Après l’Alpha et le Delta, voici venu le variant Lambda: faut-il encore crier au loup?

© AP Photo / Xiao YijiuDes malades du Covid-19 dans un hôpital à Wuhan
Des malades du Covid-19 dans un hôpital à Wuhan - Sputnik Afrique, 1920, 07.07.2021
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Alors que la France peine à vacciner toute sa population, l’apparition du variant Lambda sur le sol européen suscite quelque inquiétude. Potentiellement plus contagieux et plus résistant, son hypothétique propagation rappelle celle du variant Delta, aujourd’hui en passe de remplacer le variant britannique, en France comme en Grande-Bretagne.

Détecté pour la première fois au Pérou, le variant Lambda est aujourd’hui responsable de 82% des cas de contamination dans le pays en mai et juin. Identifié en Europe, le variant inquiète aujourd’hui certains chercheurs britanniques. Pour le directeur du Covid-19 Genomics Initiative interrogé par Skynews, il présenterait un «ensemble de mutations plutôt inhabituel par rapport à d’autres variants.» Il serait en effet plus contagieux que les variants Gamma et Alpha, c’est-à-dire le brésilien et le britannique. Au risque de remplacer les autres variants en compétition sur le continent européen.

​Un scénario qui rappelle mot pour mot celui annoncé il y a quelques mois lors de l’apparition du variant Delta en Europe. Depuis, ce dernier est en passe de devenir majoritaire en Grande-Bretagne comme en France, où il représente respectivement 97% au 3 juillet et 30% au 5 juillet des nouvelles contaminations. Sans pour autant avoir entraîné une flambée d’hospitalisations et de formes graves dans ces deux pays. En cause, vraisemblablement, les effets de la couverture vaccinale. Le variant delta s'avérerait aussi 19 fois moins létal (pourcentage de décès par rapport au nombre de patients touchés) que son prédécesseur anglais, selon les données du ministère britannique de la Santé.

«Variant à suivre»

Pour sa part, le variant Lambda appartient à la lignée C37 du SARS-CoV-2 qui circule en Amérique du Sud. Identifié pour la première fois au Pérou en décembre 2020, il a depuis quitté son foyer épidémique pour s’implanter dans une trentaine de pays d’Europe, comme le Royaume-Uni ou l’Allemagne. En France, selon le site Gisaid, quelques cas auraient également été détectés. Dans sa nouvelle liste du mois de juin, l’OMS classe cette nouvelle mutation dans la catégorie «variant à suivre», classification qui précède celle de «variant préoccupant» à laquelle appartiennent les variants Alpha et Delta. Malgré le manque d’études disponibles à l’heure actuelle, le variant pourrait s’avérer plus contagieux que ces deux derniers.

​Dans le Financial Times, on peut lire que la mutation nommée L452Q, proche d’une autre mutation propre au variant Lambda témoigne d’une grande infectiosité. Les données sur le site MedRxiv d’une étude prépubliée menée au Chili concluent également à une plus forte contagiosité du variant en comparaison de ses deux cousins qui se disputent actuellement le territoire européen. L’étude conclut aussi à une neutralisation du virus par le vaccin chinois CoronaVac bien moins efficace.

«Ces données renforcent l’idée que les campagnes de vaccination doivent s’accompagner d’une surveillance génomique stricte pour identifier les mutations d’intérêt de la protéine Spike», concluent les auteurs chiliens de l’étude.

Une contagiosité qui inquiète au regard de la situation sanitaire au Pérou. Pour le professeur Tsukayama, docteur en microbiologie moléculaire à l’Université Cayetano Heredia de Lima, depuis les 200 infections répertoriées en décembre la situation est devenue incontrôlable. «À la fin du mois de mars, il représentait la moitié de tous les échantillons prélevés à Lima. Maintenant, trois mois plus tard, nous examinons plus de 80% de toutes les infections à l’échelle nationale», ajoute-t-il. On se souvient qu’en France, au 1er mai, le variant Delta ne représentait que 0,1% des nouveaux cas Covid en France, quand deux mois plus tard, il taquine les 30%.

Les vaccins à ARN messager face aux nouveaux variants

À l’heure actuelle, et malgré les inquiétudes des autorités sanitaires anglaises et françaises, le variant Delta se confronte au mur de la vaccination. Et ce malgré les nouvelles contaminations qui n’épargnent pas les vaccinés. Sur les 81.000 infections au variant Delta enregistrées au Royaume-Uni jusqu’au 21 juin, 66,4% des contaminés n’étaient pas vaccinés. Seuls 8,9% avaient reçu les deux doses. Enfin, les cas de formes graves et les décès chez cette portion limitée d’individus se trouvent statiquement peu nombreux. Quid du variant Lambda? Les études manquent pour connaître la résistance des anticorps neutralisants des vaccins face à cette nouvelle mutation du SARS-CoV-2.

Un centre de vaccination - Sputnik Afrique, 1920, 29.06.2021
Pourquoi le variant Delta progresse-t-il dans le monde face à des populations vaccinées?
Au Royaume-Uni, la Public Health England (PHE) avait déjà signalé de son côté «un potentiel de transmissibilité accrue ou une possible résistance accrue aux anticorps neutralisants» lorsqu’une poignée de cas causés par le virus Lambda avaient été détectés dans le pays. Précisant que des études supplémentaires étaient nécessaires. L’étude chilienne citée plus haut a observé de son côté une moindre résistance du vaccin chinois, qui n’est pas basé sur la technologie d’ARN messager, laissant ouvert le débat sur les effets des autres vaccins munis de cette innovation sur le variant Lambda.

Une étude publiée le 3 juillet par l’école de médecine Grossman de l’Université de New York suggère elle que les vaccins ARN messager sont en fait efficaces contre cette nouvelle mutation. Comme celle de l’Université du Chili, l’étude est néanmoins à prendre avec des pincettes, car elle n’a pas encore été examinée par les pairs. 

Les mois qui suivront devraient donc renseigner les chercheurs et les autorités sanitaires sur la dynamique de ces variants. Pour Sputnik, le virologue Étienne Decroly faisait remarquer au moment des menaces au sujet du variant indien que «les mêmes causes produisent les mêmes effets».

«Pour l’instant, le variant dominant sur notre territoire est le variant anglais et il persiste toujours. Tout est une question d’équilibres, entre la pression des anticorps, la capacité de reconnaître correctement le récepteur, le pouvoir infectieux […] Il n’y a pas beaucoup, à l’heure actuelle, de ce variant en France, mais s’il présente un avantage sélectif important, il pourrait se propager», concluait le virologue.

Un raisonnement qui s’applique donc aussi bien au variant Delta qu’au Lambda. La guerre des variants n’est donc pas prête de prendre fin.

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