Les jihadistes, ennemis de la culture musulmane

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Dans la nuit de lundi à mardi, le 29 janvier, les militaires français et maliens ont pris entièrement sous leur contrôle la ville de Tombouctou, occupée jusque là par les jihadistes.

Dans la nuit de lundi à mardi, le 29 janvier, les militaires français et maliens ont pris entièrement sous leur contrôle la ville de Tombouctou, occupée jusque là par les jihadistes. En quittant la ville ils ont fait des dégâts, notamment, ont mis le feu à la bibliothèque de l’Institut Ahmed Baba, où étaient conservés de vieux manuscrits en arabe. Ce fait a été confirmé aussi par Mohamed Ibrahim CISSÉprésident du Conseil régional de Tombouctou lors d’un duplex à la chaîne de télévision France-24. Dans quelques jours Mohammed Cissé doit retourner à Tombouctou de Bamako, où il résidait durant tout le temps que la ville était sous le pouvoir des islamistes radicau.

Cet Institut, construit il y a seulement quelques années, abritait, d’après les données du ministère de la Culture du Mali, de 60 000 à 100 000 manuscrits, dont beaucoup dataient du 12 siècle. A présent, après la libération de la ville, on aura à établir combien d’entre eux n’ont pas été détruits par les flammes. « C’est un véritable crime contre la culture », constate avec amertume Mohammed Cissé…

Dans ma phonothèque, écrit notre correspondant Igor Yazon, il y a un enregistrement fait sur le lieu de l’un de tels crimes, commis par les fanatiques du groupe Ansar Dine, aussitôt après l’entrée des islamistes à Tombouctou en juin de l’année dernière…

A travers des rafales de vent on perçoit nettement comment à coups de barres de fer, de pics et de haches les jihadistes barbus du groupe Ansar Dine abattent les murs en argile d’un nouveau sépulcre…Au fil des siècles l’argile est devenu dure comme la pierre, et pour la morceler il faut de grands efforts… Et pourtant en quelques minutes un nouveau éclat du mur tombe, en soulevant des nuages de poussière aux cris de rares spectateurs…Encore un monument, témoignage d’un passé lointain, est ainsi détruit…

Ayant occupé Tombouctou, ville des « 333 saints musulmans », les extrémistes d’Ansar Dine avec ceux d’Al-Qaïda au Maghreb islamique et du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest se sont acharnés à détruire tout ce qui à leur idée ne correspondait pas aux canons du salafisme qu’ils confessaient – tombeaux anciens, cimetières, manuscrits, statuettes de bois. La première de leurs victimes a été l’un des 16 mausolées de la ville – celui du saint musulman Sidi Mahmoud Ben Amara, le plus vénéré par les habitants locaux. Les jihadistes ont enlevé les portes du mausolée, ont arraché la toile blanche qui recouvrait la tombe du saint, puis ont brûlait tout cela sous les yeux horrifiés des croyants, réunis devant le mausolée pour la prière du soir. Le même sort a été réservé aux mausolées d’Alpha Moya et de Sidi Moctar dans d’autres quartiers de la ville. Il est vrai que les jihadistes n’ont pas eu le courage de détruire les trois principales mosquées de Tombouctou, d’une grande valeur historique et architecturale.

Fondée par les Touaregs à environ l’an 1100, Tombouctou, appelée encore « perle du désert », devient déjà à partir du 16 siècle le centre politique et spirituel de toute la région du Sahel et du Sahara. A part les monuments d’architecture moyenâgeuse, le principal patrimoine de la ville est constitué par plus de 100 000 manuscrits. En 1988 Tombouctou est porté par l’UNESCO sur la liste du Patrimoine mondial, tandis que la cité elle-même est devenue lieu de pèlerinage des croyants musulmans, le plus visité par les touristes étrangers. S’étant emparé de Tombouctou, les islamistes radicaux ont interdit aux pèlerins de venir dans la ville. Le flot des touristes s’est également tari.

Il est significatif que les jihadistes se sont acharnés contre les monuments de Tombouctou aussitôt après l’ouverture le 28 juin à Saint-Pétersbourg russe de la 36e session du Comité du Patrimoine Mondial de l’UNESCO. La session a satisfait la demande de Bamako de porter Tombouctou sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité en péril. Autrement dit, les actions des islamistes peuvent parfaitement être qualifiées de défi flagrant lancé à la communauté internationale. La Gambienne Fatou Bensouda, procureur de la Cour pénale internationale a qualifié de « crime de guerre » l’anéantissement par les jihadistes des lieux saints de Tombouctou.

Depuis le 16 janvier Fatou Bensouda, procureur de la Cour pénale internationale, se trouve à Bamako, où elle a déjà commencé, entre autres choses, à collecter des témoignages sur les crimes des jihadistes contre les valeurs culturelles du Mali.

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