Dix ans de guerre: où la tentative de coup d'État a-t-elle mené la Syrie?

© Sputnik . Mikhaïl Voskresenski / Accéder à la base multimédiaUn quartier détruit près de la citadelle d'Alep
Un quartier détruit près de la citadelle d'Alep - Sputnik Afrique, 1920, 18.03.2021
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Dix ans de conflit ont fait d’une Syrie prospère un pays dévasté et détruit. Alors que la guerre n’est toujours par terminée, il faudra encore des années avant que le pays soit reconstruit. Retrouvez les témoignages de ses habitants, recueillis par Sputnik, qui montre à quoi a mené cette tentative de coup d’État il y a une décennie.

Vendredi 18 mars 2011 a été un jour fatidique pour tous les Syriens. C'est ce jour-là, il y a 10 ans, qu'ont débuté les manifestations de masse qui ont ensuite conduit au déclenchement de la guerre civile, avec le parrainage de nombreux pays occidentaux, ainsi que des monarchies du Golfe.

Le même jour, la chaîne qatarie Al-Jazeera, qui a été le principal porte-parole des événements des printemps arabes, a qualifié le gouvernement de Bachar el-Assad de «régime», le considérant ainsi comme un chef d'État illégitime.

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Puis, les événements ont évolué de manière rapide et effrayante: affrontements armés, tentatives de renversement du gouvernement d'Assad, nombre croissant de destructions et de victimes. La même instabilité et la même fragilité de la situation ont permis aux terroristes de s'établir en Syrie, qui ont failli créer un quasi-État en 2015. C'est l'aide russe, sollicitée par Damas à l'automne 2015, qui a pu stopper la catastrophe qui prenait de l'ampleur.

Dans le même temps, devant l'envergure de ce désastre grandissant, l'UE, les États-Unis et la plupart des pays arabes se sont opposés au gouvernement de Bachar el-Assad: peu de gens croyaient qu'il serait en mesure de conserver le pouvoir et de reprendre le contrôle des territoires où se déroulait une véritable guerre.

Jusqu'où la tentative de coup d'État a-t-elle conduit la Syrie? Dans quelle mesure la perception des Syriens de ces événements a-t-elle changé depuis toutes ces années? Les Syriens eux-mêmes, se rendent-ils compte de l'ampleur des dégâts causés à leur pays? Voilà ce qu'ont décrit à Sputnik des habitants de plusieurs grandes villes de Syrie.

«Au lieu de la liberté d'expression, nous avons obtenu la faim»

«Nous sommes en guerre depuis 10 ans et nous n'arrivons toujours pas à mettre de l'ordre dans le pays. Tout a commencé lorsqu'un certain groupe de personnes a voulu se réveiller un jour et vivre comme en France ou en Grande-Bretagne. On voulait plus de liberté d'expression et on a fini par la famine. Et maintenant, 10 ans plus tard, il paraît tout à fait normal de se promener avec des armes dans la rue. Nous nous sommes habitués à voir des policiers militaires et des soldats dans les rues, nous nous sommes habitués aux explosions et aux meurtres.

Au lieu de la démocratie, nous avons des fondamentalistes sur notre territoire qui commettent des meurtres brutaux au nom de l'islam. Reste à savoir pourquoi.

Nous sommes tous musulmans ici, et nous n'avons jamais vécu en querelle avec les chrétiens. Au lieu d'un État fonctionnant normalement, nous ne parvenons pas à nous débarrasser de l'occupation américaine de nos territoires depuis 10 ans. Ils siphonnent nos richesses, tuent nos citoyens. Est-ce que cela est ce que voulaient ceux qui ont déclenché les émeutes il y a 10 ans? Aujourd'hui, nous avons connu un incroyable exode de nos citoyens: tout le monde sait qu'il y a des réfugiés syriens dans des dizaines d'autres pays du monde. Les bandits des Forces démocratiques syriennes ne veulent pas quitter notre territoire. C'est ainsi que notre pays a été détruit», raconte Rayed al-Raheel, un habitant du gouvernorat syrien de Hassaké, décrivant les 10 dernières années.

«Maintenant, nous n'avons rien, merci à l'Amérique»

«L'Amérique ne se bat ici que contre le peuple syrien. En conséquence, vous pouvez voir que nous n'avons pas d'essence, ni de fioul, ni de gaz, rien. Et tout ça à cause des actions des Américains. Regardez vous-même, nous n'avons même pas d'embouteillages sur les routes, car il n'y a rien pour remplir les voitures dans la ville. Et il n'y a pas de provisions dans les maisons. C'est la guerre américaine contre les Syriens», confie un habitant d'Alep, dont le nom a été délibérément pas communiqué.

Un autre habitant d'Alep, qui a souhaité rester anonyme, le rejoint, ajoutant:

«Malgré la catastrophe qui s'est produite pendant tout ce temps, le pays se remet, bien que lentement. Si Dieu le veut, ce cauchemar sera bientôt complètement derrière nous et les Syriens sortiront de la crise.»

«C'est dur, mais on va s'en sortir»

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«Sans aucun doute, au cours de la dernière décennie, notre situation est devenue extrêmement difficile. Les années d'avant-guerre semblent maintenant presque comme un paradis. Nous survivons toujours dans des conditions de grave crise économique, d’occupation partielle et d'autres problèmes sérieux. Mais il faut reconnaître qu'au cours des deux dernières années la situation a commencé à s'améliorer sensiblement, et cela se ressent dans notre région. Les gens sont devenus un peu moins désespérés par la situation, il est redevenu possible de gagner au moins un peu d'argent. Bien sûr, c'est encore très dur pour nous: toute cette lutte pour une "liberté" illusoire, qui nous a été imposée, n'en valait pas la peine. Les résultats sont désastreux. Mais je crois que nous, Syriens, nous en sortirons. Nous reconstruirons les décombres, nous reconstruirons l'économie, nous donnerons un traitement décent aux blessés de guerre. Il faut juste du temps. Ces sentiments sont ressentis dans toute la Syrie, en particulier ici à Hassaké», estime Khaled Khaddar, propriétaire d'un étal de marché à Hassaké.

«La vie continue»

«Vous savez, tout le monde connaît déjà les difficultés qui nous ont été infligées au cours de ces 10 années. Je voudrais dire une chose: malgré la catastrophe que nous vivons encore, malgré toutes les pertes du peuple syrien que nous avons subies, la vie continue. Nous y revenons peu à peu. Si Dieu le veut, nous irons mieux, nous sortirons de cet effondrement économique et social», lance Madinah al-Ahmad, directrice d'une école à Deraa, en Syrie.

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Même 10 ans après le début de la tragédie syrienne, l'Occident ne renonce toujours pas à exercer des pressions sur le gouvernement syrien légitime. Les sanctions brutales et le blocus économique continuent de paralyser l'économie épuisée de la Syrie. Les dommages irréparables sont surtout causés aux Syriens ordinaires, qui se retrouvent sans médicaments, sans pain ou au bord d'une catastrophe humanitaire.

À en juger par les dernières déclarations du département d'État et du Parlement européen, ils ne vont pas réduire la pression sur la Syrie et son gouvernement. Et cela malgré le fait qu'avec la médiation de la Russie, Damas a stabilisé la quasi-totalité du pays, à l'exception du gouvernorat d'Idlib, qu'il tente de mettre en place une politique non seulement intérieure mais aussi extérieure, qu'il entend organiser les élections législatives - en général, le gouvernement d'Assad est en train de stabiliser le pays, et ne laisse aucune condition préalable à son départ.

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