La circulaire Collomb sur les migrants contestée en justice, et pas seulement

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Plusieurs associations demandent la suspension d'une circulaire organisant le recensement des migrants dans les centres d'hébergement d'urgence. Le gouvernement doit les rencontrer ce jeudi, alors qu’il prépare une nouvelle loi immigration.

Elles ne décolèrent pas. Vingt-six associations, dont la Fédération des acteurs de la solidarité, Emmaüs, le Secours catholique, Médecins sans frontières (MSF), ou encore la Fondation Abbé Pierre vont saisir, jeudi 11 janvier, le juge des référés du Conseil d'État. Elles demandent la suspension d'une circulaire qui doit organiser le recensement des migrants dans les centres d'hébergement d'urgence. Présentée par le gouvernement comme le moyen de connaître les publics hébergés et de les orienter en fonction de leur situation (réfugiés, déboutés…), les humanitaires y voient purement et simplement un «tri».

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La mesure, controversée, réjouit certains autant qu'elles en indignent d'autres. Pour Jordan Bardella, conseiller régional d'Île-de-France (FN), il s'agit d'une «mesure de bon sens», mais paradoxale au vu de l'augmentation du budget alloué au demandeur d'asile.

Un récent rapport de la Cour des comptes soulignait la confusion qui règne entre les différentes structures d'accueil et les populations, sans domicile fixe et migrants, préconisant des logements durables pour ces derniers. Le budget destiné aux demandeurs d'asile a augmenté (il est passé de 387 millions à 540 millions d'euros entre 2012 et 2016), et a permis de créer 12.000 places en centres d'accueil de demandeurs d'asile.

En listant les personnes présentes dans ces centres d'urgence, l'État ne serait peut-être pas dans son droit. Dans un communiqué commun publié mercredi 10 janvier, les associations estiment que cette circulaire, datant du 12 décembre, «autorise, sans base légale, des équipes relevant du ministère de l'Intérieur à pénétrer dans des centres d'hébergement protégés pour y réaliser des contrôles». Elles déplorent aussi le fait «que les données personnelles et confidentielles des personnes hébergées soient collectées et transmises aux autorités» et «que les centres d'hébergement soient contraints de participer à cette collecte illégale».

Même l'église est contre. Répondant à la demande du Pape, les autorités catholiques françaises se mobilisent et demandent la «sanctuarisation» des centres d'hébergement, des écoles, des hôpitaux et des lieux de culte. Lors d'une conférence de presse mercredi 10 janvier, Carlos Caetano, directeur de la Pastorale des migrants, le service de l'épiscopat dédié à ce dossier, a estimé que «les personnes doivent pouvoir s'y rendre en confiance».

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L'État cherche-t-il à expulser d'avantage? Dernière polémique en date, une circulaire qui demandait aux hôpitaux psychiatriques du sud de la France d'aider à l'expulsion de sans-papiers. «Concrètement, les médecins devront, sur instruction de la préfecture, lui faire signer son obligation de quitter le territoire français avant de la transmettre à l'agence régionale de santé», révélait alors StreetPress. L'initiative, dénoncée par l'Union syndicale de la psychiatrie (USP) et le Syndicat des psychiatres des hôpitaux (SPH), a finalement été annulée.

Que se passera-t-il si un agent découvre qu'une personne est en situation irrégulière? La «question reste ouverte», comme le souligne RTL, qui affirme que la circulaire ne serait pas encore appliquée, et que certain préfet se réservent le droit de l'adapter.

Du côté des députés En Marche!, la circulaire ne fait pas l'unanimité non plus. La présidente de la commission des Affaires sociales, Brigitte Bourguignon, juge «brutale» la présentation du texte de loi du fait «de la circulaire évidemment, qui peut froisser, qui nous a froissés pour beaucoup».

«Il y a une contradiction de M.Macron, qui démontre sa faiblesse sur les questions migratoires. Il est aussi tiraillé par sa propre majorité qui s'oppose aussi à ces mesures puisqu'un député de LREM a annoncé vouloir créer un groupe plus à gauche pour s'opposer à ces décisions sur l'immigration», poursuit Jordan Bardella.

Fin décembre, le Premier ministre Édouard Philippe avait assuré aux associations qu'il ne leur serait pas demandé «de se substituer aux agents» procédant au recensement ni de «donner des listes». «La circulaire n'a pas pour objet et n'aura pas pour objet de revenir sur le principe d'inconditionnalité de l'accueil», avait-il alors déclaré.

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