Revue de la presse russe du 6 décembre

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MOSCOU, RIA Novosti

Kommersant

Poutine crée un nouveau centre de force sur la carte politique du monde

Hier, après sa visite en Inde, le président russe Vladimir Poutine est arrivé en Turquie. Malgré des relations historiques différentes avec chacun de ces deux pays, le but principal du voyage du leader russe consiste à tenter de former un ou plusieurs centres de force sur l'arène mondiale, écrit le quotidien "Kommersant".

Les visites du chef de l'Etat russe à New Delhi et à Ankara laissent entrevoir une tentative de donner une "réponse asymétrique" à l'hégémonie d'une seule superpuissance. C'est ainsi qu'ont été interprétées les déclarations faites par le président Poutine à New Delhi sur la "dictature dans les affaires internationales, même si elle est joliment empaquetée dans la phraséologie pseudo-démocratique" et sur le danger des "tentatives de remodeler d'après les principes de caserne du monde unipolaire la civilisation contemporaine que Dieu a créée variée et diverse".

C'est dans ce même ordre d'idées qu'a été faite aussi la déclaration sur la nécessité d'activer la coopération tripartite entre la Russie, l'Inde et la Chine dont il est question dans la Déclaration russo-indienne. Mieux, un sommet tripartite russo-indo-chinois se tiendra l'année prochaine.

Si les tentatives de bâtir un centre de force en Asie de l'Ouest ou en Asie de l'Est ne datent pas d'aujourd'hui, l'appel fait à un membre de l'OTAN qu'est la Turquie en le considérant comme un éventuel allié dans la nouvelle donne géopolitique est un phénomène nouveau. Aujourd'hui la Turquie s'est retrouvée à un carrefour historique. Le problème de l'ouverture de négociations sur son adhésion à l'Union européenne n'a pas encore été résolu et la résistance à l'idée de la voir être membre à part entière de l'Union ne cesse de s'amplifier. Parallèlement, des tendances anti-américaines grandissent en Turquie. Dans ce contexte aucun homme politique (même aux tendancesles plus pro-occidentales) n'osera aujourd'hui déclarer ouvertement ses vues pro-américaines. Tout cela offre à la Russie une chance d'engager un jeu sur un terrain qui semblait inaccessible jusqu'à ces derniers temps.

De ce point de vue, la double visite à New Delhi et à Ankara peut être au moins le dernier événement réussi de 2004. De toute façon les formules retentissantes (bien qu'évasives) des deux déclarations conjointes aideront à couvrir l'écho de plusieurs échecs politiques extérieurs (Ukraine, Abkhazie, UE, CEI).

Vedomosti

Ianoukovitch n'a pratiquement pas de chance de l'emporter

Après l'annulation des résultats de la présidentielle par la Cour suprême de l'Ukraine le candidat du pouvoir, Viktor Ianoukovitch, devra affronter une nouvelle fois, le 26 décembre, le leader de l'opposition Viktor Iouchtchenko. Telle est la décision de la Commission électorale centrale.

Le président sortant ukrainien Leonid Koutchma proposait que l'élection soit entièrement réorganisée et a déclaré jeudi, de concert avec Vladimir Poutine, qu'une réédition du second tour serait illicite", souligne le quotidien "Vedomosti".

Ianoukovitch n'a pratiquement pas de chance de l'emporter, estiment les observateurs. D'après les sondages, Iouchtchenko bénéficie d'un soutien qui ne cesse de grandir. Aujourd'hui, 56% des électeurs sont prêts à voter Iouchtchenko, souligne le directeur du "Centre Levada", Alexéi Grajdankine. "Il ne pourra vaincre que si Koutchma revient sur sa décision de céder ses positions et de le retenir à ses côtés", estime le président de la Fondation russe de la politique efficace, Gleb Pavlovski, qui avait collaboré avec les partisans de Ianoukovitch au cours de la campagne électorale.

En ce qui concerne Ianoukovitch, il estime, ainsi que l'a déclaré son attachée de presse Anna Guerman, qu'il n'a pas d'autre choix que de continuer la lutte et de vaincre. Il pourra faire de nouvelles déclarations lorsque son équipe aura conçu une nouvelle stratégie de lutte, constate le politologue ukrainien Dmitri Vydrine.

