À coups de pastèques! Les Algériens répondent aux menaces du maréchal libyen Haftar

© REUTERS / Philippe WojazerLe maréchal libyen Haftar
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Le maréchal libyen Haftar avait menacé de déclarer la guerre à l’Algérie dont l’armée, accusait-il, aurait fait des incursions en territoire libyen. Les réseaux sociaux et les médias se sont déchaînés,, avec humour, contre l’homme fort de l’Est libyen, non sans réclamer des explications à leurs autorités.

Vague d'indignation, en Algérie, après des propos sibyllins, et non moins controversés, du Maréchal Khalifa Haftar, l'homme fort de l'Est libyen. Dans une réunion avec plusieurs dignitaires locaux, Haftar faisait état d'un accroc militaro-diplomatique avec le voisin de l'Ouest.

«Les Algériens ont profité de l'état de guerre, et ils sont entrés en territoire libyen. J'ai alors envoyé le général Abdelkarim pour leur dire qu'il ne s'agit clairement pas d'un acte fraternel. Utiliser l'état de guerre pour faire ça, on peut y répondre en transférant la guerre de l'autre côté, en quelques secondes! On a dit (à Abdelkarim) que c'est une démarche individuelle (sic), qui sera rectifiée dans une semaine, et ils l'ont remercié pour les avoir mis au courant!», a lâché le Maréchal libyen au cours d'une rencontre retransmise par une télévision locale.

Si les propos ont bien été prononcés le 8 septembre, à en croire la télévision Al Jazeera qui les ont relayés, l'absence de marqueurs temporels dans le discours du Libyen ne permet pas de dater, avec précision, les faits en question.

Par ailleurs, aucune réaction officielle algérienne n'a filtré pendant le week-end, jusqu'à un échange téléphonique, révélé, lundi matin, entre les deux chefs de la diplomatie algérienne et libyenne, à l'initiative de celui-ci, qui s'est désolidarisé des « déclarations irresponsables » de Haftar.

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En revanche, l'indignation était à son comble, le week-end dernier, dans les médias et sur les réseaux sociaux d'Algérie. On reprochait à cette déclaration son caractère «incongru» du fait notamment que l'Algérie est partie prenante à la résolution de la crise libyenne, conjointement avec l'Égypte et la Tunisie.

Le premier site francophone algérien, TSA, considérait ainsi que les libertés prises par le Maréchal libyen avec Alger témoignent du récent délitement de leurs rapports. En décembre 2016, le maréchal libyen se serait vu opposer une fin de non-recevoir, alors qu'il réclamait des Algériens un soutien face à ses adversaires de Tripoli, avance le journal. Depuis, c'est le début d'une campagne de dénigrement contre le voisin de l'Ouest.

«Quant au bien-fondé de l'incursion qu'il dénonce, il faudra attendre la réaction de notre ministère des Affaires étrangères pour savoir s'il s'agit d'une affabulation, un malentendu, un acte isolé ou une action dictée par quelque urgence sécuritaire aux frontières, comme une tentative d'introduction d'armes par des groupes terroristes», poursuit le journal algérien, avant le démenti implicite apporté, lundi, par le Ministre algérien des Affaires étrangères qui insistait sur « le respect de la souveraineté » de la Libye.

Selon des rapports de presse, l'armée algérienne dispose de quelque 40.000 militaires positionnés tout au long de ses frontières avec la Libye. Aucune information officielle ou officieuse n'a fait état, jusque-là, d'opérations menées par les Algériens sur le sol libyen. Une absence d'opérations extérieure qui serait d'ailleurs la simple application d'une doctrine militaire algérienne immuable, nonobstant les moyens dont dispose l'Armée nationale populaire (ANP) ou les dangers pullulant à ses portes sahéliennes. Un principe qui n'a consenti que deux entorses historiques, contre les Israéliens, aiment à rappeler les officiels algériens. En 1967, la fin de la guerre des Six Jours a acculé les troupes algériennes envoyées par le président Houari Boumediene à un retour au bercail. En 1973, toutefois, l'armée algérienne a largement participé aux combats, de façon souvent décisive.

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Au niveau de la classe politique, la réaction du président du parti MSP (Mouvement de la société pour la Paix, islamiste), Abderrazzak Makri, s'est distinguée par sa virulence. L'homme qui s'était vu recadrer par l'armée, il y a quelques semaines, pour lui avoir suggéré d'intervenir dans le jeu politique, estimait, cette fois-ci que la déclaration de Haftar était «insultante». La virulence de Makri serait à corréler, également, au fait que Haftar, «soutenu par les Émiratis et les Égyptiens», se positionne contre sa famille politique, les Islamistes.

Quant aux internautes, ils se sont largement inspirés de l'actualité algérienne pour asséner des flèches bien senties à l'outrecuidant maréchal. La campagne de limogeage de hauts cadres militaires et sécuritaires, toujours en cours en Algérie, devrait ainsi se poursuivre pour toucher Khalifa Haftar lui-même, imagine ainsi cet internaute, rappelant ainsi que le Maréchal libyen n'est pas un homologue du Président algérien.

​Dans la suite des mouvements dans les chefs de région de l'armée, Bouteflika limoge le maréchal Haftar.

​Le caricaturiste Ghilas Aïnouche a imaginé, quant à lui, que les forces commandées par Haftar s'attaquent à l'Algérie, et qu'en réaction, l'ANP raye la Libye de la carte. Un sens de l'humour qui ne sera pas forcément du goût de tous les Libyens.

Toujours dans la même veine, le site satirique d'informations «El Manchar» suggère qu'une centaine de «parkingueurs» (jeunes chômeurs, réputés violents, s'autoproclamant gardiens de parkings pour racketter les conducteurs en Algérie) suffiront pour calmer les ardeurs guerrières du maître de Benghazi.

​D'autres enfin, proposeront des tirs de pastèques (dont une rumeur fait un point de départ du choléra en Algérie) au lieu des roquettes, pour contre-carrer les menaces de l'homme fort de l'Est libyen.

​La déclaration de Khalifa Haftar s'inscrit dans un contexte de regain de tension en Libye, alors que la communauté internationale table sur des élections générales pour repêcher ce pays d'Afrique du Nord du chaos dans lequel il patauge depuis la chute de Mouamar Kadhafi, en 2011, à la suite d'une contestation populaire, soutenue par une coalition militaire de l'OTAN.

Depuis, le pays est partagé en deux centres de pouvoir. À l'est, à Tobrouk, siège le parlement élu par la population locale. À l'ouest, dans la capitale Tripoli, se trouve le gouvernement d'entente nationale dirigé par Fayez el-Sarraj, formé avec le soutien de l'Onu et de l'Europe.
Les autorités de l'est agissent indépendamment de Tripoli et coopèrent avec l'Armée nationale libyenne du maréchal Khalifa Haftar, qui mène une guerre d'usure contre les djihadistes.

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