«Caring Currency»: à Davos, le «Père Noël de l’écologie» veut lancer la crypto du cœur

© Sputnik . Maxime PerrotinPhilip McMaster, «Sustaina Claus» («Père Noël durable»), pendant une manifestation écologiste en marge du Forum économique mondial de Davos de 2020.
Philip McMaster, «Sustaina Claus» («Père Noël durable»), pendant une manifestation écologiste en marge du Forum économique mondial de Davos de 2020. - Sputnik Afrique
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Philip McMaster, ancien enseignant en MBA, a rejoint à pied le Forum Économique mondial. Vêtu en «Père Noël durable», ce québécois dénonce le non-respect des objectifs de développement durable de l’Onu, que le Forum de Davos promeut pourtant. Pour les tenir, il propose de récompenser les bonnes actions avec une nouvelle cryptomonnaie.
«Rendre le monde meilleur? C’est de la foutaise! Cela ne les intéresse vraiment pas!», lâche Philip McMaster au micro de Sputnik, lors de la manifestation d’une trentaine de jeunes en marge du forum économique mondial (WEF).

Une allusion à la mission que le fondateur et président WEF, Klaus Schwab, a donnée à son organisation. «Sustaina Claus», ce «Père Noël de l’écologie» est un Québécois, aujourd’hui installé en Chine, qui a délaissé il y a une quinzaine d’années les bancs des écoles de commerce où il enseignait, afin de plaider la cause écologiste.

«J’enseignais aux psychopathes qui sont au pouvoir aujourd’hui! Je ne l’enseigne plus parce que j’enseignais la psychopathie! J’enseignais la discorde sociale, j’enseignais la compétition, la division, les parts de marché. Avec le temps, j’ai compris que c’était mal», s’emporte Philip McMaster.

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Incendies en Afrique centrale et en Amazonie durant l’été 2019, surpêche et déforestation, il dénonce maintenant les catastrophes naturelles et autres calamités affectant le milieu naturel.

Des calamités qui «ont été aggravées par les actions des gens présents ici, à Davos», accuse-t-il.

Pour cette première venue à Davos, Philip McMaster, qui écume les forums et sommets climatiques internationaux, entend rappeler aux puissants de ce monde la nécessité de respecter les 17 objectifs de développement durable, définis en septembre 2015 par les États membres de l’Onu, lesquels visent à répondre à l’horizon 2030 aux «défis mondiaux auxquels nous sommes confrontés». Des défis lancés tant en matière de climat et de dégradation de l’environnement qu’en matière de pauvreté, d’inégalités, de paix et de justice, dont certains ont été repris par la Cop 21 qui, l’année suivante, a donné naissance au fameux Accord de Paris sur le climat.

S’il estime que ces objectifs sont atteignables, il souligne que l’on n’en prend pas le chemin: les émissions de dioxyde de carbone n’ont fait qu’augmenter au lieu d’amorcer une décrue. Dans la foulée, «Sustaina Claus» fustige l’attitude tant du Forum de Davos que de ses participants, bien que le WEF ait mis depuis plusieurs années à l’honneur la promotion de ces 17 objectifs de développement durable.

«Ont-ils tenu ces 17 objectifs? Négatif! Nous sommes pires, il y a plus de carbone émis aujourd’hui qu’il y a cinq ans!» assène-t-il.

Ce dernier ne voit d’ailleurs pas d’un bon œil le mélange entre politique et économie, évoquant le cadre de partenariat stratégique signé le 13 juin 2019 entre le Secrétaire général de l’Onu, António Guterres et Klaus Schwab. Visant à «accélérer conjointement la mise en œuvre» du Programme de développement durable dans les délais fixés par l’Onu (2030), cet accord a provoqué l’ire de près de 400 ONG, qui ont adressé une lettre ouverte au plus haut fonctionnaire onusien. Elles estiment que ce partenariat public-privé était «fondamentalement contraire à la Charte des Nations unies», dénonçant une forme d’«emprise des entreprises», des «sociétés transnationales» partenaires du WEF sur un organisme multilatéral tel que les Nations unies qui doivent demeurer indépendantes et impartiales. Pour les cosignataires, cette association remettrait ainsi en question la légitimité même de l’Onu.

«C’est incroyable. Ça ne va pas du tout, c’est une question politique! Ce n’est pas du business, c’est de la politique! Le WEF doit rester complètement à l’écart de ce qui se passe», commente «Sustaina Claus».

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Pour encourager les entrepreneurs et les citoyens à agir positivement à l’égard de l’équilibre entre climat, société et économie, Philip McMaster estime qu’il ne faut pas punir, mais récompenser les actions vertueuses. Une incitation à agir en faveur des engagements onusiens, qui prendrait la forme d’une cryptomonnaie évaluant un capital social, la Caring Currency, la «monnaie du cœur». Il s’agirait d’un capital social que l’on recevrait pour ses actions en faveur du développement durable. «Sustaina Claus» prend pour exemple le cas de l’achat d’une barre de chocolat. Au-delà du prix d’achat plus ou moins élevé, rien ne distingue l’acte d’achat d’un produit durable de celui d’un produit non durable. Une lacune que cet ancien professeur d’économie entend combler avec sa cryptomonnaie:

«Ainsi vous être crédité avec du crédit social –nous l’appelons “crédit social universel”– quand vous avez pris une décision ou acheté quelque chose qui est dans le spectre de la durabilité. Mais vous n’obtenez rien, pas de supplément. Vous achetez de toute façon la barre de chocolat, mais si elle n’est pas durable –pleine d’huile de palme, ce genre de chose–, vous n’obtenez aucun crédit social. Est-ce que cela punit quelqu’un? Non, mais cela récompense ceux qui vont dans le bon sens!» développe-t-il.

Au-delà des consommateurs, le procédé est également destiné à encourager les acteurs de l’économie à investir, à développer des technologies allant dans le sens des objectifs de développement durable de l’Onu.

«Ça ne remplace pas l’argent. Ces gars de Davos, qui sont tous obsédés par l’argent, ne feront pas de bénéfice en jouant sur cette cryptomonnaie. Ils gagneront de l’argent en investissant dans les entreprises qui produisent des biens durables et les entreprises qui créent des technologies durables. Investissez dans ces choses et vous obtiendrez du crédit social!»

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En somme, tout n’est qu’une question de volonté. D’ailleurs, pour plaider sa cause, Philip McMaster n’a pas ménagé ses efforts. Symboliquement, il a parcouru à pied le trajet de la commune de Landquart jusqu’à Davos. Un trajet à travers la montagne qui, en train, met plus d’une heure, sur un dénivelé de près de 1.000 mètres. Ce qui, à pied, représenta un périple de trois jours. Le père Noël de l’écologie fustige ainsi un monde où nous nous déplaçons par avion à la moindre occasion et tacle ceux qui, s’estimant économiquement puissants, pensent avoir le droit d’aller partout et n’importe quand sur la planète.

«C’est la capacité de charge! Cela signifie que vous pouvez vous porter vous-même. Si vous devez vous rendre à un endroit, faites-le vous-même! Je mets au défi ces personnages de Davos de le faire, je les mets au défi de porter leur propre poids!»
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