Quelle issue à la crise "de velours" au Kirghizstan?

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MOSCOU (par Piotr Gontcharov). L'observateur le plus optimiste ne se risquerait pas à qualifier la situation actuelle au Kirghizstan de "crise de velours". La question se pose dans des termes différents: peut-on sortir de cette crise sans effusion de sang et sans violence?

Et selon l'opposition, le sang a déjà coulé, la crise a fait ses premières victimes aussi bien parmi la population que parmi les forces de l'ordre. Tout dépend maintenant de la capacité du pouvoir et de l'opposition de se mettre à la table des négociations malgré leur aversion mutuelle.

D'ailleurs, la logique des événements qui ont eu lieu depuis deux ans dans la république exige ces pourparlers. Le président du pays Askar Akaiev accepte ce principe, mais la solution ne dépend pas seulement de son accord ou de son désaccord.

La confrontation qui a éclaté pendant les élections législatives entre le pouvoir et l'opposition dans les deux centres régionaux d'Och et de Djalal-Abad a conduit, comme il fallait s'y attendre, à des violences dont l'issue est imprévisible. Certes, les deux parties interprètent différemment ces événements. Selon l'opposition, à la suite de la prise d'assaut, dans la nuit de samedi à dimanche, par la police et les unités spéciales des bâtiments administratifs d'Och et de Djalal-Abad, il y a eu des victimes aussi bien parmi la population que parmi les policiers. On dit qu'il y a eu environ dix morts et des dizaines de blessés.

Mais les autorités officielles démentent ces affirmations, tout en qualifiant la situation de crise. Le ministère de l'Intérieur affirme que de nombreuses familles de policiers, craignant pour leur vie, ont été contraintes de quitter Djalal-Abad.

L'opposition essaie de présenter les événements dans le Sud du pays comme un désaccord national avec le pouvoir actuel, comme une protestation populaire. Le pouvoir estime, à son tour, que l'opposition spécule sur les problèmes politiques et sociaux traditionnels qui subsistent dans les régions méridionales de la république, que le conflit a été provoqué, pour l'essentiel, par les efforts de l'opposition et qu'il ne dépasse pas le cadre d'une crise régionale.

Bien entendu, le pouvoir a raison dans un sens. La contestation est réelle dans la république, mais les événements ne suivent pas pour autant les scénarios géorgien ou ukrainien. Et rien ne permet d'affirmer que le pouvoir actuel avec à sa tête le président Askar Akaiev est condamné.

D'autre part, la confrontation "pouvoir-opposition" ne date pas d'hier. Les événements d'il y a deux ans dans le chef-lieu d'Aksy de la région de Djalal-Abad (également dans le Sud de la république) étaient le premier signal d'alarme. La police avait employé alors les armes contre les manifestants qui s'étaient élevés contre l'administration locale. Il y avait eu des victimes, ce qui ébranla toute la république.

Commentant les événements de l'époque dans un journal russe, le président Askar Akaiev n'estimait pas que le Kirghizstan traversait une "crise politique, civile et sociale totale" et qu'il se trouvait "au seuil d'une guerre civile", bien qu'il n'ait pas nié la nécessité de passer "à une nouvelle étape de développement démocratique" de la république. Le président avait également mentionné plusieurs transformations démocratiques engagées par lui-même pour assurer le progrès de la démocratie dans la république. Apparemment, les idées visant à contribuer à la stabilisation dans le pays étaient insuffisantes. De toute évidence, un point de vue alternatif - celui de l'opposition - était nécessaire pour faire avancer la démocratie dans le pays.

Les autorités kirghizes sauront-elles engager aujourd'hui le dialogue avec l'opposition, alors que la violence a éclaté dans le pays?

Si le dialogue a lieu, il ne sera pas facile pour Askar Akaiev et le pouvoir dans son ensemble, car on ne sait pas si l'opposition renoncera à exiger la démission avant terme d'Askar Akaiev et l'élection présidentielle anticipée. D'autant plus que la réaction du pouvoir à ces revendications est imprévisible.

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