La Russie vue par la presse de la CEI et des pays baltes

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ESTONIE

Les médias locaux se montrent déçus par le refus de la Russie d'investir dans le secteur ferroviaire estonien. "La Russie souhaite augmenter le volume des marchandises qu'elle transporte à travers l'Estonie mais refuse de s'ingérer dans notre secteur ferroviaire, a annoncé l'une des plus influentes personnalités "du rail" de notre voisin de l'Est (...). (Le président de la Société des chemins de fer de Russie) Vladimir Iakounine prédit, pour le transit estonien, une croissance cinq fois moins importante que pour la Lituanie, et rejette l'éventualité d'investissements dans les chemins de fer estoniens" ("Erileht", 12.04).

Des articles constatent une approche purement pragmatique de l'Occident envers les problèmes qui marquent ses rapports avec la Russie. "Souvent, les nouvelles qui concernent la Russie sont négatives (...). On y évoque la géopolitique musclée de notre voisin de l'Est. Mais il n'en reste pas moins que la Russie représente toujours un marché très intéressant pour les investisseurs (occidentaux), grâce à son expansion rapide (...). Pragmatiquement, les libertés politiques en Russie gardent leur importance uniquement dans la mesure où elles exercent une influence sur les activités de leurs entreprises. Mais, dans l'ensemble, le Kremlin leur accorde une assez vaste marge de manœuvre" ("Erileht", 12.04).

LETTONIE

La presse de langue russe polémique avec les médias de langue lettonne qui reproduisent largement les rumeurs sur les tentatives des services secrets russes pour discréditer la présidente Vike-Freiberga. "La nouvelle hystérie antirusse pourrait avoir pour point culminant l'expulsion d'un diplomate russe (...). Des sources citent deux causes essentielles de cette nouvelle attaque contre la Russie. Premièrement, en prévision des élections, il faut que l'attention de l'électeur letton soit détournée des problèmes réels à l'intérieur du pays. Deuxièmement, des changements positifs se sont dessinés ces deux derniers mois dans les rapports bilatéraux (entre Moscou et Riga). On prépare notamment la rencontre des deux premiers ministres à Reykjavik, l'éventuelle signature d'un traité économique, les chefs de diplomatie doivent se réunir bientôt et un groupe chargé des questions migratoires va être constitué (...). Cela n'a pas l'air de plaire à tout le monde dans les milieux politiques de Lettonie car la "conception de l'ennemi" reste l'unique capital des radicaux" ("Vesti-segodnia", 18.04).

LITUANIE

La crise parlementaire qui a éclaté en Lituanie - le président du parlement Arturas Paulauskas a dû présenter sa démission - a provoqué des commentaires très négatifs de médias et des politiques du camp nationaliste conservateur qui craignent que cette situation ne fasse, en réalité, le jeu de la Russie. "Cette semaine, le champagne a dû couler à flots à Moscou (...). En quelques heures, les responsables politiques lituaniens ont fait ce à quoi les taupes du Kremlin aspiraient, sans beaucoup de succès, depuis des années, à savoir écarter de la diplomatie lituanienne celui qui défendait des valeurs nationales inacceptables pour Moscou (...). Arturas Paulauskas n'a jamais cessé de rappeler à Moscou l'occupation soviétique et le dédommagement du préjudice causé à son pays, ainsi que la nécessité de poursuites judiciaires contre les participants au coup d'Etat (en janvier 1991, ndlr.) et les criminels d'Etat, tout ce que le Kremlin a toujours refusé d'entendre, et pour longtemps encore, de la part de Vilnius." ("Lietuvos rytas", 15.04).

Dans une lettre du ministère russe de la Justice exigeant de la Lituanie d'appliquer des restrictions dans le rachat à la compagnie pétrolière russe Ioukos d'actions des raffineries lituaniennes Mazeikiu Nafta, les médias lituaniens ont vu la "main de Moscou". "Le gouvernement a raté une bonne occasion de racheter les actions de Mazeikiu Nafta pour les revendre à d'autres investisseurs et, en plus, il s'est retrouvé sous la coupe du Kremlin (...). Actuellement, les événements évoluent exclusivement en vertu du scénario du Kremlin: on s'attend à une faillite de Ioukos, après quoi les actions de MN seront saisies et, pour la dette de Ioukos, cédées à Moscou" ("Lietuvos rytas", 14.04.).

UKRAINE

Commentant les débats autour de la candidature du futur premier ministre, certains experts soulignent que les perspectives du développement politique et économique du pays dépendent de la capacité de Kiev à modifier sa politique étrangère. "Nos relations avec la Russie est une vraie guerre froide... Alors que l'Ukraine dépend de la Russie sur les plans tant économique qu'énergétique, le marché russe est pour l'instant plus commode pour l'Ukraine que le marché européen... Avec le corps diplomatique en place, les relations avec la Russie, déjà compliquées, vont s'aggraver davantage. Si, au contraire, le cabinet fait preuve de davantage de réalisme, on pourra normaliser les relations avec la Russie, ce qui aura une incidence positive sur l'économie... Personne n'a besoin d'une guerre froide avec la Russie" (From-ua, 12.04).

