UNION RUSSIE-BIELORUSSIE: LA POLITIQUE CEDE LA PLACE A L'ECONOMIE

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MOSCOU, 20 janvier (par notre commentateur politique, Youri Filippov). Les résultats d'une réunion du Conseil d'Etat supérieur de l'Union Russie-Biélorussie qui s'est déroulée, lundi, à Minsk, paraissent plutôt contradictoire à première vue. En effet, on dirait que les problèmes politiques de l'Union y ont été, une nouvelle fois, remis aux calendes grecques, le délai définitif pour préparer l'Acte constitutionnel de l'Union Russie-Biélorussie n'étant pas cité, cette fois non plus. Par conséquent, on ne sait même toujours pas quand les contours des principes clés de cette nouvelle entité politique seraient désignés, tels qu'ils sont vue par les deux partes. Autrement dit, on ne sait pas encore comment doit être, en principe, cette Union Russie-Biélorussie.

Or, la situation politique, tant en Fédération de Russie qu'en Biélorussie rend sans doute très peu productive toute déclaration à ce sujet. Rendu publique, l'été dernier, la proposition du Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, à la partie biélorusse de penser à faire entrer les régions de la Biélorussie au sein de la Russie, à titre de sujets-membres de la Fédération s'est alors heurtée au refus aussi énergique que catégorique du Président de la Biélorussie, Alexandre Loukachenko. Bien plus, l'opposition biélorusse ne peut toujours pas pardonner à Moscou cette rechute "de grande puissance". Pour le manifester, elle a même a essayé de brûler en public le drapeau national russe en signe de protestations, à la veille de la réunion du Conseil d'Etat supérieur de l'Union Russie-Biélorussie.

D'autre part, à Moscou, les partisans de l'union politique avec la Biélorussie tiennent des propos plus que vagues sur ses perspectives, tout en proposant le plus souvent de prendre pour exemple l'expérience de l'Union européenne (UE). Il n'en est pas moins vrai, cependant, que l'on disait pratiquement la même chose en Russie, dans les années 1990, des perspectives politiques de la Communauté des Etats indépendants (CEI) que nul ne pourrait, évidemment, qualifier de sujet politique, aujourd'hui. Et ce n'est, certes, pas l'effet du hasard si, jusqu'ici, il n'y a eu aucune réunion officielle du groupe de travail en charge de mettre au point l'Acte constitutionnel de l'Union Russie-Biélorussie. Et même à titre informel, ce groupe de travail ne s'est réuni qu'une seule fois, dirait-on, à l'arraché, la semaine dernière, tout juste à l'ouverture de la rencontre à Minsk.

Tout porte à croire que cela a insisté le Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, et le Président de la Biélorussie, Alexandre Loukachenko, à prendre la seule bonne décision possible, et plus précisément d'écarter quelque peu la politique pour s'engager pour de bon dans la solution des problèmes économiques. C'est que dans cette sphère précise, soit dans le domaine économique, il y a davantage de certitude et même de progrès tout à fait évident. En effet, le chiffre d'affaires du commerce entre la Fédération de Russie et la Biélorussie s'est approché de près, l'année dernière, du chiffre record depuis cette dernière décennie, et plus précisément de 10 milliards de dollars. C'est seulement avec l'Allemagne que la Fédération de Russie à un plus large commerce qu'avec la Biélorussie. A signaler que l'Allemagne Fédérale et le partenaire clé de la Fédération de Russie au sein de l'Union européenne (UE). Pour ce qui est de la Biélorussie, la Russie est de loin son plus important partenaire commercial. C'est que 58,1% des échanges commerciaux extérieurs de la Biélorussie reviennent à la Fédération de Russie.

La tâche assigné par le Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, et le Président de la Biélorussie, Alexandre Loukachenko, à leurs gouvernements, à l'issue de leur rencontre à Minsk, est on ne peut plus explicite et se résume comme suit: les cadences actuelles de la coopération économique doivent être maintenues et même accélérées, de sorte que la création de la base économique de l'Union Russie-Biélorussie doit devenir l'un des axes clés du travail des deux gouvernements.

Force est de constater que les critères en la matière sont plutôt élevés. Ainsi, la déclaration, faite par le Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, lors d'une conférence de presse à Minsk sur l'introduction envisagée du rouble russe, à titre d'unique moyens de paiement de l'Union Russie-Biélorussie déjà dès le 1-er janvier 2005 a eu l'effet d'une sensation. Quoi qu'il en soit, cette date avait même été citée auparavant, bien que, ces derniers temps, des propositions se soient fait entendre de plus en plus souvent, et même du côté russe, de la repousser au 1-er janvier 2008. Vladimir Poutine a laissé entendre qu'un tel report et d'autant plus avec des perspectives plutôt vagues ne serait pas du tout souhaitable.

Un autre aspect majeur de la coopération économique, réglé, dirait-on, à Minsk, concerne la gestion du système de transport de gaz de la Biélorussie. Il s'agit, en l'occurrence, de ce gazoduc précis qui transporte le gaz russe vers l'Europe. Il s'agit, en fait, ni plus ni moins, que des privatisation de "Beltransgaz", opération à l'issue de laquelle une partie des actions de cette compagnie doit revenir au géant russe "Gazprom". Le Président de la Biélorussie, Alexandre Loukachenko, a annoncé à cette occasion avoir signé un décret spécial sur la création d'une entreprise conjointe appropriée russo-biélorusse. Toujours est-il qu'une entente à ce sujet avait également été enregistré bien avant, mais les délais, tout comme dans le cas du rouble russe, avaient été reportés à chaque fois. Et voilà que désormais, tel ne serait plus le cas, affirme le Président biélorusse, de sorte que la nouvelle entreprise doit se mettre à fonctionner, comme prévu, déjà dès juillet prochain.

La remise de décorations aux gardes-frontières russes et biélorusses par le Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, et le Président de la Biélorussie, Alexandre Loukachenko, est devenue en quelque sorte le point final du forum à Minsk. Et là encore, on ne s'est sans doute pas passé d'économie. C'est que si l'on considère le problème du point de vue du commerce extérieur, la coopération de frontière entre la Fédération de Russie et la Biélorussie compte énormément non seulement pour la lutte contre les migration clandestines, le trafic de stupéfiants et le terrorisme international dans le sens le plus large du terme. En fait, la frontière de l'Union Russie-Biélorussie est appelé à tracer strictement l'espace douanier unique, car en l'absence d'une telle frontière bien précise, il est, certes, tout à fait inutile de parler d'une intégration économique mutuellement avantageuse ou de l'introduction du rouble à titre de moyens de paiement unique. Par ailleurs, il ne s'agit pas uniquement de la frontière de la Biélorussie avec la Pologne et la Lituanie, pays pratiquement "européens" à 100%.

En outre, la future adhésion de l'Ukraine à l'Organisation mondiale du Commerce (OMC) peut créer elle aussi de gros problèmes pour l'Union Russie-Biélorussie. Si la dite adhésion se fait à des conditions, différentes de celles qui sont proposées à la Fédération de Russie, l'aménagement de la frontière douanière avec l'Ukraine deviendra une tâche première pour l'Union Russie-Biélorussie.

Il est tout à fait évident qu'il convient d'y penser d'avance.

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