Coca-Cola a dépensé des millions en France pour acheter des études qui lui sont positives

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Une enquête du Monde a mis en lumière les dépenses de Coca-Cola en France, s’élevant à huit millions d’euros depuis 2010 et consistant à financer les recherches «prouvant» la non-nocivité de ses boissons et même leurs effets bénéfiques sur la santé.

La persévérance de l’ONG Foodwatch a contraint Coca-Cola à publier en avril 2016 les données sur les financements versés par la firme en France.

Le Monde a étudié ces informations et a révélé que «depuis 2010, Coca-Cola a octroyé plus de huit millions d’euros à des experts et à diverses organisations médicales, mais aussi sportives ou événementielles» qui relevaient «dans leur grande majorité de la communication ou du sponsoring pur, et non d’un authentique travail scientifique».

Ainsi, le journal s’est dans un premier temps penché sur les nombreux professionnels de santé dont la firme américaine a financé les travaux.

C’était par exemple le cas de France Bellisle qui a touché 2.000 euros pour un article concluant qu’un lien entre la consommation de boissons sucrées et le poids n’existait pas «nécessairement».

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Des intervenants renommés dans le domaine de la santé ont également été généreusement rémunérés par Coca-Cola, leurs récompenses atteignant les 4.000 euros.

Xavier Bigard, ancien président de la Société française de médecine du sport, aujourd’hui directeur médical de l’Union cycliste internationale, a avoué «avoir reçu 4.000 euros de Powerade, une marque de boissons "énergétiques" que possède Coca-Cola, pour une conférence "sur les règles d’hydratation du sportif"».

Bernard Waysfeld, psychiatre spécialisé en nutrition, a dit avoir touché la même somme pour une communication «sur les boissons des ados» durant un colloque qui s’est déroulé en mai 2011et qui a été «longuement travaillé et harmonisé avec les responsables de Coca-Cola».

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Qui plus est, Le Monde a souligné que la liste des experts de Coca-Cola était «cocasse» car elle comprenait «des personnes dont il n’a pas été possible de trouver les coordonnées». Sur les 157.000 euros distribués par la firme au total, le quotidien est arrivé à se faire confirmer par les professionnels de santé eux-mêmes seulement 11.700 euros.

Le média évoque également une analyse effectuée par des chercheurs en sociologie et en politiques publiques sur les informations publiées par la firme américaine dans le cadre de son initiative de transparence quant aux études parues dans des revues scientifiques mentionnant de façon explicite un financement de Coca-Cola.

«Résultat: sur 389 articles parus dans 169 revues scientifiques, signés par pas moins de 907 auteurs, la firme n’en nommait que 42 (soit moins de 5 %)».

«Cette opacité se dégage également de l’analyse de la liste, bien plus longue, des "activités dans les domaines de la nutrition et de l’activité physique" que Coca-Cola finance en France. Le montant total atteint ici 7,8 millions», poursuit le média.

Une autre activité fréquente des «partenariats» de Coca-Cola était le sponsoring des conférences où se rendaient des professionnels de santé.

«Ainsi le salon annuel Dietecom a-t-il bénéficié de plus de 140.000 euros entre 2010 et 2017. La Société française de médecine de l’exercice et du sport d’environ 80.000 euros de 2010 à 2016 dans le cadre de son "partenariat annuel avec la marque Powerade". Les Entretiens de Bichat, un rendez-vous incontournable de la médecine en France, cumulent, eux, plus de 100.000 euros», selon Le Monde.

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Il s’agissait en outre du financement de trois onéreux travaux de «recherche» ayant coûté à Coca-Cola 2,4 millions d’euros.

Le montant le plus élevé, 930.000 euros, a été destinée à CreaBio pour un «projet de recherche sur les édulcorants intenses» en 2014-2015. Parues seulement en 2018, les conclusions de cette étude pointent du doigt qu’il n’y a pas de différence entre l’eau et les boissons avec des «édulcorants basses calories» en termes d’effets sur «l’appétit, l’apport énergétique et les choix alimentaires».

720.000 euros ont été versés entre 2010 et 2014 à l’Institute for European Expertise in Physiology (IEEP) pour un autre «projet de recherche sur les édulcorants intenses». Publié lui aussi en 2018, le texte a évoqué l’inexistence d’effets de la consommation de boissons gazeuses sur la sensibilité à l’insuline ou la sécrétion de cette hormone régulant les quantités de glucose dans le sang.

«Bien sûr qu’ils ont regardé les conclusions. On sait que les résultats leur appartiennent», a commenté l’endocrinologue Fabrice Bonnet, l’investigateur principal de cet essai mené au CHU de Rennes.

Finalement, Le Monde a parlé des instituts à but lucratif ayant piloté les recherches pour Coca-Cola. Il s’agissait par exemple de la firme Sprim appartenant à l’épouse du docteur médiatisé Frédéric Saldmann, «producteur à succès de pots-pourris de conseils sur la santé hérissés de points d’exclamation».

Le quotidien évoque aussi une société civile au nom de Gérard Friedlander, le doyen de la faculté de médecine de l’Université Paris-Descartes qui «avait suscité force railleries» pour une vidéo de lui en train de «vanter in english les vertus des lotions anti-âge de la marque Lancaster».

Un autre bénéficiaire d’un financement de «recherche» de Coca-Cola est l’International Prevention Research Institute (Institut international pour la recherche en prévention, IPRI) en région lyonnaise. L’organisme a reçu 690.000 euros en 2012-2013 pour un «projet de recherche sur la consommation de sucres».

Le Monde précise que le seul article de l’IPRI correspondant à cette «commande» est une analyse de données existantes de dix pages, bibliographie comprise. Le texte a qualifié de «rassurantes» les données sur l’association entre les boissons gazeuses, y compris les colas, et le risque de cancer.

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