les pharmacies du Togo suive désormais le circuit normal pour n’être vendus qu’au prix homologué et en faciliter l’accès aux Togolais en ce moment de crise sanitaire. Au 9 avril 2020, le pays a enregistré 70 cas de Coronavirus, dont trois décès.

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