Certains périodiques prétendent que la Russie serait en train de réaliser, à l'égard de l'Ukraine, un programme dont l'objectif est l'asservissement économique de Kiev, voire la restauration de l'empire. "Quel que soit le nom du projet de Poutine, EEU ou CEI, son sort dépendra de la participation de l'Ukraine... Poutine et les autres responsables proches du Kremlin sont obsédés par l'idée de mettre la main sur l'Ukraine, de contrôler toutes les conduites de pétrole et de gaz de la région. Prise d'une nostalgie impériale... la Russie se permet de s'immiscer dans les affaires intérieures de ses voisins" (Korrespondent.net, 14.04).

L'intention, affichée par Moscou, de sortir du programme russo-ukrainien de conception de l'avion de transport An-70 est accueillie dans les médias comme une démarche de plus s'ajoutant à la campagne d'anéantissement économique de Kiev. Certains médias réclament une riposte adéquate. "Essence, gaz, produits d'élevage, aéronautique... Au lieu d'attendre une nouvelle attaque russe... le temps est venu de relever le loyer pour les radars de Moukatchevo et de Sébastopol" (Podrobnosti, 14.04).

MOLDAVIE

Les journalistes expliquent la suspension des importations de vins moldaves par la volonté de Moscou de "blesser au plus vif les pays "inamicaux". "Ces conflits économiques entre la Moldavie et la Russie ne sont rien d'autre qu'un message du Kremlin adressé aux autorités moldaves pour les mettre en garde contre une politique allant à l'encontre des intérêts russes" (Reporter.md, 13.04).

On affirme également que la campagne des pressions politiques et économiques de Moscou sur Chisinau risque de dégénérer en agression militaire. "Dans l'arsenal des Russes il ne manque que les armes conventionnelles... Pour torpiller toute décision sur la question transnistrienne en faveur de Chisinau, Poutine n'hésitera pas à user des méthodes musclées, d'autant plus que Moscou ne se gêne pas pour faire tirer les marrons du feu par les autres, plus précisément par (le leader transnistrien Igor) Smirnov" (Flux, 14.04).

ARMENIE

La cession à la Russie du 5e bloc de la centrale thermique de Razdan, décidée par le gouvernement en échange d'une promesse de Gazprom de ne pas relever le prix du gaz pendant trois ans, est à la "une" des médias qui regorgent de commentaires acerbes de la part des experts et des opposants. "Cette transaction s'inscrit dans une série d'opérations non rentables telles que la vente à la Russie des réseaux d'électricité pour 40 millions de dollars, leur valeur réelle étant de 200 millions... La Russie compte s'approprier toutes les infrastructures gazières arméniennes" (Aïkakan Jamanak, 12.04).

L'opposition prétend qu'une transaction avec l'Iran aurait été beaucoup plus avantageuse. "L'Iran était prêt à verser 150 millions de dollars pour relancer le 5e bloc qu'il envisageait d'alimenter en gaz iranien... Cette transaction, selon des estimations moyennes, aurait garanti à l'Arménie un bénéfice annuel de 100 millions de dollars pendant 20 ans, et le 5e bloc serait resté propriété arménienne" (Aïb Fe, 12.04). "Au lieu de se substituer au gaz russe, le gaz iranien sera un levier de plus dans les mains de Gazprom qui pourra à tout moment couper les fournitures venant d'Iran et exiger de l'Arménie un prix supérieur aux tarifs russes, ou encore imposer son propre gaz" (Aravot, 13.04).

GEORGIE

L'initiative de plusieurs députés russes proposant de limiter les virements bancaires vers la Géorgie en provenance de Russie a été accueillie comme le début d'une "guerre financière". "La Russie manifeste quotidiennement ses visées impérialistes à l'égard de la Géorgie. Soucieux de nous imposer un blocus économique, certains députés à la Douma ont fini par inventer l'interdiction des virements bancaires. En outre, les Russes ont déchaîné une campagne de dénigrement contre le thé géorgien... Ces responsables croient que si la Russie le prive de cette source de revenus, le gouvernement géorgien sera forcé d'accepter l'adhésion de la Russie à l'Organisation mondiale du commerce" (Rezonansi, 12.04). "Les Russes excellent dans le sadisme et la démagogie politiques. C'est sans doute la raison pour laquelle les grandes puissances évitent avec eux tout débat de principe et nous conseillent de normaliser les relations avec le grand voisin... Aujourd'hui, la Russie ne souhaite que déclarer une guerre de l'information, financière et économique à la petite Géorgie pour éradiquer son indépendance... La Russie est l'empire du sadisme politique" (Sakartvelos Respublika, 12.04).

AZERBAÏDJAN

La Russie est accusée de vouloir fermer à l'Azerbaïdjan l'accès au marché mondial des approvisionnements en hydrocarbures. "L'Azerbaïdjan s'est retrouvé au cœur d'une nouvelle intrigue pétro-gazière à la sauce politique qui se dessine en Europe, alors qu'on voit surgir de nombreuses forces extérieures, notamment au sein du secteur énergétique russe, soucieuses d'aggraver le conflit du Haut-Karabakh. L'approvisionnement du marché mondial en hydrocarbures caspiens par un corridor traversant l'Azerbaïdjan et contournant la Russie va à l'encontre des intérêts impériaux de Moscou" (Ekho, 18.04).