Cependant, la victoire de Iouchtchenko risque de compliquer les relations entre Kiev et Moscou, qui a misé sur Ianoukovitch. Le directeur adjoint du Centre des technologies politiques, Alexéi Makarkine, prédit que la victoire de Iouchtchenko remettra en doute la participation de l'Ukraine à l'"espace économique unique" avec la Russie, la Biélorussie et le Kazakhstan, de même que l'existence d'une base navale russe à Sébastopol.

Aucun des compagnons de Poutine ne sera tenu responsable de l'échec de la politique russe en Ukraine, affirment les experts. De l'avis de Makarkine, "ce seront les oligarques qui vont s'attirer les foudres pour avoir soutenu Iouchtchenko et apporté une aide insuffisante à Ianoukovitch".

Nezavissimaïa gazeta

Aucune révolution ne menace la Russie mais le pouvoir doit rester sur ses gardes

Ioulia Timochenko, une leader de l'opposition ukrainienne, a déclaré dernièrement que lorsque la révolution aurait pris fin en Ukraine elle communiquerait ses "états d'esprit oranges" à la Russie. Des experts et hommes politiques russes interrogés par le quotidien "Nezavissimaïa gazeta" se prononcent sur le bien-fondé" de cette prédiction.

Konstantin Remtchoukov, assistant du ministère du Développement économique et du Commerce : En Russie il n'y a pas d'élection, prétexte formel qui a déclenché toutes les révolutions. En effet, aucune révolution, que ce soit en Europe de l'Est ou en Géorgie, n'a commencé par un acte révolutionnaire mais par l'interprétation des résultats des élections lorsque les insurgés, dénommés révolutionnaires n'acceptaient pas le bilan officiel. Cette situation est impossible aujourd'hui en Russie. Ici Poutine a un autre niveau de popularité. Dans l'espace post-soviétique il s'agissait d'une protestation contre des hommes qui avaient déjà exercé deux mandats au pouvoir et dont le peuple avait déjà marre. En ce qui concerne Poutine, en dépit de la difficile année après Ioukos les gens attendent qu'il fasse régner dans le pays l'ordre et la justice sociale.

Andréi Piontkovski, directeur du Centre des études stratégiques : L'influence des événements ukrainiens sur la Russie sera forte. Une bonne partie des autorités russes et de l'élite politique locale se montre irritée parce qu'elle craint qu'il ne se crée sur l'espace post-soviétique un nouveau précédent de démontage d'une démocratie gouvernable, d'un modèle de transmission du pouvoir par voie d'héritage, et que cet exemple ne bouleverse les esprits en Russie.

Alexei Mitrofanov, député à la Douma (Parti libéral démocrate) : Les autorités russes doivent tirer des enseignements de tout ce qui se passe aujourd'hui : des médias libres et des traditions démocratiques sont nécessaires. Le pouvoir doit être capable de s'autoanalyser et de se renouveler au lieu de chercher à se renfermer sur son petit monde bureaucratique derrière un mur. Parce que tôt ou tard la foule démolira ce mur comme cela a été le cas en 1991.

Novye izvestia

Selon les deux tiers des Russes, la situation dans le pays est explosive

Pour seulement un cinquième de la population (20 %), la situation politique en Russie est actuellement calme. De l'avis de 67 % de Russes, la situation dans le pays est tendue (critique et explosive).

Comme il ressort des résultats du sondage du Centre analytique de Youri Levada publiés dans le quotidien "Novye izvestia", plus de la moitié des citoyens (51 %) sont certains que la Russie a emprunté une fausse voie et seulement 38 % estiment qu'elle suit la bonne voie. En janvier dernier, le rapport était inverse: 50 % considéraient cette voie comme juste et 37 %, comme fausse.

Seulement un tiers des citoyens (33 %) veulent que les réformes économiques continuent. Près de la moitié des personnes interrogées (45 %) ont déclaré qu'elles n'avaient pu s'adapter aux changements et 26 % sont certains qu'ils nepourront jamais s'adapter. 18 % considèrent leur situation matérielle comme bonne, 54 %, comme difficile, mais tolérable, 24 % ont déclaré qu'elle était "intolérable". Seuls 14 % espèrent que leur situation matérielle s'améliorera dans un proche avenir, 22 % estiment qu'elle continuera à empirer.

Environ un quart des Russes (24 %) sont prêts à participer aux actions de protestation massives pour avancer des revendications économiques. Il y a un an, ils constituaient 17 %. 19 % sont prêts à participer à des grèves. L'activité du gouvernement de Mikhail Fradkov est approuvée par 34 % et désapprouvée par 61 %. Les griefs principaux suivants sont avancés au gouvernement: le gouvernement est incapable d'endiguer la hausse des prix (53 %), il ne se préoccupe pas de la protection sociale (43 %), il ne peut pas assurer un emploi aux gens (34 %).

Selon Youri Levada, au début de l'année, une excitation préélectorale régnait. L'espoir que la situation s'améliore était palpable. Ensuite, l'espoir s'est amenuisé progressivement du fait de l'inflation et de l'inquiétude liée à la monétisation des avantages. Beslan a fini par semer l'alarme et l'incertitude. Lorsque la récession a été canalisée, le moral s'est amélioré. Mais, en raison du rééquipement des entreprises, les surplus de personnel ont été licenciés, ce qui a accru le chômage. A la différence des régions cela ne se ressent pas encore à Moscou.

3 700 Russes ont été interrogés au cours du sondage.

Vedomosti

Leonid Parfionov a été nommé à la tête de la version russe du magazine "Newsweek"

Leonid Parfionov, l'un des plus célèbres présentateurs de la télévision russe, ancien dirigeant du programme analytique "Namedni" (limogé en juin dernier), assume, à partir d'aujourd'hui, les fonctions de rédacteur en chef de la version russe du magazine "Newsweek". Les intervenants et les analystes du marché estiment que Leonid Parfionov est devenu le rédacteur en chef le mieux rémunéré en Russie et que lemagazine "Newsweek" a acquis en sa personne la plus grande célébrité sur le marché des médias, lit-on dans le quotidien "Vedomosti".

L'hebdomadaire socio-politique "Newsweek" est édité depuis juin dernier en Russie par la maison d'édition Axel Springer Russia sous licence de Newsweek Inc.

Irina Silaieva, directrice générale de la compagnie, a refusé de dévoiler les conditions du contrat conclu entre Leonid Parfionov et la maison d'édition, en se bornant à souligner que la conception du magazine "Newsweek" ne changerait pas.

Les intervenants sur le marché estiment que l'apparition de Leonid Parfionov au poste de rédacteur en chef de "Newsweek" renforcera les positions du magazine. "C'est un pas juste. Le marché des hebdomadaires se distingue par une concurrence serrée, c'est pourquoi, à mon avis, la nomination de Leonid Parfionov s'explique par le désir des actionnaires de renforcer les positons de la publication", estime Rafael Akopov, directeur général de "Prof-Média".

L'avis de Rafael Akopov est partagé par le top-manager d'une autre maison d'édition qui a requis l'anonymat. " En invitant Leonid Parfionov, "Newsweek" acquiert la plus grande célébrité sur le marché des médias. Le public attendait avec impatience l'émission "Namedni", à présent, il attendra l'apparition du nouveau numéro du magazine "Newsweek", estime la source.

Tout en partageant l'avis de ses collègues au sujet du professionnalisme de Leonid Parfionov, Derk Sauer, directeur général de la publication "Independent Media" estime toutefois qu'il ne réussira pas à faire de "Newsweek" le magazine de Parfionov, car la politique et la conception de cette revue, de même que de toute autre publication occidentale, sont très strictes.

Selon diverses estimations, la somme du contrat annuel de Leonid Parfionov peut atteindre 300 000 à 500 000 dollars. Par conséquent, Leonid Parfionov devient le rédacteur le mieux rémunéré des hebdomadaires socio-politiques.

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