Le marché mondial attend le gaz liquide russe

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Par Vassili Zoubkov, RIA-Novosti

Une Conférence internationale représentative sur le gaz naturel liquéfié (GNL) s'ouvre le 17 décembre dans la ville américaine de Seattle.

Ce forum gazier envisagera les perspectives du développement de la branche dans le monde, des technologies pointues en matière de liquéfaction du gaz naturel, de la composante transport ainsi que sur les investissements indispensables à réaliser. Pour la première fois à ce niveau les spécialistes tenteront de définir les contours du futur marché de cette matière première de valeur.

Dans les années 90, les tendances négatives générales observées dans l'économie russe s'étaient aussi douloureusement répercutées sur la production de GNL. Les quantités fabriquées ont brusquement chuté et depuis dix ans les exportations de gaz liquide ont régressé de 2,3 fois (de 2,5 millions de tonnes en 1990 à moins d'un million de tonnes en 2002).

Evoquant l'état actuel de la branche pour ce qui est de la production de gaz liquide, Igor Youssoufov, ministre russe de l'Energie, a relevé notamment que les gaziers russes avaient réussi à stopper les tendances négatives grâce à la reprise économique en 1999-2003. L'augmentation de la production dans les entreprises des industries pétrochimique et chimique ainsi que dans les usines de pneumatiques, grandes consommatrices de gaz liquéfié, a entraîné un accroissement de la production de GNL. Les gérances d'immeubles et les transports eux aussi consomment davantage de GNL.

De l'avis du ministre de l'Energie, beaucoup reste encore à faire pour niveler les prix intérieurs et extérieurs du gaz liquide. Au début de 2003, une tonne de GNL était facturée de 100 à 115 dollars aux gérances d'immeubles tandis que pour les entreprises pétrochimiques et autres consommateurs de gros elle était fournie à un prix relativement "libre". A titre de comparaison, en Europe occidentale et aux Etats-Unis la tonne de gaz liquide en saison hivernale est vendue de 210 à 340 dollars.

En Russie le prix du gaz liquide pour les besoins ménagers devrait atteindre le niveau des prix de marché en 2005. D'ici à cette date les mécanismes de subventionnement public ciblé des couches de population nécessiteuses auront été mis en place.

La demande grandissante d'hydrocarbures dans le monde industrialisé, en tout premier lieu aux Etats-Unis où un doublement de leur consommation est prévu dans les 10-15 prochaines années, est un autre facteur qui a dopé la production de GNL en Russie.

Selon le patron du ministère russe de l'Energie, grâce à ses réserves exceptionnelles de pétrole et de gaz, la Russie a toutes les chances d'occuper une place de premier rang sur le marché mondial du gaz liquéfié. Sur le long terme les livraisons massives et prévisibles de GNL russe permettront de dissiper les inquiétudes des Etats-Unis et des pays européens industrialisés en ce qui concerne les fournitures de gaz, estime Igor Ioussoufov. "Nous avons hâte de livrer du gaz liquide aux Etats-Unis qui possèdent le marché le plus dynamique et le plus volumineux grand consommateur de GNL".

Les besoins des Etats-Unis en gaz naturel ne sont plus couverts par le transport pipelinier. Ici le ministre a fait remarquer que la Russie souhaiterait éviter entrer en concurrence directe avec le gaz canadien, par exemple.

Depuis la mise en exploitation du gisement de Chtokman en mer de Barents il est possible d'acheminer le GNL par tankers jusqu'au littoral est des Etats-Unis, où l'on prépare déjà une infrastructure de vaporisation du gaz liquéfié. A cet égard, Igor Ioussoufov a souligné que la Russie avait besoin des technologies modernes de production du GNL maîtrisées par les chefs de file de l'industrie pétrogazière américaine.

Les exportations russes de GNL jouent déjà un certain rôle en Europe. La structure des exportations russes elle aussi a changé. Si il y a une douzaine d'années 80 pour cent du GNL exporté étaient consommés dans les pays de la Communauté des Etats indépendants, en 2001 pas plus de 20 pour cent de ces exportations étaient adressés à l'Ukraine, à la Biélorussie et aux Pays baltes (Estonie, Lettonie et Lituanie), le reste était livré ailleurs. Tout récemment encore les principaux acheteurs de GNL russe étaient la Finlande, la Pologne ainsi que les pays d'Europe centrale et orientale.

La Conception du développement de la production de GNL qui a été adoptée en Russie a pour objectif de placer le pays en position de leader sur le marché mondial. Ici un rôle tout particulier sera attribué à la mise en valeur des gisements de gaz de la Sibérie orientale, de Sakhaline, de Chtokman et de Yamal. Selon Igor Ioussoufov, l'exploitation de ces gisements figure parmi les principales priorités de la Statégie énergétique de la Russie d'ici à 2020.

A cet égard, le ministre russe de l'Energie a relevé que récemment Sakhalin energy, la compagnie opératrice du projet Sakhaline-2, et Tokyo gaz, avaient signé un accord concernant des livraisons annuelles de plus d'un million de tonnes de GNL à partir de 2007 et ce pendant près d'un quart de siècle. A ces fins, il est prévu de construire dans le bourg sakhalinien de Prigorodnoé la plus grande usine au monde de liquéfaction du gaz d'une capacité annuelle de 9,6 millions de tonnes. A titre indicatif, disons que l'unité de production la plus performante (8 millions de tonnes) est actuellement en chantier à Qatar.

Selon le ministre, grâce à la composante transport le gaz liquéfié de Sakhaline sera meilleur marché que le gaz transporté par tankers depuis les Emirats arabes.

Il faut rappeler que les réserves prospectées du gisement de condensat de gaz de Lounski (principale source d'approvisionnement de l'usine de liquéfaction) sont évaluées à 384 milliards de mètres cubes. Le coût total de ce projet qui ouvrira au GNL russe la voie de la Région Asie-pacifique est de plus de 8 milliards de dollars.

Evoquant les projets internationaux, le ministre Igor Ioussoufov a fait valoir les atouts des gaziers russes. Ainsi, sur le plan de la technologie il sera moins coûteux d'obtenir la température de moins 150 degrés à Yamal, au-delà du cercle polaire, que dans la Péninsule arabique. Cela aura une répercussion notable sur le prix de revient.

Extrêmement prometteuse aussi est la mise en valeur du gisement de condensat de gaz de Kovyktino (région d'Irkoutsk), dont la teneur en hélium est exceptionnelle. La transformation annuelle de 50 à 60 milliards de mètres cubes de gaz permettrait de couvrir la consommation annuelle mondiale d'hélium.

De l'avis d'Igor Ioussoufov, il est essentiel de définir correctement la stratégie d'exportation et de choisir le coordinateur des exportations de gaz russe à l'étranger. Surtout qu'il n'est pas exclu que des compagnies étrangères, dont japonaises, commencent à extraire du gaz russe sur la base d'accords appropriés. En tout cas, aucun texte législatif ne s'y oppose.

Pour le ministre de l'Energie, c'est Gazprom qui, en qualité de détenteur de la licence d'exploitation des gisements, doit être de plein droit l'opérateur général des projets d'exportation et le coordinateur des livraisons de gaz.

Igor Ioussoufov estime que pour les consommateurs étrangers de gaz russe la question sensible réside non pas dans le coût de la matière première quel qu'il soit, mais dans la prévisibilité. Et ici le prestige et l'immense expérience de Gazprom peuvent constituer pour eux la garantie du plein respect des intérêts publics dans les affaires internationales du secteur gazier.

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