Plan "Russie 2008 - pays prospère"

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MOSCOU, 6 septembre - Vassili Kononenko, commentateur politique de RIA-Novosti.

Deux jours avant la rentrée politique qui est par tradition liée à la reprise des travaux de la Douma d'Etat (Chambre basse du Parlement russe), le président de la Fédération de Russie Vladimir Poutine a rendu publiques ses idées au sujet de l'aménagement du pays au cours des trois années qui restent avant l'expiration de son mandat.

Au Grand Palais du Kremlin, devant une très large assistance, composée essentiellement des plus hauts fonctionnaires fédéraux, le chef de l'Etat a expliqué à quoi seraient dépensés les premiers 115 milliards de roubles puisés partiellement dans la cagnotte nationale qu'est le Fonds de stabilisation.

Les tâches assignées par le président à tous les organes du pouvoir peuvent être à juste titre qualifiées de projets nationaux, comparables par leur envergure et leur portée aux réformes de Piotr Stolypine ou à la politique économique d'Adenauer-Erhard qui a autrefois produit le miracle économique allemand.

Ainsi, dans la Santé publique en Russie, il est prévu de doter d'équipements modernes au moins 10 000 policliniques municipales, tout en triplant le salaire des personnels médicaux afin que les personnes travaillant dans ce secteur aient le sentiment d'être des membres à part entière de la société. Dans l'Education nationale, il s'agit de moderniser les écoles et les centres de recherche, ainsi que de créer deux nouvelles Universités, plus précisément dans les régions fédérales du Sud et de la Sibérie. De 2006 à 2008, le salaire des chercheurs qualifiés doit augmenter en moyenne jusqu'à 30 000 roubles par mois. Cette mesure a notamment pour objectif d'arrêter l'exode des chercheurs et des enseignants russes.

La réforme de l'agriculture s'accompagnera de la mise en place de tout un système de crédits hypothécaires fonciers, alors que l'hypothèque reposant sur des garanties d'Etat constituera un instrument universel d'accroissement rapide des volumes de construction de logements. Enfin, la décision a été adoptée d'annuler les taxes à l'importation d'équipements étrangers n'ayant pas d'équivalents en Russie, ceci pour accélérer le rééquipement technologique de l'économie et de la science russes. Tous ces projets gigantesques ne devraient pas provoquer le déséquilibre économique qui a été au cœur de très vifs débats entre économistes et politiques depuis ces derniers mois.

Il s'est avéré en fait que l'argent accumulé grâce aux prix élevés du pétrole dans le monde peut quand même être dépensé, sous réserve qu'il ne soit pas partagé à parts égales entre tous mais soit investi dans la sphère sociale qui en manque cruellement. C'est d'ailleurs le chemin déjà parcouru par nombre de pays du Sud-Est asiatique, quant à l'essor économique vertigineux de l'Allemagne dans l'après-guerre, il a justement été déclenché par des investissements dans le Bâtiment, la construction de routes et la mise en place de l'infrastructure de transport.

Parmi les politiques invités au Kremlin, personne n'a rien trouvé à redire. Même le leader communiste Guennadi Ziouganov a dû reconnaître que "les investissements dans l'Homme sont toujours quelque chose d'important". Le leader de "Rodina", Dimitri Rogozine, a parlé du "budget transparent" qui a permis, selon lui, d'adopter des décisions d'une immense portée sociale. Somme toute, en proposant ces projets nationaux, le président prive l'opposition de son atout principal. En effet, "les réformes ne valent rien si la société ne peut pas profiter de leurs résultats".

A signaler que l'intrigue autour de la manière de dépenser le Fonds de stabilisation et de la revue à la hausse des indices prévisionnels des recettes budgétaires pour 2006 date de l'été dernier et est due à l'initiative de Gryzlov, de Morozov et de Volodine, tous membres du Parti "Russie Unie". Le 7 juillet dernier, la direction de la Douma avait rencontré les membres du gouvernement. C'est justement au cours de cette rencontre que le plan avait été proposé: former un "budget de développement".

C'est alors également qu'on avait cité les sommes des investissements publics nécessaires à l'économie nationale. Il s'agissait de quelque 324 milliards de roubles, y compris les 115 milliards de roubles que les membres de "Russie Unie" avaient demandés au premier ministre Mikhaïl Fradkov d'investir dans le social. Par la suite, ces suggestions ont été attentivement étudiées par l'administration du président et au ministère du Développement économique en vue de ne pas perturber les indices macro-économiques du budget qui est en fait le principal document économique du pays.

Etant donné que Vladimir Poutine a commencé son intervention sur les projets nationaux par une mise en garde: "nous ne pouvons dépenser que ce que nous gagnons", une flambée inflationniste n'est apparemment pas à craindre. Bien des économistes estiment notamment que les chiffres des dépenses cités par le Président ne dépassent même pas 0,5 % du produit intérieur brut (PIB). Néanmoins, en ce qui concerne les mécanismes d'exécution de ce plan véritablement grandiose, les dangers ne manquent pas: à commencer par le lobbying jusqu'à la corruption. Aussi, Vladimir Poutine a-t-il décidé de "coiffer" lui-même personnellement le travail du Conseil en charge de la réalisation de ce plan. Et tout porte à croire que le Président lie à ce plan sa principale mission et le bilan essentiel de ses huit années de présidence - faire de la Russie un pays prospère.

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