Dimanche 5 janvier, Emmanuel Macron s’est entretenu avec Donld Trump, lui faisant part de «son entière solidarité avec nos alliés». Dans son communiqué, l’Élysée indique aussi que le Président de la République aurait «exprimé» au locataire de la Maison-Blanche «sa préoccupation concernant les activités déstabilisatrices de la force Al Qods sous l’autorité du général Qassem Soleimani». Une position cohérente avec le communiqué commun de Paris, Londres et Berlin, qui se disent «gravement préoccupés par le rôle négatif joué par l’Iran dans la région».
En revanche, elle tranche avec celle qu’il avait adoptée lors de son entretien le 3 janvier dernier avec Vladimir Poutine. Les deux chefs d’État avaient alors appelé «toutes les parties à la retenue», une recommandation que l’on trouve aussi dans le document des chancelleries européennes: «Nous appelons toutes les parties à agir avec retenue et responsabilité».
Samedi, Jean-Yves le Drian s’entretenait notamment avec son homologue allemand quant à la préservation de l’accord de Vienne, un point sur lequel il avait déjà échangé vendredi avec le secrétaire d’État Mike Pompeo.
«On place, en effet, la responsabilité première de la situation sur l’Iran et on lui demande, en pointillé, d’être raisonnable pour deux», réagit auprès de Sputnik François Nicoullaud, ancien ambassadeur de France en Iran (2001-2005).
«Les Européens, quand on voit la situation syrienne notamment, considèrent que l’Iran joue un rôle négatif. C’est une position constante, on ne peut pas s’étonner qu’ils la rappellent», souligne François Nicoullaud.
Pour ce dernier, plus qu’une éventuelle coordination des Occidentaux sous la bannière de l’Otan, il s’agit avant tout pour les Européens de «ne pas se couper des Américains» afin de «maintenir le dialogue» avec tous et d’aller à terme vers une désescalade, bien qu’il concède qu’
«Il y a effectivement, il faut bien le dire, une forme de censure entre Européens: on ne peut pas critiquer, on ne peut pas attaquer les États-Unis, mais il est vrai que dans cette circonstance cela ne servirait à rien d’émettre une critique à l’égard des États-Unis.»
Une ligne qui tranche avec celle de la Russie et de la Chine. Dans la foulée de l’attaque américaine, Moscou avait été la première capitale à réagir, en présentant ses «sincères condoléances au peuple iranien». Du côté de Pékin, on appelait «toutes les parties concernées» à la retenue, «en particulier États-Unis». Ces deux membres du Conseil de sécurité ont également vivement réagi lorsque Donald Trump a haussé le ton face aux Iraniens, menaçant de frapper 52 sites culturels (en référence aux 52 otages de la crise de l’ambassade américaine débutée en 1979) en cas de riposte de leur part à l’assassinat de leur général.
Pointer du doigt l’Iran pour apaiser les États-Unis, bien qu’un tel procédé «soit peu glorieux», cela permettrait de «joue [r] l’apaisement», selon François Nicoullaud.
«Il faut essayer de garder le contact avec tout le monde et effectivement, compte tenu de l’état d’excitation intellectuelle qui règne aux États-Unis, notamment chez Monsieur Trump, on n’a pas intérêt à émettre des propos qui seraient provocateurs», estime l’ancien ambassadeur français.
Même son de cloche du côté de l’ancien ambassadeur français aux États-Unis, Gérard Araud, qui s’était illustré en novembre 2016 pour avoir fait part de son opinion très tranchée quant au résultat de l’élection présidentielle américaine. Également dans Le Point, L’assassinat ciblé par les États-Unis du général Qassem Soleimani serait une «élimination qui, en elle-même, ne saurait susciter aucun regret», estime l’ex-diplomate: les Iraniens «comprennent maintenant leur erreur» pour avoir provoqué l’Oncle Sam… à 10.000 kilomètres de chez-lui.
Quoi qu’il en soit, pour l’heure, Donald Trump ne décolère pas. Après un vote au Parlement irakien, réuni dimanche en session extraordinaire, réclamant l’expulsion des troupes de la coalition internationale présentes en Irak sous commandement du Pentagone, le Président américain a menacé Bagdad de sanctions et Téhéran de représailles majeures.