Campagne fédérale au Canada: IVG et mariage gay, les Libéraux ressortent les vieux dossiers

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Bébé - Sputnik Afrique
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Contre toute attente, l’avortement et le mariage gay sont revenus au centre du débat au Canada. L’IVG pourrait même devenir un thème important de la prochaine campagne fédérale. Pour discréditer le Parti conservateur, les Libéraux de Trudeau le présentent comme une formation réactionnaire. À raison? L’analyse de Sputnik.

Rarement l’avortement n’a autant retenu l’attention au Canada, un pays où cette pratique a été décriminalisée en 1988. Depuis 1969, les Canadiennes peuvent avoir recours à l’IVG sous certaines conditions.

«Andrew Scheer [le chef du Parti conservateur, ndlr] a toujours été très clair: un gouvernement conservateur ne va pas rouvrir ce débat et ne réintroduira pas de projet de loi à ce sujet», indiquait récemment le député Alain Rayes, bras droit de sa formation au Québec.

Une déclaration en réponse aux accusations des Libéraux, selon lesquels Andrew Scheer entretient le flou sur l’avortement, surtout au Québec, une province plus favorable à cette pratique que le reste du Canada. Histoire de rester dans les thèmes sociétaux, les Libéraux ont aussi ressorti une vidéo dans laquelle M. Scheer dit s’opposer au mariage gay.

​Pour prendre l’avance dans les intentions de vote, les Libéraux attaquent les Conservateurs sur leur flanc religieux et sociétal, souhaitant ainsi cultiver leur image d’un parti tourné vers le passé. «Choisir d’avancer» –le slogan de campagne du Parti libéral– incarne d’ailleurs cette volonté d’apparaître comme le parti du progrès, celui des droits des femmes et de la diversité sexuelle.

​Ce qui est vu comme un manque de transparence de la part du chef conservateur sur l’avortement pourrait profiter aux autres partis au Québec, une province qui représente environ le quart des sièges au parlement fédéral. Du fait de sa population, les partis qui aspirent au pouvoir ne peuvent donc pas se permettre de négliger la Belle Province. Selon une étude réalisée l’an dernier par l’institut de sondage Léger, 86% des Québécois estiment que l’avortement devrait être légal partout dans le monde, alors que la moyenne canadienne est de 71%. Dans les provinces de l’Est, 53% des répondants seulement estiment que l’IVG doit être légale.

Le Québec plus opposé à rouvrir le débat

Au Québec, de récents sondages montrent que le parti de Scheer a reculé de quelques points dans les intentions de vote en raison de cette nouvelle controverse. Pour recoller les pots cassés, les Conservateurs ont martelé qu’ils ne comptaient pas rouvrir le débat sur l’avortement. Des candidates vedettes sont intervenues dans les médias pour rappeler la position officielle de leur chef, qui paraît toujours assez ambivalente. C’est notamment le cas de la médaillée olympique Sylvie Fréchette, dont la candidature était très attendue.

​Signe de la distance qui sépare le Québec du Canada anglais, les Conservateurs sont accusés de tenir deux discours différents sur la question –l’un en anglais et l’autre en français. Les Conservateurs ne comptent pas rouvrir le débat, mais ne souhaitent pas pour autant interdire à leurs députés de se prononcer contre l’avortement. Par le passé, des députés conservateurs ont déposé des projets de loi de leur propre initiative, dans lesquels ils exprimaient leur désaccord avec l’IVG. Un dernier point sur lequel évitent à tout prix de revenir les Conservateurs au Québec.

​Pourtant, les Libéraux n’ont pas toujours été unanimement favorables au mariage homosexuel et à l’avortement. Le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, a voté en 1999 en faveur du maintien du mariage traditionnel. Une vérité qui ne l’a pas empêché de retweeter lui-même la fameuse vidéo du discours d’Andrew Scheer.

De même, le Premier ministre Trudeau a déjà émis d’importantes réserves en ce qui concerne le recours à l’avortement. Dans une entrevue accordée à la presse canadienne en 2011, il affirmait qu’il était «très opposé» à cette pratique:

«J’ai été élevé en bon catholique, j’allais à l’église toutes les semaines avec mes parents et on priait en famille tous les soirs. Ma foi fait partie intégrante de qui je suis et se situe au cœur des valeurs qui guident mes actions. […] Personnellement, je suis très opposé à l’avortement, mais je crois que personne ne peut dire à une femme que faire avec son corps», déclarait alors Justin Trudeau.

Ce rebondissement survient dans un contexte où des observateurs décrient l’influence de la mouvance évangélique au Canada. Également très présent aux États-Unis, ce courant chrétien protestant chercherait de plus en plus à être représenté au sein des partis politiques. C’est du moins ce que suggèrent quelques articles et reportages parus ces dernières semaines. Le chef du Parti populaire du Canada, Maxime Bernier, est aussi accusé de donner une voix aux groupes chrétiens opposés à l’IVG et au mariage gay.

Pour des Libéraux au coude à coude dans les sondages avec leurs adversaires Conservateurs, ces polémiques pourraient s’apparenter aux vieilles marmites dans lesquelles ils ont fait les meilleures soupes électorales.

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