Réflexions postolympiques

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Réflexions postolympiques

MOSCOU (par Vassili Zoubkov, commentateur de RIA-Novosti).

La flamme olympique s'est éteinte. Les hôtes et les participants aux J.O. sont revenus chez eux. Il est temps de dresser le premier bilan. Que dire de la participation de l'équipe russe aux Jeux olympiques à Athènes: était-ce un échec ou un succès?

Après la première semaine de Jeux, lorsque la Russie a manqué plusieurs médailles d'or, tant pour des raisons objectives (natation) que subjectives (gymnastique), l'ennui et la méfiance se sont solidement ancrés, semblait-il, dans le coeur des supporters. Les supporters plus âgés avaient honte pour la sélection russe. A l'époque, ils avaient assisté aux Jeux olympiques auxquels deux puissances régnaient sans partage: l'URSS et les Etats-Unis.

La confrontation dans le sport était longtemps le prolongement de la confrontation dans la politique, l'idéologie et la culture. Enfin, les victoires remportées aux Jeux olympiques signifiaient la victoire du sport des masses, la santé de la nation et son prestige. Les temps ont changé, mais, en fait, les victoires brillantes dans le sport ont toujours une grande importance pour l'image internationale des Etats. Ils ne lésinent pas sur la dépense pour se préparer aux Jeux olympiques, bien entendu, s'ils ont de l'argent.

A Athènes, à en juger par les pronostics des fonctionnaires sportifs, la Russie "aurait pu être classée première par équipe". Hélas, ce pronostic ne s'est pas justifié. La première semaine d'échecs a empêché d'occuper la première place. Mais un autre pronostic — la défaite foudroyante sur tous les "fronts" olympiques — ne s'est pas justifié non plus. Mais, comme le dit un proverbe russe, peu compréhensible pour les étrangers, mais populaire en Russie, les Russes mettent beaucoup de temps à atteler les chevaux, mais ils vont vite.

Avant le baisser du rideau, à la surprise des observateurs, dont le célèbre Juan Antonio Samaranch, haut fonctionnaire du CIO qui avait déjà déclaré qu'il était déçu des sportifs russes, l'équipe russe a réalisé des performances spectaculaires. Si les J.O. s'étaient prolongés d'un jour ou deux, elle aurait pu occuper la première place. En fin de compte, les Russes ont occupé, dans le classement informel, d'après le nombre total de médailles gagnées (92), la deuxième place, en ne le cédant qu'aux Etats-Unis (103). Par le nombre de médailles d'or, elle s'est classée troisième, après la Chine.

Faisant abstraction du comportement "étrange" des juges à Athènes, en tant que facteurs subjectifs, il convient de reconnaître honnêtement que ce bilan est juste pour la Russie: il n'est ni mauvais, ni brillant. Bismarck a dit: la Russie ne sera jamais aussi forte qu'elle le voudrait, mais elle ne sera non plus aussi faible, comme le voudraient d'autres… Cette remarque s'est avérée probablement juste dans ce cas également.

Le sport russe, y compris celui de haut niveau, est un reflet de la situation générale dans la société et l'économie. Les métamorphoses de la période impétueuse de transition d'une formation socio-politique à une autre n'ont pu ne pas se répercuter sur le sport. Il suffit de se souvenir des "marchés de puce" aux stades et autour d'eux, des super-marchés au lieu des écoles sportives pour enfants, des salaires de misère des entraîneurs et des mêmes allocations versées aux sportifs prometteurs: tout cela a poussé de nombreux spécialistes sportifs renommés à émigrer. Enfin, l'épanouissement des sports rentables de l'élite comme le tennis ou le ski alpin dans le contexte de l'oubli total des sports des masses, si populaires, s'est également répercuté sur les résultats. Après avoir sérieusement réfléchi, on peut affirmer que notre place parmi les trois puissances sportives de réputation mondiale a été gagnée par la Russie non pas grâce, mais plutôt en dépit de la logique des événements.

Il est à remarquer que l'expérience du système soviétique de formation des sportifs de haut niveau n'est pas oubliée. La deuxième place occupée par la Chine en témoigne éloquemment. Il y a 4 ans, à Sydney, les athlètes chinois avaient gagné 59 médailles dans 12 disciplines. En Grèce, ils ont gagné 62 dans 20 sports. L'essor olympique de Pékin atteste avant tout que l'Etat y accorde une grande attention au développement du sport des masses, à l'utilisation de la meilleure expérience mondiale, y compris soviétique, de formation des sportifs, car des centaines d'entraîneurs avaient travaillé en Chine et des dizaines d'entraîneurs de la Russie y travaillent actuellement. La conclusion s'impose: les Russes doivent se souvenir de leurs acquis passés et les considérer comme il se doit, l'Etat ne doit pas lésiner sur les dépenses pour le sport des enfants et des amateurs. Le sport professionnel doit gagner lui-même.

Aux Jeux olympiques en Grèce, les Russes ont souhaité la victoire non seulement de leurs athlètes, mais aussi de ceux de l'Ukraine, de la Biélorussie, du Kazakhstan, de la Géorgie et d'autres voisins de la CEI (Communauté des Etats Indépendants) et de tout l'espace postsoviétique. L'histoire n'a pas de subjonctif, mais s'il existait, la sélection des républiques soviétiques, aujourd'hui les Etats indépendants et souverains, remportait une victoire brillante aux J.O. d'Athènes.

En Grèce, les sportifs de ces Etats ont devancé en commun les Américains, en gagnant 10 médailles d'or de plus et, au total, 59 médailles de plus! Les fondations sportives posées au sein d'un seul pays se sont avérées solides.

 

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