Pourquoi les Saoudiens ont appris le russe avant la visite de Poutine

© Sputnik / Accéder à la base multimédiaVladimir Poutine en Arabie saoudite, 2019
Vladimir Poutine en Arabie saoudite, 2019 - Sputnik Afrique
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La visite d’État du Président russe en Arabie saoudite restera dans les annales non seulement pour ses aspects exotiques (la voiture du Président russe accompagnée par la garde à cheval; l'encens brûlé dans la salle avant les réunions; un rapace en cadeau) mais aussi par les accords signés.

A Riyad, on avait réservé à Vladimir Poutine un accueil pratiquement royal: coups de canon à l’aéroport, cavaliers escortant sa limousine Aurus, fanfares et «Bienvenue» en russe au palais présidentiel.

Le roi Salmane ben Abdelaziz Al Saoud attendait Vladimir Poutine au palais. La queue pour les salutations s'est étendue dans toute la salle, et les leaders ont échangé des poignées de main avec certains membres des délégations. Si les hommes de la délégation russe portaient un habit traditionnel pour ces visites - un costume-cravate strict - les femmes étaient obligées de respecter le protocole local: la Ministre de la Santé Veronika Skvortsova portait un voile noire. 

Dans la Salle bleue, où l'on avait brûlé beaucoup d'encens avant l’arrivée du roi et du Président, ces derniers étaient attendus par au moins une cinquantaine de personnes - des représentants des milieux d’affaires, du pouvoir et de la société des deux pays. Les hôtes ne se sont pas vu offrir des sucreries orientales, mais des chocolats avec les drapeaux de la Russie et de l’Arabie saoudite.

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Suite à toutes les cérémonies officielles, nécessaires compte tenu du statut de la visite, les invités se sont dirigés vers la réception donnée au nom du monarque saoudien. Cet événement s’est déroulé à huis clos, mais le public en a toutefois appris quelques détails. On a servi sept plats, notamment «une farandole de hors-d’œuvres froids et chauds, saumon salé et asperge verte sous sauce balsamique, blanc de poulet farci de légumes avec safran et curcuma», ou encore «filet de bœuf de Kobe (une variété japonaise de viande persillée) avec des petites carottes et des pommes de terre rôties sous sa sauce à l’orange». Les journalistes ont tout de suite calculé que ce bœuf coûtait en Russie au moins 140 euros le kilo.

Au moment de l’échange des cadeaux, Vladimir Poutine a transmis au roi saoudien un faucon gerfaut du Kamtchatka. «Très efficace», a souligné le Président russe. Il a expliqué qu’on créait au Kamtchatka un centre spécial d’élevage de ces oiseaux de chasse. Une source de la délégation russe avait précisé à Sputnik que c’était une jeune femelle nommée Alfa, mais que les Saoudiens pouvaient rebaptiser l’oiseau.      

Le Président et le roi se sont rendus à la partie publique des négociations en voiture électrique.

L’attrait du capital saoudien

Vladimir Poutine a exprimé sa satisfaction vis-à-vis de la coopération entre Moscou et Riyad sur le marché énergétique international.

«L’implication active de nos pays a permis de prolonger les ententes au format OPEP+ concernant la réduction des volumes de production de pétrole. Toute notre coopération vise le renforcement de la paix et de la sécurité dans la région, la stabilisation de la situation dans le secteur énergétique mondial, tout cela porte de bons fruits, des fruits positifs», a souligné le chef de l’État russe lors de sa rencontre avec le prince héritier Mohammed ben Salmane.

En évoquant la coopération politique, le Président russe a indiqué que Moscou et Riyad se prononçaient conjointement «pour la lutte contre la menace terroriste, pour le règlement politique et diplomatique durable des crises au Moyen-Orient et en Afrique du Nord». La Russie voit et apprécie grandement les efforts personnels du prince héritier visant le renforcement de tous les aspects du partenariat.

