Interdiction du port d'armes: une panacée?

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Par Vlad Grinkevitch, RIA Novosti
Par Vlad Grinkevitch, RIA Novosti

Le citoyen, a-t-il le droit de défendre sa vie et sa propriété les armes à la main? Cette question soulève immanquablement des discussions houleuses tant au sein des personnalités publiques que des simples gens. La pratique montre que le permis de port d'arme à feu n'entraîne pas une croissance du nombre de crimes, bien au contraire. Il contribue souvent à le réduire, et la plupart des craintes liées aux armes sont dues au manque d'informations objectives.

Il existe en Russie une multitude de mythes relatifs aux armes civiles. L'un d'entre eux veut que les Russes soient les gens les plus désarmés du monde. Or, ce n'est pas le cas. Depuis 1994, tout Russe capable juridiquement et n'ayant aucun casier judiciaire a le droit d'acheter et de posséder sous licence des armes à canon long (fusils à canons double et à répétition, semi-automatiques ou à rechargement manuel) afin de se défendre.

La Russie occupe une place intermédiaire en matière d'armes civiles. D'une part, elle a peu en commun avec Israël, les Etats-Unis ou la Finlande, où la loi ne limite guère le droit des citoyens à acheter, posséder et porter des armes. D'autre part, elle diffère également de la Grande-Bretagne ou de l'Australie, dont les autorités ne cessent de durcir la législation dans ce domaine.

D'ailleurs, les lois russes limitent au plus haut degré la possibilité d'utiliser des armes à feu à des fins d'autodéfense. Qui plus est, un fusil à canon long ne peut pas être considéré comme le meilleur moyen de se défendre. Les armes à feu courtes, à savoir les revolvers et les pistolets, y conviennent beaucoup mieux. Mais il est interdit aux citoyens d'en posséder.

C'est le juriste italien du XVIIIe siècle Cesare Beccaria qui a le mieux défendu le droit des citoyens à porter des armes, en expliquant que les lois prohibant le port d'arme ne désarment que ceux qui n'ont aucune intention de commettre des crimes. En revanche, elles aident les agresseurs et nuisent à leurs victimes, en favorisant les crimes au lieu de les empêcher, selon lui.

Les critiques de l'autorisation du port d'armes à feu courtes en Russie, et du port d'arme civil en général, avancent de nombreux arguments. Le plus populaire est le suivant: "Savez-vous ce qui se passerait si l'on donnait des armes à nos citoyens? Ils s'entretueraient!". Cependant, les statistiques ne confirment pas ces arguments.  

La loi sur les armes, qui autorise les citoyens à acheter des fusils à long canon à des fins d'autodéfense, est en vigueur depuis presque quinze ans. Les Russes ont accumulé depuis plus de 5 millions d'unités d'armes, mais le nombre de délits pénaux liés à l'utilisation d'armes légales n'a augmenté que de 0,5% sur cette période. Chaque année, près de 20.000 crimes et délits avec utilisation d'armes sont commis en Russie, mais seuls quelques centièmes de pour cent d'entre elles sont des armes légales. En moyenne, un détenteur d'arme sur 40.000 seulement se décide, pour une raison ou une autre, à transgresser la loi en l'utilisant.

L'expérience mondiale montre que non seulement le permis de port d'arme n'entraîne pas une hausse de la délinquance, mais que, par ailleurs, sa prohibition peut la favoriser. Par exemple, les villes où le port d'arme est prohibé - telles que Washington, Chicago ou New York - se distinguent par un taux de criminalité très élevé. Au contraire, dans les Etats qui ont introduit des licences pour le port d'arme dissimulé, on constatait une diminution considérable du nombre de crimes et délits liés à la violence contre la personne (homicides, brigandages, viols).

Qu'est-ce qui pousse donc les Etats à désarmer leurs citoyens? Il s'agit souvent d'une réaction aux cas de violence "non motivée". Mais les Américains et les Européens gardent fusils et pistolets à la maison depuis des siècles, alors que la vague de fusillades massives ne s'est élevée qu'au cours de ces dernières décennies. Les psychologues font de plus en plus souvent remarquer que ce sont les représentants de la génération ayant grandi devant le petit écran ou l'ordinateur qui font usage d'armes.

Or, les assassinats massifs peuvent être commis même sans pistolet et sans fusil. Prenons l'exemple de la Belgique, où, au début de l'année, un chômeur a pénétré dans une crèche et tué deux bébés et une assistante maternelle en utilisant un couteau. Ou celui de Moscou, où un homme a volé une voiture et renversé 16 personnes, "en signe de protestation sociale", comme il a déclaré plus tard. Il ne vient cependant à personne l'idée de prohiber les couteaux et les voitures. A propos, ces dernières ont tué en Russie 30.000 personnes l'année dernière.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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