Fanny Ardant : « Vivre sans regret, sans amertume, sans peur »

Fanny Ardant : « Vivre sans regret, sans amertume, sans peur »
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On a vu en ce mois de mai la pluie d'étoiles filantes… Etoiles du cinéma… et non seulement à Cannes. En Russie on a eu la chance d’accueillir une de ces vedettes. Vêtue de noir, très élégante, sourire charmant, voix grave feutrée. Vous avez deviné – il s’agit d’une mystérieuse et adorable Fanny Ardant.

L’actrice dévoile à Moscou deux surprises : le film Cadences obstinées dont elle est réalisatrice et son mono-spectacle Navire de nuit où Fanny se produit aussi comme comédienne. Mais on n’est pas au bout de surprises : lors d’une conférence de presse on découvre également une Fanny philosophe et poète.

Amoureuse de l’art russe, Fanny visite la Russie depuis 1984. Rappelons par ailleurs que dans le film franco-russe Raspoutine elle interprète le rôle d’Alexandra Fedorovna, épouse du dernier empereur russe Nicolas II. Au cours de la conférence de presse l’actrice s’est souvenue de sa première visite en Russie, ou plutôt en Union soviétique. Elle a raconté son amour du pays d’éminents artistes, la Russie, et parlé de ses sensations qu’elle y éprouve.

Fanny Ardant. « Je me souviens, j’étais à l’hôtel Rossiya. Il y avait un rituel, un code qu’il fallait respecter quand on arrivait de l’Occident. Tout était mystérieux. Mais je me souviens d’avoir été au Goum (« Magasin principal universel »). J’ai entendu un homme qui se mettait très en colère. J’ai demandé pourquoi. Il disait qu’il cherchait une brosse à dents et on lui vendait un soutien-gorge. Il y avait très peu de voitures. Les rendez-vous avec les journalistes étaient très intenses, toujours à cause de ce code – on parlait chacun d’une autre chose de ce qu’on disait vraiment.

J’ai toujours aimé qu’un film voyage au-delà des frontières nationales. En même temps, quand on pense à un public, qu’il soit français, russe, anglais, italien, on aperçoit que pour les choses essentielles on est tous pareils. J’ai surtout aimé la Russie à travers la poésie, à travers le cinéma, à travers la peinture. Vous savez bien que tous les artistes russes ont parlé au monde entier. Tandis que vous faites un film, une pièce de théâtre, vous pouvez voyager avec, vous êtes libre. Chez les Russes il y a, comme chez les Français, les gentils et les méchants.

Cette fois j’ai traversé Moscou de droite à gauche, de gauche à droite, toujours en voiture. Donc j’ai eu cette impression, quand vous avez le regret de ne pas vous arrêter. Quand vous avez cette sensation que vous pourriez faire partie de cette maison, il y a de lumières allumées sur la façade. Mais l’endroit où je suis allée plusieurs fois, c’est le cimetière. La grande différence entre le cimetière russe et le cimetière français – chez les Russes on s’assoit à côté de la tombe et on peut parler, on peut fumer et ça me plaît beaucoup parce qu’il faut respecter les morts en les aimant et pas en étant silencieux. C’est pour cela que je suis souvent allée à la tombe de Boulgakov. »

LVdlR. Depuis 2009, Fanny Ardant arrive à marier le métier de l’actrice avec celui de réalisatrice. Etre derrière la caméra est une expérience tout à fait particulière, confie l’actrice. Quelle est la différence entre ces deux métiers, quelles sont les sources d’inspiration pour un réalisateur et quelles questions pose Fanny dans son dernier film ? Ecoutons la réponse de Fanny :

F.A. « Je pense que la grande différence est dans la décision. Quand vous êtes actrice, moi Fanny, j’aime rentrer dans l’univers de quelqu’un, j’aime être disponible à tout ce qui n’est pas moi. Mais quand je suis devenue la réalisatrice, en fait, c’était comme si j’étais toute nue. C’était ma décision, mon choix, mon univers, c’était mon regard. Souvent j’ai pensé qu’au cinéma tout avait été filmé, tout avait été dit. Mais ce qui était différent, c’était les détails. Ce que j’ai expérimenté en tant que réalisatrice : on peut se battre comme des fous pour un détail. C’est très difficile de choisir entre deux choses qu’on aime beaucoup. Je pense que tout dans la vie nourrit tout. Comme je fais le cinéma et le théâtre, on me demande souvent si je préfère le théâtre ou le cinéma. Là aussi, l’un nourrit l’autre.

Les sources d’inspiration sont toujours multiples et mystérieuses. J’ai toujours pensé que l’amour était un sujet le plus intéressant de la vie. J’avais envie de raconter une histoire d’amour mais pas le début. Je voulais raconter la fin. Et c’est ça la question à laquelle je n’ai pas de réponse : est-ce que à la fin d’une histoire d’amour on aime plus ? Cette idée de l’abnégation que je voulais mettre est une question : est-ce qu’on peut se sauver du malheur, de l’amertume par l’abnégation, par quelque chose qui nous élève ? »

LVdlR. Et le conseil le plus précieux que Fanny Ardant a donné aux Russes lors de la conférence de presse est de « vivre sans regret, sans amertume, sans peur… ». Et c’est la recette qui marche non seulement pour le cinéma.

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