Fin de l’argent liquide, l’alibi du terrorisme

© Flickr / petyka72L’argent liquide
L’argent liquide - Sputnik Afrique
S'abonner
Mettons tout de suite les choses au point. Il n’est nullement question ici de valoriser les actes barbares de quelques décérébrés du mou de veau ou autres atrophiés du bulbe rachidien. Mais nous ne pouvons que constater que pour chaque acte de terrorisme commis au cœur d’un pays occidental, de nouvelles lois liberticides apparaissent.

Ceci est un constat généralisé. De l'ultra surveillance vidéo au Royaume Uni après les attentats de juillet 2005, au Patriot Act Américain après le 9/11 en passant par les toutes nouvelles lois sur le renseignement Français, le terrorisme est à chaque fois l'alibi mis en avant par nos édiles et sensé justifier ce déni de libertés individuelles et de démocratie.

Alors bien sûr, après de nombreuses questions posées sur le financement du terrorisme, on en vient naturellement à contrôler les circuits monétaires. Et, de façon à être sûr qu'un particulier ne se serve pas de ses liquidités pour aider un terroriste à se payer une formation qualifiante de jihadiste en Syrie, quoi de mieux que de supprimer carrément l'argent liquide? Après tout, pourquoi pas? D'autant que le principe est plaisant en première lecture; gain de temps, économie de papier, sécurité…

Les avantages du tout numérique

Et puis, c'est sans compter sur les autres avantages collatéraux. En dématérialisant la monnaie, on tue dans l'œuf toute velléité de vols à l'arrachée ou même de cambriolage, puisque le matériel volé ne pourrait s'échanger contre du cash. Mieux, les trafics en tous genres se trouveraient fortement contrariés, de même que le travail au noir. Ainsi toute l'économie parallèle pourrait se trouver démantelée par le simple contrôle numérique de l'argent. Bienvenue dans le monde merveilleux et aseptisé du tout numérique.

Sauf qu'à cette présentation idyllique d'un monde sans argent papier, nous pouvons opposer quelques arguments de poids. Nombreux sont les « économistes » ou autres « experts » qui nous présentent la chose comme une opportunité de pouvoir enfin faire face à la fraude fiscale. Or, la récente affaire des papiers de Panama nous a bien démontré qu'il était tout aussi simple de détourner de l'argent de son Fisc adoré de manière numérique, et que ce n'est en aucun cas un afflux incontrôlé d'argent liquide qui aurait pu permettre cette évasion massive, qui, soit dit en passant n'est qu'une infime partie émergée d'un colossal iceberg, au milieu de centaines d'autres icebergs.

Contre-vérités et arguments bidon

Donc, et pour en revenir au terrorisme, rien n'empêcherait un quelconque financement participatif, visant à la création d'un centre de vacances « religion et archéologie » de voir le jour à Palmyre. Et pourtant, il ne s'agit que d'argent numérique. D'ailleurs, et pour être un peu plus sérieux sur cette question, une récente étude du CAT (Centre d'analyse du terrorisme), think tank Européen créé en 2014, montre que Daesh est propriétaire de plus de 2 200 milliards de Dollars de richesses, réparties entre le commerce de coton, la vente de pétrole brut, la drogue, la traite des femmes et des enfants, et… 130 banques de dépôt. On peut penser légitimement que les entités commerçant avec l'Etat Islamique ne règlent pas tout en liquide. A ces hauteurs, ça ferait un beau convoi de mallettes, non?

En somme, l'entité terroriste internationale se finance (au moins en partie) grâce à de l'argent numérique. Affirmer que la dématérialisation de la monnaie puisse contrer l'évasion fiscale et le terrorisme, c'est donc, au pire, avoir une vision extrêmement naïve du monde, au mieux, prendre les gens pour des cons.

Une autre preuve démontrant que le but final de la dématérialisation n'est pas de contrer Daesh et consorts, c'est qu'un pays comme la Suède s'y exerce depuis plusieurs années déjà. A Stockholm, près de 80 % des transactions se font numériquement. Il est même devenu impossible d'acheter un ticket de bus avec du liquide. Autrement dit, sans smartphone à Stockholm, vous ne pouvez rien acheter. Si le système connaît, heureusement, quelques détracteurs, il marche fort. La Suède sert, en quelques sortes, de laboratoire pour toute l'Union Européenne. Et alors direz-vous, en quoi cela démontre qu'il n'existe aucun lien réel entre volonté de contrer le terrorisme et dématérialisation de la monnaie? C'est assez simple. Il n'y a pas eu d'attentats terroristes en Suède depuis une prise d'otage de la fraction armée rouge à l'ambassade d'Allemagne de Stockholm en 1975! Ce n'est donc pas la lutte contre le terrorisme qui est la source de motivation de la dématérialisation de l'argent.

Le danger de la disparition de l'argent liquide

En fait, le moteur principal de cette volonté de supprimer définitivement, à terme, l'argent liquide, est plus lié une velléité de contrôle des flux, à une simplification des transits et à une vue permanente sur les circuits de l'argent… De monsieur tout le monde. Le procès des lanceurs d'alerte de l'affaire LuxLeaks nous démontre une fois de plus, si besoin était, que les gros poissons ne seront pas inquiété. D'ailleurs, M. Juncker, grand artisan de l'optimisation fiscale à la mode Luxembourgeoise n'est il pas le président de notre chère Europe?

Le but est donc de savoir comment notre argent circule, et de vérifier, le cas échéant, que nous payions bien nos impôts et diverses taxes. Mais il existe un danger plus menaçant encore: les taux négatifs. Si d'aucuns considèrent ces taux comme une bonne nouvelle et les attendent avec impatience, il serait bon qu'ils se rappellent que ces taux ne s'appliquent pas que lors d'un prêt immobilier. Ces taux s'appliquent également sur les dépôts et les placements. Autrement dit, en cas de taux négatif de 1%, attendez-vous à voir votre banque vous ponctionner vos avoirs de 1%, y compris sur votre compte courant. Tant qu'il reste de la monnaie liquide, nous avons toujours la possibilité de thésauriser sous notre matelas. Mais en cas de monnaie exclusivement numérique, nous n'aurons pas le choix que de payer, encore et toujours…

Et les « experts » du Capital se réjouissent de l'arrivée des taux négatifs, arguant ainsi que les établissements bancaires pourront se refinancer à moindre frais, et en faire profiter l'économie réelle, pour une nouvelle croissance chimérique. Il semble que ces mêmes « experts » qui vantaient les mérites des QE (Quantitative Easing ou assouplissements quantitatifs, ou encore politique de la planche à billets) dans la relance de l'économie réelle n'aient pas remarqué que la majeure partie de cette injection d'argent frais a surtout fait le bonheur des marchés, bien plus que des prêts aux entreprises. Et pour ceux qui douteraient de cette affirmation, nous les invitons à interroger la population Américaine après 3 QE ou encore la population Japonaise, où on ne les compte même plus pour des résultats que l'on ne peut pas qualifier de convaincants.

Pour finir, nous rappellerons que la BCE a décidé de retirer les billets de 500 € v de la circulation, estimant sans doute que posséder une telle somme d'argent sur un seul bout de papier était « suspect » et pouvait servir aux terroristes… A moins qu'il ne s'agisse plutôt de préparer l'arrivée des taux négatifs…

 

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала