Le monde a-t-il besoin de l'ONU?

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MOSCOU, 17 décembre (par Arseni Oganessian, commentateur de RIA Novosti). Les Nations Unies sont le seul "mécanisme universel" existant dans le monde pour écarter les périls globaux pesant sur l'humanité, a déclaré il y a quelques jours le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan.

De l'avis du secrétaire général, il est impérieux d'éliminer les contradictions et de "renforcer le système collectif de sécurité" dans le monde. Cela pourrait être fait en soumettant l'ONU à une réforme radicale et en définissant le rôle de cette organisation au XXI-e siècle. Le problème consiste en ce que dans le monde il n'y a pas de vision unique de l'avenir de cette organisation. Par exemple, pour l'entourage néo-conservateur du président des Etats-Unis, George W.Bush, l'ONU n'est qu'un poids mort. Il faut la nourrir, mais quand il faut agir avec rapidité et résolution, elle n'est d'aucun effet. On l'a bien vu en Yougoslavie, en Irak et ailleurs. Une question se pose alors: pourquoi l'unique superpuissance devrait-elle s'embarrasser de la Charte de l'organisation dans le cadre du droit international alors qu'elle est capable de régler elle-même les problèmes auxquels elle est confrontée en faisant intervenir des blocs régionaux comme l'OTAN ou en constituant une coalition internationale ad hoc?

Si la mondialisation apporte d'appréciables avantages et recèle aussi ce phénomène ambivalent qu'est l'interdépendance, cette propension à vouloir tout faire soi-même pourrait s'avérer injustifiée. Selon le Financial Times, actuellement chaque jour ouvrable les Etats-Unis doivent d'ores et déjà emprunter cinq milliards de dollars sur le marché extérieur. La bataille pour le contrôle de l'ellipse énergétique est loin de son achèvement et l'économie américaine a toujours besoin de pétrole. Enfin, les Etats-Unis ne pourront rester les leaders incontestés du monde que tant que l'opinion internationale le reconnaîtra elle-même.

En attendant, l'invasion en Irak et le scandale de la prison d'Abou Ghraib ont déjà conduit à la défaite des Etats-Unis dans la "conquête du coeur et des esprits". Dans les rues d'Ankara, la capitale d'un pays membre de l'OTAN, les devantures de certains magasins sont émaillées d'écriteaux portant l'inscription "Interdit aux Américains". Ces mots couronnent des photos montrant des soldats américains se livrant à des sévices sur des détenus dans la prison d'Abou Ghraib.

Quand Washington critique l'ONU parce qu'elle ne s'est pas montrée à la hauteur dans le règlement de la question irakienne, il fait l'impasse sur le fait que son comportement lui a permis de conserver son image, y compris dans le monde musulman. Par contre, les actions de l'administration actuelle ont eu des résultats diamétralement opposés parce que dans le monde entier le "soft power" (pouvoir de persuasion) américain a beaucoup perdu de son potentiel. Seulement maintenant qu'elle arrive au pic de sa puissance, l'Amérique ne le remarque pas.

En raison de la limitation de leurs potentialités sur l'échiquier mondial, les autres acteurs de la politique internationale, parmi lesquels la Russie, sont enclins à l'expectative. Car si les mécanismes de persuasion de l'ONU sont un boulet pour l'Amérique, pour les autres ils sont les garants de la sécurité.

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