Le sort incertain du missile balistique Boulava

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Par Ilia Kramnik, RIA Novosti
Par Ilia Kramnik, RIA Novosti

Les problèmes posés par les essais du missile balistique intercontinental Boulava (SS-NX-30, selon la classification occidentale), destiné à la Marine de guerre russe, sont depuis longtemps l'une des principales questions débattues par les militaires. Les échecs du lancement de ce missile mettent en cause le rééquipement des forces navales stratégiques russes, qui ont instamment besoin de remplacer les navires lance-engins obsolètes et les missiles datant de l'époque soviétique.

L'URSS a laissé en héritage à la Fédération de Russie deux orientations de développement des croiseurs sous-marins stratégiques. La première est incarnée par le projet 667 (ce sont, à ce jour, six sous-marins lance-engins 667BDRM, construits à la fin des années 80 et au début des années 90, et cinq sous-marins 667BDR, plus anciens). La seconde orientation est incarnée par le projet 941, conçu en réponse à l'apparition aux Etats-Unis des SNLE de classe Ohio.

Cependant, en raison du retard objectif pris sur les Etats-Unis dans le développement de missiles à propergol solide de stationnement maritime, le missile soviétique était bien plus lourd : sa masse était de 90 tonnes, contre 32 tonnes pour le Trident-1 et 58,5 tonnes pour le Trident-2. Leurs dimensions étaient également différentes : le R-39 avait une longueur de 16 m et un diamètre de 2,4 m, alors que le Trident-2 était long de 13,4 m et large de 2,11 m, le Trident-1, d'une taille moindre, faisant 10,3 m de long et 1,8 m de large.

Cette différence de gabarit des missiles a conditionné celle des sous-marins lanceurs d'engins. Alors que l'Ohio jauge 24 000 tonnes, les sous-marins lance-engins du projet 941 avoisinent les 50 000 tonnes, surpassant, par cet indice, la plupart des bâtiments de ligne et des porte-avions.

L'exploitation des sous-marins de cette classe, leur entretien et le maintien de leur capacité de combat constituaient un lourd fardeau pour le budget de la Marine de guerre. Les échecs de quelques tirs du missile Bark, pourtant prometteur, qui devait remplacer le R-39 dans les tubes des Typhoons (nom donné, selon la classification occidentale, au plus gros sous-marin soviétique lance-engins) ont conduit à la décision de concevoir le missile Boulava, plus léger. Ce nouveau missile est destiné aux SNLE du projet 955, de taille moindre que ceux du projet 941.

Le missile Boulava a été conçu à l'Institut de technologie thermique de Moscou (MIT), organisation spécialisée dans les missiles à combustible solide : c'est là qu'ont été créés les missiles Topol et Topol-M (SS-27). Seuls deux tirs d'essai du Boulava sur neuf ont été réussis.

Les défectuosités de production du missile sont considérées comme la cause la plus probable des échecs. Plusieurs centaines de pièces produites dans de nombreuses entreprises industrielles sont utilisées lors de l'assemblage du missile, alors que l'état actuel de l'industrie russe laisse à désirer.

Mais le Boulava pourrait être remplacé par le missile modernisé Sineva (R29-R29RMU) conçu au bureau d'études Makeïev.

Dans ce contexte, une solution possible est de moderniser le premier sous-marin lanceur d'engins du projet 955 mis à l'eau et de reconstruire ses sisterships encore en construction pour les équiper de missiles balistiques Sineva, dont le diamètre permet de les lancer depuis des tubes conçus pour le Boulava. Cependant, le missile Sineva est un peu plus long, mais ce n'est pas un obstacle insurmontable.

Un autre obstacle pourrait être la technologie de lancement de missiles. Selon certaines sources, le bureau d'études Makeïev a développé une version du missile Sineva qui utilise la technologie de lancement depuis un tube à sec.

Si cette version est testée prochainement, le premier sous-marin lance-engins du projet 955 armé de missiles Sineva pourrait entrer en service en 2010. Un autre avantage de ce missile: la fabrication en série du Sineva pourrait être lancée rapidement, sans retarder la mise en service des nouveaux sous-marins lance-engins, ce qui permettrait de remplacer à temps les croiseurs sous-marins du projet 667BDR.

La décision qui sera prise en fin de compte sera connue bientôt. Mais le moindre nouvel échec de tir du Boulava pourrait condamner son avenir.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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