Les médias estiment que la présence en Russie de main-d'œuvre étrangère lui apporte un bénéfice qui dépasse largement les pertes liées aux virements bancaires à l'étranger. "Moscou déclare que, ces dernières années, les quelques 3 millions d'Azerbaïdjanais qui travaillent en Russie ont envoyé tous les ans dans leur pays près de 2 milliards de dollars. Un chiffre qui inquiète tout le monde, des responsables politiques au dernier clochard, et qui permet d'affirmer que les immigrés azerbaïdjanais mangent le pain des Russes... Les préoccupations de la Russie suscitées par la fuite des capitaux sont dénuées de tout fondement... Selon les statistiques russes... la contribution (annuelle) des Azerbaïdjanais à l'économie russe s'élève à 12,5 milliards de dollars" (Ekspress, 12.04).

KAZAKHSTAN

La mise en place d'un Espace économique unique (EEU) regroupant la Russie, la Biélorussie, le Kazakhstan et partiellement l'Ukraine fait partie des thèmes abordés par les médias. Les commentateurs pointent du doigt l'impréparation de l'Ukraine, mais aussi l'incohérence des intérêts et des objectifs des autres membres de l'EEU. "Le Kazakhstan, par exemple, est insatisfait de la politique tarifaire russe dans le domaine des transports par pipelines et par rail... La Russie a des réclamations vis-à-vis de la Biélorussie qui freine la mise en place d'une coentreprise sur la base de Beltransgaz et continue de tirer des recettes d'exportation colossales grâce aux hydrocarbures russes bon marché" (KZ-today, 14.04).

La suspension des importations russes de vins géorgiens et moldaves pourrait, selon les médias, ouvrir des créneaux pour les viticulteurs kazakhs sur le marché russe. "Il est clair que nous assistons à une grande guerre qui sera probablement de longue durée. Mais la Russie a toujours bu, et elle continuera à boire. D'où une chance pour les viticulteurs kazakhs de s'imposer sur le marché du vin russe. Naturellement, il faut pour cela apprendre à fournir une production de qualité" (Liter.kz, 14.04).

KIRGHIZIE

La situation des travailleurs immigrés d'origine kirghize dans les pays de la CEI reste traditionnellement au centre de l'actualité. Cette fois-ci, les périodiques commentent avec optimisme les démarches déployées par les autorités régionales russes pour séduire la population kirghize. "Une petite ville kirghize au cœur de Samara, en Russie. Le rêve de nos compatriotes commence à se réaliser. Le puissant voisin a enfin accordé aux Kirghizes un lopin de terre. Le gouvernement russe a sacrifié une partie de ses terres pour y faire construire des logements. La cité kirghize mettra du baume au cœur à nos compatriotes qui ne s'attendent plus à des pièges bureaucratiques" (KOORT, 14.04).

OUZBEKISTAN

Le sort des travailleurs immigrés reste l'un des thèmes préférés de la presse d'opposition qui dénonce une montée de l'extrémisme et de la xénophobie en Russie. "Dans la société russe, en dépit du caractère multiethnique du pays, les tendances pronazies restent assez fortes et constituent une menace, et non seulement pour les immigrés. Le slogan "La Russie aux Russes" lèse les intérêts d'autres habitants de la Fédération de Russie qui dénombre 21 républiques, sans oublier les autres entités autonomes, peuplées par des représentants de différentes ethnies. Mais il semble que cette partie de la population qui soutient les slogans pronazis en est peu consciente" (Ferghana.ru, 14.04).

TADJIKISTAN

Les tensions se multiplient autour du projet de centrale hydraulique de Rogoun: cela fait trois ans qu'on n'arrive pas à se mettre d'accord sur le type et la hauteur du barrage. La presse suppose que Rusal n'ait plus de ressources pour financer les travaux. "Il semble que Rusal soit en pénurie de ressources... Il espère obtenir des crédits, vraisemblablement sous les garanties de notre gouvernement. On voudrait bien savoir combien la construction de Rogoun va coûter au Tadjikistan et, l'important, qui en sera le propriétaire. Nos frères iraniens viennent de manifester un excellent exemple à suivre. Ils construisent avec nous une centrale hydraulique qu'ils remettront dix ans plus tard au Tadjikistan" (Biznes i politika, 13.04).

Nombre de publications traitent la montée des crimes à caractère nationaliste en Russie. Les journalistes l'expliquent par une aggravation de la situation économique et sociale de la plupart des Russes de souche. "Selon des agences d'information russes et étrangères, des groupes de russophones chauvins aident les forces de l'ordre de certaines villes russes à disperser les manifestations de protestation contre la politique socio-économique ou ethnique de l'administration russe en place" (Vetcherni Douchanbe, 14.04).

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