Le Président russe a rappelé la croissance des échanges bilatéraux, ainsi que les investissements planifiés dans l’économie russe par l’Arabie saoudite en partenariat avec le Fonds russe des investissements directs pour la somme totale de 10 milliards de dollars. Selon Vladimir Poutine, les parties ont également conclu des «ententes sur de nouvelles initiatives impliquant un capital saoudien».

Parmi les documents signés, on peut notamment noter qu'un consortium d’investisseurs internationaux devrait créer une entreprise de leasing d’avions de ligne en Russie (le volume des investissements dépasse 600 millions de dollars). Le consortium a également concerté des documents contraignants sur l’acquisition à Rosnano de 30,76% de l’entreprise Novomet, un des leaders dans la production d’équipements pétroliers en Russie et dans le monde. Le fonds souverain saoudien Public Investment Fund rejoindra les investissements de l’opérateur ferroviaire russe Neftetransservis à hauteur de 300 millions de dollars.

Qui plus est, on a signé en présence du roi et du Président les mémorandums sur l’élargissement mutuel des exportations de produits agricoles, ainsi que la Charte de coopération des pays producteurs de pétrole, le protocole de coopération entre les ministères de l’Énergie et le mémorandum sur la simplification de l’octroi des visas aux citoyens des deux pays.

Parmi d’autres textes, il faut souligner la volonté de coopérer dans le domaine des vols spatiaux habités et du système de navigation global GLONASS. Moscou et Riyad commenceront également à travailler sur un accord concernant la protection bilatérale des investissements.

Le bilan de la visite «historique»

Vladimir Poutine a considéré les négociations comme «absolument constructives et concrètes». Selon le Président, l’Arabie saoudite est l’un des principaux partenaires économiques de la Russie, alors que le Conseil économique bilatéral offre des opportunités excellentes en matière de dialogue direct entre les entrepreneurs des deux pays.

«Cette visite est historique dans le sens où elle se déroule pour la première fois pendant le second mandat présidentiel de Vladimir Poutine et reflète le passage au niveau supérieur de nos relations», a fait remarquer le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. 

le prince Mohammed Ben Salmane et le président russe Vladimir Poutine - Sputnik Afrique
Poutine arrive en Arabie saoudite pour une visite «historique» 12 ans après sa première venue
Le président tchétchène a été le plus éloquent.

«Aujourd’hui est un grand jour dans les relations entre la Russie et le Royaume d’Arabie saoudite. Je suis reconnaissant à Vladimir Poutine de m'avoir inscrit dans la délégation visitant l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis», a-t-il écrit sur Telegram. Il est certain que «cet événement historique» favorisera le renforcement et l’élargissement futurs de la coopération mutuellement avantageuse des deux pays. 

Alexeï Khlebnikov, expert du Conseil russe pour les affaires internationales, a indiqué à Sputnik que la chute des prix du pétrole en 2014-2015 avait été un encouragement notable pour l’amélioration des relations russo-saoudiennes. Selon lui, Riyad a décidé à l’époque de se focaliser sur des sujets plus prometteurs: «Il s’agit des intérêts politiques, des affaires. Rien de personnel». Dans tous les cas, on ne sait toujours pas si tout cela se soldera par des contrats concrets.

Le leader russe a emmené avec lui en Arabie saoudite une grande délégation d'hommes d’affaires russes.

«On a évoqué la participation des entreprises russes au projet saoudien "Vision 2020", ce qui est important, explique Grigori Kossatch, professeur de la faculté d’histoire, de politologie et de droit de l’Université d’État des sciences humaines de Russie. Les entrepreneurs russes s’intéressent aux questions liées aux ventes d’actions par l’Arabie saoudite».

La coopération militaire et technique a été l’un des thèmes principaux du sommet.

«La Russie propose activement ses systèmes antiaériens afin de prévenir les frappes contre les sites pétroliers, souligne Grigori Kossatch. Mais les négociations traînent toujours en longueur. Cela s’explique par le fait que les Saoudiens considèrent les États-Unis comme la source principale d’armes, et il sera très difficile de surmonter cet obstacle».  

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