Gaz russe : la validité des contrats en cause devant la justice ukrainienne

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Les juristes ukrainiens voudraient résilier les contrats gaziers avec la Russie. Un tribunal de Kiev vient de recevoir une requête contestant la validité des contrats gaziers conclus en 2009 entre Naftogaz et Gazprom. Les demandeurs ne sont d’ailleurs pas des sociétés, ni les autorités ukrainiennes, mais le directeur d’un cabinet juridique juridique ukrainien.

L’Ukraine veut depuis longtemps modifier les conditions désavantageuses, selon elle, des contrats de livraison de gaz russe. Kiev a déjà brandi la menace des poursuites judiciaires et des ruptures dans les livraisons du gaz transitant par son territoire, mais une telle action en justice, c’est du jamais-vu. Les demandeurs estiment que les contrats peuvent être résiliés parce qu’ils n’ont pas le caractère d’un accord interétatique et qu'ils ont été conclus sous l’influence de circonstances, mais aussi parce qu’ils portent atteinte à l’ordre public et constituent une source de préjudice pour les Ukrainiens.

Cette demande n’est qu’une tentative de se faire de la publicité, croit le directeur du secteur énergie de l’Institut russe de l’énergie et des finances Alexeï Gromov.

« C’est un contrat conclu entre deux agents économiques. Il n’a aucun rapport avec des demandes en justice de personnes privées. Du point de vue juridique, les personnes privées ne sont pas fondées à faire ce genre de demandes. C’est comme si les Européens demandaient au juge de Strasbourg de résilier les contrats de long terme conclus avec Gazprom en disant qu’il leur est difficile de payer. L’Ukraine se comporte de façon assez étrange dans sa tentative de régler son litige avec la Russie. Il ne s’agit de rien d’autre que d’un coup de pub. »

L’un des demandeurs, Stanislav Batrine, a déjà demandé au gouvernement ukrainien de résilier les contrats gaziers. Il a même déposé une requête devant la cour d’arbitrage de Stockholm. Cette dernière a statué que le Cabinet des ministres n’avait pas le droit d’intervenir dans les contrats conclus entre les sociétés Gazprom et Naftogaz. C’est cette décision du juge de Stockholm qui a été contestée devant le juge national.

L’acceptation de la demande par ce dernier laisse croire que celle-ci sera examinée au fond. Selon Dmitri Labine, docteur en droit, professeur du département du droit international de l’Institut d'État des relations internationales de Moscou :

« Je ne crois pas que ces contrats puissent être résiliés aussi facilement. Le gaz naturel est un produit stratégique et c’est au niveau des Etats que la Russie conclut des accords internationaux, y compris avec l’Ukraine, dans le cadre desquels les agents économiques sont chargés d’assurer les livraisons. »

La décision du tribunal de Kiev n’aura probablement pas d’incidence sur la révision des contrats gaziers, estime M. Labine.

« Même si la décision est défavorable pour Gazprom, il y a d’autres moyens de rétablir la justice. Dans l’optique du droit international, Gazprom est un investisseur. C’est pourquoi, s’il y a une décision prise par un juge national qui a des effets négatifs pour l’investisseur, celui-ci peut s’adresser à une cour d’arbitrage internationale pour demander la réparation du préjudice subi. »

Rappelons que l’Ukraine a à maintes reprises annoncé vouloir réviser les accords sur le gaz conclus avec la Russie, surtout en ce qui concerne les prix et la clause de « take or pay » prévue par les contrats.    N

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