ALENA 2.0: «le nouvel accord présente peu d'avantages» pour le Canada

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Le nouvel accord commercial nord-américain annoncé le 30 septembre pourrait entrer en vigueur d’ici fin novembre. Gilles Breton, président du conseil d’administration de l’Association d’affaires Canada Russie Eurasie, s’est confié à Sputnik sur les possibles conséquences de la conclusion de ce traité pour l’économie canadienne.

Le nouveau traité nord-américain de libre-échange AEUMC (Accord États-Unis-Mexique-Canada) dont le texte a été finalisé le 30 septembre après plus d'un an de négociations entre Washington et Ottawa «présente peu d'avantages nouveaux» pour le Canada, a déclaré Gilles Breton, président du conseil d'administration de l'Association d'affaires Canada Russie Eurasie, interrogé par Sputnik. Bien que le gouvernement canadien ait réussi à inscrire dans ce texte certaines règles commerciales qu'il tient à sauvegarder, il a été obligé de faire certaines concessions.

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Le secteur laitier pourrait subir les conséquences les plus tangibles de la conclusion de l'AEUMC. Si le nouveau traité est signé, les producteurs américains auront la possibilité de vendre une certaine quantité de lait sur le marché canadien sans payer une taxe de 300% comme aujourd'hui. Il est à noter qu'une grande partie de la production laitière du pays est concentrée au Québec. 

«Le problème avec les dispositions qui permettent aux États-Unis d'avoir un meilleur accès au marché canadien du lait est qu'elles s'ajoutent aux mesures similaires déjà convenues dans le cadre d'accords commerciaux avec l'Union européenne et les pays de la région du Pacifique», indique M.Breton, interrogé sur les concessions faites par le gouvernement canadien.

Par ailleurs, ce traité pourrait remettre en cause le système de gestion de l'offre instauré au Canada en 1972 afin de protéger l'agriculture canadienne des importations. 

«Le nouvel accord soulève des questions sur la viabilité à long terme du système de gestion de l'offre qui caractérise les secteurs des œufs, de la volaille et des produits laitiers au Canada. Ces questions sont politiquement très sensibles et ont également des implications sociales majeures», a précisé M.Breton.

Les perspectives de la signature d'un nouveau traité préoccupent d'ores et déjà les agriculteurs canadiens. Le président de l'organisation Les producteurs laitiers du Canada, Pierre Lampron, tire la sonnette d'alarme concernant cette nouvelle mesure. Selon lui, une fois le nouvel accord en vigueur, «les importations prendront environ 18 % du marché canadien». 

Néanmoins, Gilles Breton indique qu'il est très probable que le mécontentement des agriculteurs n'influence pas la volonté du gouvernement de signer cet accord.

«En fin de compte, s'il est disposé à supporter les conséquences politiques d'une telle action, le gouvernement peut aller de l'avant avec l'accord malgré les objections des producteurs agricoles», résume-t-il.

La guerre de l'acier et de l'aluminium toujours en cours

De plus, Gilles Breton indique qu'une question aussi cruciale que celle des droits de douane imposés sur l'acier et l'aluminium en provenance du Canada n'est pas réglée par le traité AEUMC.

«Le nouvel accord présente peu d'avantages nouveaux […] Il convient de noter que le nouvel accord ne couvre pas les droits de douane américains imposés récemment sur l'acier et l'aluminium. Ces problèmes devront être résolus séparément. Il en va de même pour les différends entourant le commerce du bois d'œuvre», résume M.Breton.

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Le 11 octobre, Reuters a fait savoir en se référant à deux sources informées qu'Ottawa ne comptait pas sur la levée rapide des droits de douane américains. En tant que mesure de riposte, le gouvernement canadien a annoncé mardi l'introduction à partir du 25 octobre de taxes de 25% sur sept catégories d'acier dans le cas où les importations de ses partenaires commerciaux excèderaient «les normes historiques».

Conserver le système de commerce nord-américain à tout prix

Le principal avantage que le Canada peut tirer de ce nouveau traité est le maintien du système de commerce nord-américain basé sur des règles déjà appliquées, estime Gilles Breton.

«Le Canada a essentiellement réussi à sauvegarder les principaux acquis en matière de commerce nord-américain de produits manufacturés ainsi qu'en ce qui concerne les mécanismes de règlement des différends. Ces points sont d'une importance cruciale, en premier pour l'économie en général, ensuite pour la continuation du commerce fondé sur des règles», précise-t-il.

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Le gouvernement canadien a insisté sur le maintien du chapitre 19 de l'ALENA qui permet aux entreprises de s'adresser aux arbitres indépendants afin de résoudre les différends. Auparavant, Donald Trump s'était opposé à cette disposition en indiquant qu'elle portait atteinte à la souveraineté des États-Unis.

M.Breton indique que le maintien des règles de commerce nord-américain a une grande importance pour le Canada puisque les États-Unis sont toujours son premier partenaire commercial.

«La question de la diversification des échanges commerciaux du Canada revient régulièrement à l'ordre du jour, en particulier lorsque nos relations commerciales avec les États-Unis rencontrent des difficultés… La diversification des échanges commerciaux canadiens, grâce à l'ouverture de nouveaux marchés dans la région de l'Eurasie, est l'un des principaux objectifs à long terme de l'Association des milieux d'affaires Canada Eurasie-Russie», conclu-t-il.

La nécessité de négocier un nouvel accord de libre échange est devenue évidente après l'arrivée au pouvoir de Donald Trump qui a qualifié l'ALENA (l'Accord de libre-échange nord-américain) de «pire accord jamais conclu». Afin d'entrer en vigueur, le traité AEUMC doit être signé par le Canada, les États-Unis et le Mexique d'ici fin novembre. 

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