Missile Boulava: l'espoir de la Marine de guerre russe

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Par Nikita Petrov, RIA Novosti
Par Nikita Petrov, RIA Novosti

Le 18 septembre, la Russie a tiré un missile intercontinental Boulava (SS-NX-30, selon la classification occidentale) depuis le croiseur sous-marin lourd lanceur d'engins "Dmitri Donskoï" (projet 941, de type "Typhoon" selon la classification de l'OTAN).

Le tir a été effectué depuis la mer Blanche. Selon un porte-parole de la Marine russe, "les têtes du missile ont atteint leurs cibles sur le polygone de Koura, dans la péninsule du Kamtchatka (Extrême-Orient russe)". "Les données télémétriques sur le tir et le vol du missile sont actuellement traitées mais on peut dès à présent affirmer que le tir et le vol du missile se sont déroulés comme prévu", a constaté le militaire.

Il est encore difficile de dire si c'est vraiment le cas ou non. Les tests du Boulava, destiné à équiper le nouveau sous-marin nucléaire lanceur d'engins "Iouri Dolgorouki" (projet 955 ou classe Boreï selon la classification de l'OTAN) et ses deux "confrères" qui sont actuellement en construction dans les chantiers navals Sevmash à Severodvinsk, dans la région d'Arkhangelsk - le "Vladimir Monomaque" et le "Alexandre Nevski" - se déroulent dans le plus grand secret. Les informations relatives à l'échec ou à la réussite des essais ne parviennent que très rarement jusqu'à la presse, et ce, parfois longtemps après les tests. Les spécialistes commentant ces essais restent toujours sous couvert de l'anonymat.

Le Boulava est directement lié aux grands espoirs du pays et de sa Marine de guerre, mais aussi aux problèmes qu'affronte l'industrie russe de défense depuis plus de quinze ans déjà. Comme dans chaque nouvelle affaire, il existe également des intrigues entre les différents groupes de constructeurs qui sont intéressés, selon le cas, par le succès ou l'échec du projet.

C'est l'Institut des technologies thermiques de Moscou (MIT) qui a été chargé de créer ce nouveau système de missiles destiné à équiper les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de classe Boreï. Cet institut est renommé pour la construction des missiles stratégiques Topol (code OTAN: SS-25 Sickle) et Topol-M (SS-27), basés en silo ou au sol. Ces systèmes devraient constituer, aujourd'hui comme dans l'avenir, la base des forces stratégiques russes de dissuasion. Le Boulava fait également partie des forces de dissuasion nucléaire. Les systèmes de missiles utilisés actuellement par la Marine de guerre, de même que les sous-marins nucléaires porteurs d'engins, épuiseront leur potentiel technique d'ici dix ou quinze ans et devront être remplacés par des armes plus efficaces et de plus haute précision. Les sous-marins de classe Boreï (projet 955) représentent donc l'espoir de l'armée russe.

Or, l'institut en question n'avait encore jamais fabriqué de missiles pour la Marine de guerre. Mais depuis 1998, cette organisation est chargée de la création d'un missile destiné à équiper les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de classe Boreï. Sa tâche initiale consistait à concevoir un missile pouvant être tiré depuis un submersible, ayant une portée de 8.000 kilomètres et possédant jusqu'à dix ogives à guidage individuel capables de percer n'importe quel bouclier antimissile, mais il devait aussi être relativement léger pour sa classe, de sorte que sa masse ne dépasse pas 30 à 40 tonnes. Le Boulava-30, aujourd'hui appelé Boulava-M, possède toutes ces caractéristiques.

Cependant, la moitié des essais de ce missile (huit en tout) ont échoué, ce qui est, d'un certain côté, tout à fait explicable. Pas un seul missile, que ce soit en Russie ou à l'étranger, n'a été tiré avec succès dès la première tentative. C'est justement pour révéler d'éventuels défauts et les réparer par la suite que l'on procède à des essais. La simulation sur ordinateur, largement utilisée de nos jours, est incapable de prévoir avec précision comment va réagir un système dans des conditions réelles. En particulier dans les eaux maritimes, qui sont huit cents fois plus denses que l'air. Faire en sorte qu'un missile tiré depuis un sous-marin en marche perce cette couche d'eau a toujours été une tâche très difficile pour les concepteurs.

D'autre part, le professionnalisme des employés de l'industrie de la défense s'étant - malheureusement - beaucoup détérioré, certains éléments des missiles qui parviennent à l'usine de Votkinsk, assurant l'assemblage des Boulavas, se révèlent être défectueux, même s'ils sont normalement soigneusement vérifiés avant d'être admis à l'usine.

Quoi qu'il en soit, le Boulava s'améliore à chaque essai. Le dernier tir effectué, le 18 septembre dernier, en est la preuve. Il n'est pas exclu que les experts décèlent certains défauts. Le public en sera informé plus tard, même si la création de cette nouvelle arme est entourée de mystère. Il est impossible de ne rien laisser filtrer lorsque tout le monde, et notamment les concurrents de la Russie, utilise des appareils télémétriques de contrôle et de surveillance.

Espérons toutefois que le missile Boulava-M (SS-NX-30), de même que le premier sous-marin nucléaire lanceur d'engins de classe Boreï "Iouri Dolgorouki" (projet 955), qui est bloqué au chantier depuis douze ans, seront finalement mis en service, comme prévu, au début de l'année prochaine.

Le "Alexandre Nevski" et le "Vladimir Monomaque" devront ensuite tenir compagnie au "Iouri Dolgorouki" [les trois sous-marins ont été baptisés en l'honneur des grand-princes de la Russie ancienne - ndlr.]. Il est prévu de construire au total entre six et huit sous-marins lanceurs d'engins de ce type. Le "Iouri Dolgorouki" possède douze silos de lancement tandis que les autres en auront seize.

Si ces projets sont mis à exécution, les forces nucléaires maritimes russes constitueront un moyen de dissuasion sûr contre n'importe quel agresseur potentiel au XXIe siècle.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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