Crimée : les échos de la Tauride antique

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On appelle la Crimée le « microcosme eurasien ». Comme partie de l'Eurasie russe, cette péninsule de la mer Noire peut raconter beaucoup sur l'histoire de dizaines de peuples depuis l'époque préhistorique. La Crimée n'a jamais été vide : elle a toujours attiré tous ceux qui depuis les temps immémoriaux frayaient les voies de l'Europe en Asie et de l'Asie en Europe. La péninsule criméenne est aussi un lieu favori des archéologues.

Les fouilles y ont débuté dans les années 1820 et sont menées depuis près de deux siècles. Les couches culturelles du sol criméen permettent d'étudier l'histoire de l'humanité antique et ce n'est pas une exagération. Un des ce qu'on appelle peuples archéologiques a donné le premier nom à la péninsule : la Tauride ou la Taurique. « Les Taures c'est ainsi que s'appelaient les tribus peuplant le territoire de la péninsule de Crimée au début du premier millénaire av. J.-C. », raconte à La Voix de la Russie le chef de la section archéologique du Musée historique de Moscou Kirill Firsov :

« Les traces de cette culture sont parsemées sur l'ensemble du territoire de la Crimée contemporaine. Si nous étudions les monuments des villages post-scythes, les couches inférieures sont toujours liées aux Taures et là-bas nous trouvons des fosses remplies de vestiges de leur activité : céramique moulée, os d'animaux et de poissons, etc. ».

La Tauride était une plaque tournante sur la route toujours animée par laquelle se déplaçaient des peuples entiers. Les uns venaient de l'Europe en descendant le Danube vers la mer Noire pour se diriger à l'Est en longeant les contreforts d'abord de Crimée, puis du Caucase. Les autres arrivaient de l'Asie centrale : ils franchissaient les steppes, puis le Caucase et l'Asie de l'Ouest pour traverser le Bosphore cimmérien (actuel détroit de Kertch) et atteindre les côtes Nord de la mer Noire. C'est ainsi que les Scythes, des tribus nomades parlant une langue iranienne, se sont retrouvés en Crimée. « Ils s'y sont installés pour près de 10 siècles », dit Kirill Firsov.

« La Crimée est un pot dans lequel de nombreuses cultures et de nombreux peuples ont « mijoté ». Tous y ont laissé leurs traces. Notamment les Sarmates qui sont un des plus remarquables exemples d'un tel séjour. Ce peuple post-scythique s'y est établi au cours des derniers siècles av. J.-C., il y est resté jusqu'aux premiers siècles de notre ère, laissant un grand nombre de monuments. Avec au premier chef leur capitale, Neapolis Scythe, située sur le territoire de la ville moderne de Simféropol ».

La culture des Scythes est étudiée en premier lieu grâce aux trouvailles dans de nombreuses nécropoles scythes sur le territoire de la Crimée. Ces artefacts relatent comment les mœurs d'un peuple belliqueux s'atténuaient graduellement. Ainsi dans les sépultures les plus anciennes, on ne trouve que des objets d'armement. Mais elles sont devenues tout à fait différentes à l'époque de l'essor de l'Etat scythe, raconte Kirill Firsov :

« On découvre souvent des objets en céramique laquée de couleur rouge, beaucoup d'objets en bronze, y compris émaillés, des ornements de poitrine, des boucles d'oreille et des bracelets en or. Malheureusement ces richesses ont été pillées sans vergogne depuis les années 1990. »

Le territoire de l'Etat des Scythes ne se limitait pas à la seule péninsule et s'étendait sur les terres avoisinantes, la région de Kherson de l'Ukraine actuelle comprise. Il n'était pas mono-ethnique tout comme les autres Etats sur le territoire de la péninsule avant et après lui. C'était une entité multiethnique. Au sein de cet Etat, les traditions des Taures assimilées par les Scythes se sont mélangées avec la culture des Grecs qui avaient fondé en Crimée des centaines de colonies. Les témoignages de cette interpénétration des cultures sont tels qu'ils pourraient choquer la partie puritaine de la société. « Je peut citer en exemple un objet découvert près de Sébastopol lors des fouilles sur le champ funéraire de Belbek-4 », dit Kirill Firsov.

« Nos spécialistes ont découvert un récipient extraordinaire avec une sorte de « Kamasutra antique » : toute sa surface est recouverte de différentes positions érotiques. La découverte a été faite à l'époque soviétique et l'objet ne pouvait pas être exposé. Mais il l'est dans notre dernière exposition : vous pourrez le voir dans la salle numéro 6 du Musée historique de Moscou ».

Les trésors archéologiques de la Crimée sont aujourd'hui exposés dans nombre de musées russes, notamment dans les musées aussi célèbres que l'Ermitage. Ces pièces tout comme les monuments culturels des époques plus récentes témoignent d'une grande diversité civilisationnelle d'une petite péninsule baptisée Crimée. N

 

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