Le gaz de schiste n’a pas d’avenir en Europe (José Bové)

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Le gaz de schiste n’a pas d’avenir en Europe pour de nombreuses raisons et c’est de l’intox que de vouloir créer un modèle d’Etats Unis en Europe a expliqué à La Voix de La Russie José Bové, vice-président de la Commission agriculture et développement rural au Parlement européen, pendant son séjour à Zurawlow, en Pologne. L’eurodéputé s’est rendu en Pologne pour soutenir le mouvement Occupy Chevron contre la fracturation hydraulique en Europe qui vient de fêter 100 jours de résistance.

La Voix de la Russie. Monsieur Bové, pourquoi avez-vous décidé de participer au mouvement Occupy Chevron ? Quelle est votre motivation personnelle et professionnelle ?

José Bové. « J’ai décidé d’aller soutenir les habitants de Zurawlow contre Chevron et contre le gaz de schiste, parce que je pense que le gaz de schiste à la fois est dangereux pour l’environnement, dangereux pour la santé et en même temps que c’est une illusion de croire que le gaz de schiste permettra une autonomie en termes d’énergie et que en tout cas ce n’est pas une solution pour la transition énergétique indispensable afin d’empêcher le réchauffement climatique. »

LVdlR. Voyez-vous une autre solution pour le marché de l’énergie autre que le gaz de schiste, une solution acceptable en même temps pour l’Etat, pour le peuple, les écologistes et les hommes d’affaires ?

José Bové.«C’est un des grands enjeux du XXIe siècle c’est d’organiser la transition énergétique. Nous savons tous que les ressources fossiles ne sont pas des ressources illimitées, elles vont s’épuiser. Donc il faut les utiliser d’une manière rationnelle et tempérée. En même temps il faut chercher pour lutter contre le réchauffement climatique qui va devenir de plus en plus important puisqu’on nous annonce 4,8 degrés de plus d’ici à 2100. Ca va a poser d’énormes problèmes à la fois aux pays, à l’économie et aux habitants. Donc il faut organiser la transition. La transition énergétique doit se baser pour moi sur trois piliers important. Le premier pilier c’est la lutte contre le gaz final. Aujourd’hui on sait que 40% de l’énergie qui est distribuée sont gaspillés et partent dans l’atmosphère sans aucune utilité ni économique ni sociale. Deuxièmement c’est l’efficacité énergétique, organisée des mix pour que l’énergie soit utilisée de la manière la plus rationnelle avec notamment la cogénération quand c’est possible. Et le troisième pilier ce sont les énergies renouvelables avec une décentralisation importante à la fois sur les territoires et à l’intérieur des villes, par exemple. Et c’est en mettant en œuvre ces trois piliers qu’on peut aujourd’hui sortir de la dépendance par rapport aux énergies carbonées, dont on sait évidement qu’elles sont responsables aujourd’hui de la crise économique et en même temps il faudra le faire, parce que ces réserves sont limitées. Donc si on veut pouvoir les utiliser en acceptant qu’on n’a pas d’autres moyens et bien il faut qu’on organise l’utilisation de ces énergies carbonées sur la durée et pas seulement les gaspiller dans quelques dizaines années. »

LVdlR. Des experts disent que la Pologne sera un exemple pour toute l’Europe et que si la fracturation hydraulique marche bien et qu’on sait combattre les risques, on pourra appliquer la méthode dans le reste des pays européen où il y a du gaz de schiste. Qu’en pensez-vous ?

José Bové.«Je crois que c’est une illusion et que c’est de l’intox. Les réserves qui avaient été annoncées en Pologne aujourd’hui sont revues à la baisse et sont à peine à 10 pourcents de ce qui avait été annoncé. Et même l’Agence Internationale de l’Energie des Etats Unis reconnaît que en réalité le gaz de schiste n’a pas d’avenir en Europe, parce que les couches géologiques sont plus profondes de ce qu’ils avaient prévu, les réserves sont moins nombreuses, les coûts seraient beaucoup plus importants et que en réalité il n’y aurait pas de bénéfice à utiliser ces énergies et que avec les coûts environnementaux et sociaux, vouloir créer le modèle des Etats Unis en Europe n’a pas d’avenir. Je crois que la Pologne est un des rares pays européens à croire qu’elle a encore cette possibilité. Et ce ne sont que les entreprises aujourd’hui qui pour les raisons spéculatives poussent encore en Pologne. Je crois que la Pologne n’a pas d’avenir avec le gaz de schiste. »

LVdlR : Il y a ceux qui disent que le gaz de schiste est avant tout une question plus politique qu’énergétique. Etes-vous d’accord avec cette opinion ? Y-a-t-il un forte influence politique sur ce thème en France, en Union Européenne en général et aux Etats-Unis?

José Bové.« Je crois que c’est un mix. Le discours de gaz de schiste c’est d’abord des compagnies qui essayent de se mettre en avant pour valoriser leurs entreprises. Ca c’est le premier élément, essayer d’élever les capitaux. Après il y a aussi cet élément qui est utilisé notamment en Pologne – c’est la question de l’indépendance énergétique par rapport aux fournisseurs traditionnels de gaz. Et ce qui est aujourd’hui utilisé comme principal argument par le gouvernement polonais c’est l’indépendance par rapport au gaz russe. Donc c’est clairement un argument nationaliste qui est mis en avant, mais qui quand même aujourd’hui en tout cas ne permettra pas de changer la situation par rapport à la question du gaz. Il faut modifier radicalement cette logique et je crois que c’est une illusion de croire que la Pologne puisse être autonome grâce au gaz de schiste ». T


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