Traité sur les missiles: le désarmement nucléaire a-t-il acté son échec?

© REUTERS / Latonja Martin/U.S. Navymissile à moyenne portée
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Trente ans après l’accord prévoyant le démantèlement des missiles nucléaires à moyenne portée, Moscou et Washington ne cessent d’échanger des piques, s’accusant l’un et l’autre de violer le document et menaçant de le quitter. Mais qu’est-ce qui a amené à cette crise et quelles peuvent être ses conséquences sur le monde? Sputnik fait le point.

Le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) est actuellement menacé, a déclaré aujourd'hui le département d'État américain. Alors que Washington semble étudier la possibilité de créer un nouveau système de missiles à moyenne portée, ce qu'affirmait à Kommersant Thomas Shannon, sous-secrétaire d'État américain, accusant la Russie de bafouer le FNI, Sputnik revient sur ce document historique.

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Il y a 30 ans, le Président américain Ronald Reagan et le secrétaire du Parti communiste Mikhaïl Gorbatchev signaient à la Maison-Blanche le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI). Composé de près de 200 pages, le document visait à détruire dans les trois ans qui suivront les fusées de 500 à 5.500 km de rayon d'action, soit justement ces armes qui, pointées en direction du territoire américain depuis l'île de Cuba, ont mis en 1962 le monde au bord d'une guerre nucléaire.

En mai 1991, les conditions prévues par l'accord ont été remplies: l'Union soviétique a détruit plus de 1.700 missiles balistiques et de croisière lancés depuis le sol, lorsque Washington s'en est débarrassé de 859. Le texte introduisait également des vérifications mutuelles, avec inspections sur place.

Bien que l'accord ait été conclu à durée indéterminée, chacune des parties est en mesure de le quitter en justifiant l'indispensabilité de son geste. Quant aux pays non-signataires, et notamment les pays européens, le texte n'est pas en mesure de les empêcher de se doter de missiles nucléaires.

Moscou-Washington: 30 ans de reproches

En dépit de sa portée historique, le document n'a pas aidé Moscou et Washington à établir des relations de confiance en matière de désarmement, et ces dernières années, l'échange de piques entre les deux pays est devenu de plus en plus fréquent.

D'après le ministère russe des Affaires étrangères, dans l'intérêt de son système de défense antimissile, le gouvernement américain poursuit depuis des décennies des tests, tout en utilisant des missiles cibles dont les caractéristiques ressemblent beaucoup aux missiles balistiques de moyenne portée, ce qui leur permet d'améliorer, entre autres, les éléments clés des systèmes de missiles interdits par le traité INF.

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Moscou pointe par ailleurs du doigt le déploiement d'éléments du bouclier antimissile (ABM) américain en Romanie et en Pologne. Dénonçant une violation «flagrante» du FNI, elle estime en effet que le système pourrait servir, le cas échéant, à lancer des missiles de portée intermédiaire vers son territoire et se dit contrainte de prendre des mesures en vue de garantir sa sécurité.

De son côté, Washington soupçonne la Russie de développer un missile de croisière terrestre et l'accuse d'avoir déployé des missiles qui, selon le général Paul Selva, un haut responsable militaire américain, «présentent un risque» pour des installations américaines en Europe. Le Kremlin rejette systématiquement ces accusations, affirmant rester fidèle à ses obligations internationales, y compris celles liées au traité sur les Forces nucléaires intermédiaires.

À quoi faut-il s'attendre?

«Le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire est l'un des piliers de la stabilité dans le monde», estime dans une interview à Sputnik Frants Klintsevitch, vice-président de la commission russe de défense et de sécurité du Conseil de la Fédération (chambre haute du parlement russe).

Le sénateur note que le texte revêt avant tout une importance particulière pour l'Europe, car les missiles de 500 à 5.500 km de rayon d'action ne créent pas de menace directe pour Washington.

«De ce fait, nous réagissons de façon aussi sérieuse aux informations selon lesquelles les États-Unis déploient des systèmes de lancement qui peuvent être utilisés pour des missiles à portée intermédiaire, et ce, sous prétexte de violations du Traité par la Russie, sans le confirmer et en se référant à de prétendues données confidentielles», indique-t-il, tout en ajoutant que les systèmes américains sont également en mesure d'effectuer des lancements de Tomahawks.

Le sénateur admet que le FNI présente des défauts, dénonçant le fait qu'il ne concerne pas d'autres pays, outre la Russie et les États-Unis. «Mais cela signifie qu'il doit être maintenu et complété, et en aucun cas annulé», estime-t-il.

L'ancien Président de l'URSS Mikhaïl Gorbatchev, signataire du Traité, met lui aussi en garde contre les dangers que présente le rejet du texte.

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«La rupture du Traité FNI aurait des conséquences très graves. Que ce soient des conséquences directes, comme le déploiement de missiles près des frontières russes et européennes, ou des conséquences indirectes pour le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP)», affirme-t-il à Sputnik, interrogé à l'occasion de l'anniversaire de l'accord.

«La Russe se prononce en faveur du maintien du FNI, mais en cas de la sortie des États-Unis préparera dans les plus brefs délais une «arme plus puissante» pour ses troupes, à de son côté mis en garde ce vendredi à notre agence Viktor Bondarev, président de la commission de la défense et de la sécurité du Conseil de la Fédération (chambre haute du parlement russe).

De nombreux experts s'accordent également à dire que pour sortir de l'impasse sur le Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI), la Russie et les États-Unis devraient agir en parallèle, en coordonnant leurs actions. Un scénario visiblement compliqué à ce jour par l'état dans lequel se trouvent les relations russo-américaines.

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