Pourquoi les Français sont-ils appelés à financer le «journalisme libre» en Syrie?

© Sputnik . Mikhail VoskresenskyЖенщина в цехе завода по изготовлению консервов в Дамаске.
Женщина в цехе завода по изготовлению консервов в Дамаске. - Sputnik Afrique
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L'ONG franco-syrienne Association syrienne des Medias Libres collecte des fonds pour former au journalisme et fournir les équipements nécessaires pour exercer ce métier aux Syriennes de Gouta et d'Idlib. Des Syriens interrogés par Sputnik mettent en doute les vrais objectifs de ce projet.

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Une collecte de fonds pour la formation des femmes syriennes au journalisme a été lancée par l'Association syrienne des Medias Libres. L'objectif annoncé par cette ONG franco-syrienne est d'aider les femmes de ce pays proche-oriental déchiré par la guerre civile depuis plus de six ans à «trouver un travail qualifié», mais aussi de «porter leur voix et diffuser leur message». À première vue, l'initiative ne peut qu'être saluée, sauf que le message l'accompagnant contient certaines incohérences et inexactitudes.

Comme l'annonce l'association sur le site de financement participatif européen Ulule, en Syrie les femmes «sont sous-représentées et sous-estimées dans la société. […] La loi syrienne ne donne pas les mêmes droits aux hommes et aux femmes».

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Ce qui saute aux yeux des personnes plus ou moins renseignées sur la Syrie est l'inexactitude de cette dernière information prise dans le contexte de la formation et de l'emploi dont il est question. Certes, au niveau de l'égalité homme-femme la société syrienne — comme tant d'autres sociétés orientales — a des progrès à faire. Toutefois, il convient de rappeler qu'au niveau législatif, l'État syrien (officiellement laïque) garantit les mêmes conditions de formation et d'accès à l'emploi aux hommes et aux femmes. L'exception s'observe pour les métiers jugés comme étant difficiles à exercer pour les femmes. Ainsi, avant 2011, on ne pouvait pas trouver en Syrie de femme éboueur et pratiquement pas de femme conductrice de moyens de transport en commun. Par contre, les femmes occupent à pied d'égalité avec les hommes des postes au sein du gouvernement, au sein du parlement et dans toute sorte d'établissements gouvernementaux. Elles sont juges, avocates, médecins, journalistes.

«Le manque de représentation et d'autonomisation des femmes affecte non seulement leurs droits individuels, mais freine aussi le développement des nations dans leur ensemble» — au fur et à mesure du message, les auteurs citent des déclarations des représentants de l'Onu. Or, cette présentation faite dans l'esprit des valeurs universelles est accompagnée d'une photo d'une femme intégralement voilée. Brouillé par ces contradictions, Sputnik s'est adressé à la présidente de la fondation Descendants d'Ashtar, Ayssar Midani.

À ses yeux ce projet cherche à encourager le «journalisme de guerre», or, des milieux dangereux pourraient en profiter pour véhiculer leurs idées.

«Si on enlève tous les masques et qu'on gratte bien, cela revient à dire embrigader les femmes pour être journalistes, pour faire de la propagande» et «de la manipulation», estime-t-elle.

Mme Midani attire en outre l'attention sur le fait que la formation au journalisme en question concerne deux zones où Jabat al-Nosra et Daech sont présents — la Ghouta et Idleb — «où personne n'ose entrer». Dans ce contexte, elle craint que des personnes liées d'une manière ou d'une autre aux extrémistes puissent se trouver derrière l'initiative.

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Le journaliste syrien Hassan Hachem rappelle pour sa part que le phénomène de «citoyen journaliste» dont il est question est né au Proche-Orient avec le «Printemps arabe». Chaque personne munie d'un téléphone portable ou connectée au réseau Internet s'est vu offrir la possibilité de devenir «reporter» pour des chaînes et des sites Web engagés contre les autorités des pays arabes en question.

«L'authenticité des témoignages reste incertaine. Toutefois, c'est un moyen efficace pour véhiculer les idées des parties intéressées», estime-t-il.

La situation de la femme s'est dégradée

Interrogée au sujet de la situation des femmes en Syrie, Mme Midani explique que les conditions de ces dernières étaient bien meilleures avant la guerre.

«Je tiens à rappeler que les femmes syriennes, avant cette guerre horrible qui les a mutilées, étaient dans une situation parmi les plus avancées de la région. Elles allaient à l'école et occupaient des postes à responsabilité, elles étaient considérées. Je rappelle aussi que le code du travail syrien traite les femmes à l'égal des hommes, c'est-à-dire qu'à responsabilités égales, salaires égaux, et à diplôme égal, responsabilité égale. En réalité, l'État qu'ils combattent a toujours assuré cela aux femmes…».

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