«La division du Kosovo provoquera une réaction en chaîne»

© Sputnik . Iliya Pitalev / Accéder à la base multimédiaPristina
Pristina - Sputnik Afrique
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La seule solution possible au problème kosovar consiste à diviser la république autoproclamée du Kosovo en parties serbe et albanaise, d’après le ministre serbe des Affaires étrangères Ivica Dacic. Peut-on trancher ainsi ce nœud gordien? Trois experts interrogés par Sputnik analysent les avantages et les inconvénients de ce scénario.

La division de la république autoproclamée du Kosovo en parties serbe et albanaise, proposée par le ministre serbe des Affaires étrangères Ivica Dacic, «provoquerait une réaction en chaîne» dans la région et encouragerait l’expansionnisme albanais, a déclaré vendredi à Sputnik Milivoje Mihajlovic, analyste politique et directeur de la radio Belgrade.

«La division du Kosovo marquerait le début de processus similaires dans tous les pays où il y a des habitants albanais […]. Celui qui compte régler le problème de l’expansionnisme albanais dans les Balkans en divisant le Kosovo, a tout à fait tort. L’idée de la Grande Albanie ne concerne pas que le Kosovo-Métochie, mais aussi les pays voisins», a indiqué M.Mihajlovic.

Selon lui, le règlement du problème du Kosovo passe par des processus d’intégration. Les Serbes et les Albanais doivent se mettre d’accord sur les modalités de leur cohabitation dans la région.

L’idée de diviser le Kosovo en deux parties n’est pas nouvelle. Au milieu des années 1980, l’intellectuel serbe en vue Dobrica Cosic avait déjà proposé un tel projet, mais les autorités l’ont rejeté. Aujourd’hui, ce projet refait surface dans le cadre du «dialogue national» lancé par le Président serbe Aleksandar Vucic en vue de trouver un compromis. Toutefois, la proposition de M.Dacic n’a pas été très bien accueillie dans la société serbe.

«Je suis content que la société ait lancé un dialogue sur le Kosovo […]. Fait intéressant, mon idée sur la division du Kosovo est la seule à avoir provoqué une réaction aussi nerveuse. On ne réagit pas ainsi aux propositions de renoncer au Kosovo ou à geler le conflit. Cette réaction montrerait quelle voie nous devons emprunter pour trouver une solution acceptable pour tout le monde», a estimé M.Dacic dans une déclaration envoyée à Sputnik.

Selon Stefan Surlic, de la faculté des sciences politiques de l’Université de Belgrade, les parties concernées ont peur d’ouvrir la boîte de Pandore.

«On se demande si on peut garantir une division à long terme du Kosovo par des moyens pacifiques et avec l’accord de toutes les parties: les Serbes, les Albanais et la communauté internationale […]. Toute initiative visant à régler la crise kosovare provoque de nouveaux problèmes politiques et des différends capables de détériorer les relations entre les pays de la région», a indiqué M.Surlic à Sputnik.

D’après l’analyste, aucun homme politique de Pristina n’est prêt à accepter la division du Kosovo où le nord du territoire reviendrait à la Serbie et le reste à la république autoproclamée aux Albanais. Pristina préfère discuter d’un échange de territoires et obtenir la vallée de Presevo à majorité albanaise, qui comprend les municipalités serbes de Presevo, de Bujanovac et de Medvedja, en cédant à Belgrade le nord du Kosovo peuplé de Serbes.

«L’idée de délimiter les régions serbes et albanaises met Pristina à l’écart et lance un dialogue entre Belgrade et Tirana visant à établir quelles régions sont serbes et albanaises. Ce dialogue direct est le seul moyen de parvenir à une entente sur la délimitation des frontières au Kosovo», a noté M.Surlic.

Mais pour l’historien Cedomir Antic, Belgrade a raté l’occasion de diviser le Kosovo.

«Nous avons manqué cette chance. L’intellectuel Dobrica Cosic en a parlé pendant les années 1980, mais les autorités serbes ont rejeté cette proposition. Slobodan Milosevic croyait que le peuple serbe considérera comme un traître celui qui cèdera ne serait-ce qu’un centimètre carré du Kosovo. En 2012, le gouvernement serbe […] a signé l’accord de Bruxelles avec Pristina, acceptant ainsi l’intégration des habitants serbes du Kosovo dans les institutions de la République du Kosovo. Les Serbes n’ont reçu aucune autonomie», a rappelé M.Antic.

La Serbie et la république autoproclamée du Kosovo ont entamé un dialogue en mars 2011 avec la médiation de l’UE et l’assistance des États-Unis. Les négociations ont notamment permis de signer un accord sur les principes d’amélioration des relations entre Belgrade et Pristina en avril 2013 et un accord sur l’association des communautés serbes en août 2015. À l’heure actuelle, les négociations entre la Serbie et le Kosovo sont suspendues sur décision, prise en mars, du parlement kosovar.

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