Attaques chimiques en Syrie: la faiblesse de la ligne rouge de Macron

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Après Obama, Macron est-il tombé dans le piège des lignes rouges? Depuis plusieurs jours, on dénonce de nouvelles attaques chimiques en Syrie. Emmanuel Macron s’était engagé, en mai dernier, à riposter si ce genre de pratique se répétait. Que va donc faire le chef de l’État? Bombarder ou ne pas intervenir? Éléments de réponses.

«Nous avons tous les éléments, toutes les indications- je parle avec précaution parce ce que tant que ce n'est pas complètement documenté, il faut être prudent- mais toutes les indications nous montrent aujourd'hui qu'il y a l'usage du chlore par le régime en ce moment en Syrie.»

Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian déclarait, ce 6 février, que l'État syrien était très probablement responsable de nouvelles attaques chimiques en Syrie ces derniers jours. Si cette déclaration n'est pas une affirmation, elle tâche fortement d'y ressembler.

​D'autant plus que la veille, l'ambassadeur français à l'ONU, François Delattre, s'était exprimé, lors d'une réunion du Conseil de Sécurité. Lui n'exprime pas le moindre doute:

«Ces armes [chimiques, ndlr] que nous pensions appartenir au passé sont à nouveau employées par le régime syrien, de manière méthodique et de manière systématique contre sa propre population.»

Mais que doit faire alors Emmanuel Macron? Ce dernier avait déclaré sur la Syrie, le 29 mai dernier, quelques jours après avoir pris ses fonctions, devant Vladimir Poutine à Versailles:

«Une ligne rouge, très claire, existe de notre côté, l'utilisation d'armes chimiques par qui que ce soit. Et donc toute utilisation d'arme chimique fera l'objet de représailles et d'une riposte immédiate, en tout cas de la part des Français.»

On s'attendrait donc à ce que le Président annonce que l'armée française, et son aviation en particulier, bombarde le territoire de Bachar el-Assad, à l'instar de son homologue américain qui, le 6 avril 2017, avait lancé 59 missiles contre une base militaire syrienne située près de Homs (région ouest du pays) après une attaque au gaz à Khan Cheikoun. 

Mais peut-être attend-il une confirmation par les instances internationales que l'auteur de ces massacres chimiques est bien Damas? Où va-t-il plutôt imiter son modèle?

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En août 2012, le président américain Barack Obama avait prévenu que l'utilisation d'armes chimiques serait considérée par les États-Unis comme une «ligne rouge». Le 3 décembre, il avait renouvelé ses menaces d'intervention en Syrie. Mais quelques mois plus tard, après les incidents terribles de la Ghouta en août 2013 et les rapports des services de renseignements américains et français désignant Damas comme responsable de ce massacre chimique, Obama n'avait pas mis à exécution ses menaces, au grand dam de son homologue français. Il avait été finalement piégé par «sa ligne rouge».

Emmanuel Macron risque fort de tomber dans le même travers. Mais contrairement aux États-Unis, la France n'est pas un acteur majeur en Syrie et elle ne pourra donc agir par sa propre initiative. D'autres facteurs risquent de plus d'empêcher Emmanuel Macron de jouer les va-t-en-guerre.

Tout d'abord, les auteurs de ces attaques sont, comme lors de chaque utilisation d'armes chimiques, très difficilement identifiables. Ainsi, alors que les services de renseignements avaient désigné Bachar el-Assad comme le coupable des attaques de la Ghouta en 2013, quelques mois plus tard, un rapport du MIT contredisait de façon irréfutable ces allégations.

De plus, après les déclarations de ses hommes de confiance et surtout après des jours de battage médiatique sur les attaques, le Président aurait dû agir dans les plus brefs délais. Mais, il sait probablement que ces nouvelles accusations d'attaques chimiques, ces images horribles, sont fréquemment diffusées par des officines propagandistes antigouvernementales visant le pouvoir de Bachar el-Assad et qu'elles sont pour le moins sujettes à caution.

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Enfin, alors qu'il a pris soin, depuis sa victoire à la présidentielle, d'affirmer que la France avait retrouvé sa propre voix, «une riposte des Français» en Syrie décidée par Emmanuel Macron apparaîtrait comme un acte de vassalité aux États-Unis. En effet, contrairement à Washington, Paris n'a pas officiellement comme objectif premier le départ de Bachar el-Assad.

Mais il convient de préciser que, sur le dossier des armes chimiques et son utilisation par un quelconque acteur, le chef de l'État et le Quai d'Orsay souhaiteraient agir dans un cadre multilatéral, comme l'expliquait le général Dominique Trinquand à Sputnik il y a quelques semaines:

«La France prône le multilatéralisme. Dans le cas d'utilisation d'armements chimiques, elle a proposé que les cinq permanents abandonnent leurs droits de veto dès lors que de l'armement chimique est utilisé.»

Refusant l'inertie de la communauté internationale, Emmanuel Macron pourrait donc passer outre le Conseil de Sécurité et intervenir en Syrie pour «riposter contre le régime syrien».

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