Découverte d'un Stonehenge russe

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MOSCOU, 11 novembre - par Olga Sobolevskaïa, commentatrice RIA Novosti.

La Russie a désormais son propre Stonehenge. Cet été, sur une colline à la confluence de deux rivières, la Pronia et l'Oka, à Spasskaïa Louka (région de Riazan, centre), les archéologues ont découvert un sanctuaire vieux de quatre mille ans. Surnommée "encyclopédie archéologique", cette région présente tout un kaléidoscope de cultures, du paléolithique supérieur au haut Moyen Âge.

"Si l'on regarde d'en haut le lieu des fouilles, il représente un cercle de sept mètres de diamètre délimité par des piliers d'un demi-mètre de large situés à équidistance, raconte le chef de l'expédition Ilia Akhmedov, du département monuments archéologiques du Musée historique de Moscou. Au centre du cercle, on voit une grande fosse rectangulaire et un pilier. Naturellement, les piliers en bois ne se sont pas conservés, mais les fosses rondes d'où ils sortaient sont encore visibles. Aux extrémités du terrain il y a deux autres fosses avec des piliers. Les fosses auraient été au nombre de quatre, mais une partie du temple païen se serait effondrée, le rivage étant déformé par un ravin".

Une autre fosse avec un pilier semblable a été trouvée quelques mètres à l'est de cet endroit, et un pilier a aussi été découvert au sud il y a trois ans. "Tout porte à croire qu'il existe une deuxième rangée de piliers à quelque dix mètres du sanctuaire", dit Ilia Akhmedov.

Quatre piliers faisant partie de la circonférence forment une porte par laquelle, si on la regarde du centre, on peut contempler le coucher du soleil. Un autre pilier situé en dehors de l'enceinte circulaire indique par contre le lever du soleil. La forme du monument permet ainsi de supposer sa vocation astronomique, et les objets trouvés sur place semblent avoir été de nature rituelle.

Les dimensions des fosses oscillent entre 44x46 cm et 75x56 cm. La fosse centrale contenait un petit récipient en céramique orné finement d'un dessin:un zigzag qui rappelle les rayons du soleil et des lignes ondulées qui symbolisent l'eau. Les spécialistes attribuent le récipient à l'âge de bronze. En apparence, il rappelle les objets artisanaux des nomades qui peuplaient le sud de l'Eurasie.

Au centre d'une de ces fosses avec piliers situées en dehors du temple païen, les archéologues ont trouvé des fragments d'os longs et de dents d'homme. Il s'agit probablement des restes d'un sacrifice humain. Il ne faudrait pas exclure non plus que les grandes fosses soient des sépultures et que les squelettes ne se soient pas conservés en raison des propriétés du sol. Au fond de la fosse centrale on découvre une couche de décompositions organiques, alors que la dépouille pourrait bien être celle d'un chef de clan sacralisé après la mort.

Les sanctuaires antiques voisinent souvent avec des sépulcres. Cela est lié au culte des ancêtres et à l'idée de la mort considérée comme le passage à une nouvelle vie. Dans les folklores anciens on envisageait la vie de la nature comme cyclique, mais aussi celle de l'homme. Les cultes astronomiques du soleil et de la lune étaient proches de celui de la fécondité, des transitions inversées de la vie et de la mort. Les sanctuaires de forme circulaire les plus connus d'Europe, Stonehenge et Avebury (Grande-Bretagne), sont accompagnés de nombreux sépulcres. L'idée même de la forme circulaire remonte aux légendes des anciens sur la création de l'univers. Le cercle est une figure magique sans commencement et sans fin qui symbolise l'éternité et l'infini.

Il y a, d'ailleurs, un autre cimetière à côté du sanctuaire. À l'époque des grandes invasions, des Finno-ougriens sont venus peupler les terres de Riazan. Mais pas une seule tombe de leur immense sépulcre n'a touché le vieil observatoire. Les Finno-ougriens auraient donc été au courant du sens sacral de ces constructions.

En effet, le vieux sanctuaire de Riazan est unique. On trouve des monuments semblables dans les steppes et dans la toundra transouralienne, mais ils ne sont pas aussi représentatifs et aussi bien aménagés. Les sanctuaires aux piliers ont commencé à se propager en Europe à partir de la fin du 1er millénaire avant J.-C., et on en retrouve notamment en République tchèque et en Slovaquie. "Il ne peut pas y avoir de parenté de sang entre les peuples qui ont érigé Stonehenge et l'observatoire de Riazan. Ce dernier semble avoir subi l'influence d'une population venue du sud-est de la steppe eurasienne", résume l'archéologue Ilia Akhmedov.

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