Un député européen: «l’Europe est plus préoccupée de sauver l’économie que de sauver la santé des gens»

© AFP 2023 Vasily MaximovLe député de l'Assemblée nationale française Thierry Mariani lors d'un point presse organisé dans le cadre du "Dialogue franco-russe" à Moscou, le 11 septembre 2014
Le député de l'Assemblée nationale française Thierry Mariani lors d'un point presse organisé dans le cadre du Dialogue franco-russe à Moscou, le 11 septembre 2014 - Sputnik Afrique
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L’Organisation mondiale de la santé, critiquée pour sa gestion des tests cliniques sur la chloroquine, vient de les ré-autoriser. Thierry Mariani, député européen, décrypte le fonctionnement de l’OMS lors de la crise du Covid-19 au micro de Sputnik.

Le grand public assiste, interdit, à une série de voltes-faces de la part de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui a annoncé le 3 juin dernier la reprise d’essais cliniques sur l’hydroxychloroquine en vue de trouver un traitement du Covid-19, après les avoir suspendus suite à la publication d’une étude parue dans The Lancet, alors qu’elle les avait au préalable autorisés face à l’ampleur de la pandémie.

Au micro de Sputnik, Thierry Mariani, député européen (RN), considère que «la revue la plus importante» du monde scientifique publie un «article absolument pas sérieux».

La réponse européenne face au Covid-19

Mis à part le côté purement scientifique, le député européen fait la remarque que «l’OMS a eu une réaction assez contestable pendant la crise».

«Sans être complotiste, on a le droit de se poser des questions : pourquoi tant de revirements? L’OMS a eu une politique totalement brouillonne. Surtout, il y a certainement de gros intérêts en jeu en ce moment. L’Europe est totalement absente, parce qu’on voit bien que ce ne sont que les jeux des laboratoires médicaux», remarque Thierry Mariani.

Hydroxychloroquine - Sputnik Afrique
Le coordinateur de l’étude du Lancet sur l’hydroxychloroquine fait son mea culpa
L’homme politique soulève également plusieurs problèmes de l’Europe dans un certain nombre de secteurs chargés de la recherche et rappelle qu’au moment très tendu de la crise sanitaire, Mauro Ferrari, le responsable de la recherche en Europe a démissionné, «déçu» par le rejet de sa stratégie face au Covid-19 par le conseil scientifique du Conseil Européen de la Recherche (CER).

L’incertitude sur l’utilisation de chloroquine demeure

Le député européen suppose que la science subit des pressions financières: «avec ce qu’il s’est passé avec l’étude, cela me semble évident», glisse-t-il. Mais la valse des revirements dans les positions et des déclarations autour du coronavirus le laisse perplexe, puisque «on n’est plus sûrs de rien». Un exemple parmi d’autres: depuis le début de la crise, «on a expliqué en France que les enfants sont des porteurs dangereux, depuis deux jours, on explique que c’est totalement faux».

«Sur les médicaments ça change très souvent. La vraie question: pourquoi y a-t-il eu cette étude dans The Lancet totalement orientée? » s’interroge Thierry Mariani.

Une autre remarque de l’homme politique, qui rappelle «ne pas être médecin», est que «les théories du professeur Raoult gênent visiblement beaucoup de monde».

«Est-ce que les laboratoires ne sont pas en train de demander des aides financières pour un médicament qui existe déjà?» questionne M.Mariani.

Olivier Véran, archives  - Sputnik Afrique
Olivier Véran écrit à The Lancet au sujet de l'étude controversée sur l’emploi de l'hydroxychloroquine
Une des raisons de cette supposition réside dans la réflexion que de «plus en plus de Français» se font quant à «l’endroit qui a moins de moyens et où les gens vivent dans la promiscuité : en Afrique», pourtant beaucoup moins touchée que l’Europe. Pour le député, étant donné que sur le continent africain «la population a pour habitude d’utiliser la quinine», cela peut éventuellement être un témoignage que la théorie du professeur Raoult de soigner la maladie Covid-19 avec ses déclinaisons contemporaines est bien fondée.

L’efficacité des institutions européennes mise en doute

À la mi-mai, le comité de progrès technique (composé de la Commission et des experts des États membres) a classé le Covid-19 dans la liste des risques liés à l’exposition à des agents biologiques «en tant que risque 3» sur une échelle de quatre. Laissant les syndicats qui voulaient placer le coronavirus dans le groupe le plus risqué éclaircir ce sujet avec la Commission européenne, l’homme politique formule une reproche plus importante: «les institutions européennes ont été extrêmement inefficaces pendants cette crise».

«Le grand slogan lors de la dernière élection européenne était «l’Europe nous protège». On s’aperçoit que dans cette crise l’Europe ne protège rien du tout, insiste Thierry Mariani. Dans cette crise, c’était chacun pour soi. Dans cette crise, il n’y a pas eu de réponse européenne.»

Didier Raoult - Sputnik Afrique
Pour Didier Raoult, l'étude de The Lancet a été faite par des Pieds nickelés
L’homme politique attire l’attention sur le fait que, bien que l’Europe se défende en prétendant que la protection de la santé n’est pas dans ses compétences, «il existe quand même un commissaire chargé de la santé et on ne l’a jamais entendu».

«L’appareil européen sur la santé a été déficitaire et n’a servi à rien. Il y a une réponse sur les entreprises (trop tôt encore pour dire si elle est bonne ou mauvaise). On voit que l’Europe est plus préoccupée de sauver l’économie que de sauver la santé des gens », conclut Thierry Mariani.

Effectivement, on a du mal à trouver les références aux prises de parole de Stélla Kyriakídou, commissaire européenne à la santé.

La réponse au Covid-19 «ne peut être que mondiale»

Pour Thierry Mariani, interrogé sur l’idée de créer une organisation européenne de santé en tant qu’alternative à l’OMS, «elle pourrait exister, mais le problème actuel est mondial».

Cet avis rejoint la position d’Emmanuel Macron qui a appelé à trouver «une réponse unie à la pandémie» le 18 mai dernier, lors de son discours à la 73e Assemblée mondiale de la Santé.

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Néanmoins, pour le député européen, «le fonctionnement de l’OMS est à revoir», puisque le virus «vient de Chine», tout comme certaines pandémies –la grippe de Hong-Kong, le Sras– «prenaient leur source en Asie».

«La réponse sur les épidémies ne peut être que mondiale. La question qui reste: est-ce que l’OMS peut être efficace?» s’interroge Thierry Mariani.

En énumérant d’autres problèmes du monde actuel, tels que la protection de l’environnement ou le changement climatique, le député assure que «tout comme pour le climat, la réponse européenne pour les épidémies est sympathique mais n’est pas suffisante».

«La vraie question n’est pas "Qu’est-ce qu’on fait avec l’Union européenne pour la santé?", la vraie question au niveau européen: "Qu’est-ce qu’on fait de l’OMS?" Peut-on la transformer en quelque chose d’efficace, ou Trump a raison et il faut arrêter de la subventionner?» conclut Thierry Mariani.
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