Le problème de l'accueil des immigrés divise l’Europe

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Le "printemps arabe" menace d'apporter de sensibles corrections aux relations entre les européens au niveau social.

Le "printemps arabe" menace d'apporter de sensibles corrections aux relations entre les européens au niveau social. Ces relations sont déjà détériorées par la question locative. Plus précisément: quel logement est le plus approprié à l’accueil des immigrants clandestins? Et s’ils désirent se rendre dans un pays, pourquoi un autre pays devrait-il en souffrir?

Ces immigrants économiques ont "pris d’assaut" le Vieux Continent immédiatement après le début de la vague révolutionnaire, d’abord en Tunisie, puis en Egypte, ensuite en Libye, au Yémen, en Jordanie, en Syrie, au Bahreïn

L’Italie et Malte, avant-postes du passage des clandestins en Europe, sont convaincues que toute l’Union européenne doit les aider à régler le problème des immigrants, car elles ne sont pas "extensibles", que leurs ressources sont épuisées et qu'il leur faut plus d’argent. Le centre, l’Est, le Nord et l’Ouest européens ne partagent pas ce point de vue.

A partir du 11 avril, les ministres de l’Intérieur, de la Justice et des Affaires étrangères de l’UE ont discuté pendant pratiquement trois jours à Luxembourg, mais ils n’ont pas réussi à s’entendre sur le partage du fardeau. Les débats étaient si enflammés qu’on a frôlé les attaques personnelles.

Mais on en est venu tout de même aux menaces. Le ministre italien de l’Intérieur Roberto Maroni a déclaré à l’issue des réunions que l’Italie réfléchirait à l'utilité de rester au sein de l’Union européenne. "Il s’avère que lorsque l’Italie apporte sa contribution au fonds de rachat de l’euro (l’aide à la Grèce et au Portugal), aux guerres (l’opération en Libye), tout va bien. Mais en ce qui concerne cette question concrète d’entraide, les pays de l’UE ne font preuve d’aucune solidarité." Et il est retourné à Rome très irrité.

Maroni appartient au parti de la Ligue du Nord de la coalition au pouvoir de Silvio Berlusconi qui est considéré comme un parti d’extrême-droite. Ce mouvement prône l’interdiction totale de l’immigration. Et si elle n'est pas interdite, il est prêt à initier la procédure de sécession du Nord et du Sud de l'Italie. Ainsi, le problème des clandestins est également un problème intrapolitique de l’Italie. Dans le contexte de la tendance générale de l’abandon du multiculturalisme par l’Europe, la colère provoquée par l’afflux des étrangers et l’hostilité envers les immigrants, ces problèmes sont cruciaux pour la survie de tout politicien et tout parti. Le politiquement correct et la tolérance en Europe ne sont pas des mots très à la mode de nos jours. Notamment, dans le Sud du continent.

Le Sud traverse en effet une période difficile en termes de relations avec ses voisins de l’autre côté de la plus européenne des mers. Voici les statistiques du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. En 2010, 25.000 clandestins sont arrivés sur l’île italienne Lampedusa (elle est deux fois plus proche de la Tunisie que de la Sicile). Cette année, 23.000 réfugiés ont débarqué à Lampedusa et à Malte voisine au cours des deux dernières semaines du mois de mars. 200.000 réfugiés fuyant la Libye ont choisi la Tunisie et 160.000 se sont rendus en Egypte. Il est clair qu’ils n’y resteront pas longtemps et vont tenter d’atteindre l’Europe. Deux options sont possibles: rejoindre l'Italie par la mer ou la Grèce en effectuant un grand détour par voie de terre.

Lampedusa, candidat au prix Nobel de la paix!

La population de Lampedusa, île de 20 kilomètres carrés qui ne possède pas de sources d’eau potable (on y récolte l’eau de pluie et on dessale l’eau de mer), est d'environ 5.000 habitants. Toute l’île vit du tourisme et lorsque le nombre de clandestins eut dépassé 6.000 personnes, les habitants de l’île se sont révoltés et ont commencé à saccager la municipalité. Même le premier ministre italien Silvio Berlusconi s’y est rendu spécialement (entre deux procès) et a promis aux habitants de nettoyer l’île en 60 heures, de diminuer les impôts et d'introduire des avantages fiscaux supplémentaires, d’acheter tous les bateaux des clandestins abandonnés dans le port principal ("à la retraite je me lancerais dans la pêche", a déclaré Berlusconi) et a annoncé que par solidarité il avait déjà acheté une villa sur l’île (le tourisme est la principale source de revenu des habitants).

Enfin, Berlusconi a promis de proposer la candidature de Lampedusa au prix Nobel de la paix. Ce n’est pas une plaisanterie.

Et il est reparti au tribunal. Littéralement deux jours plus tars, 1.700 policiers sont arrivés sur l’île et ont commencé à évacuer les clandestins tunisiens et libyens à destination de la région des Pouilles au Sud-Est de l’Italie. Mais les habitants de cette région, où se trouvent de nombreux centres balnéaires, ont commencé à protester également: la saison touristique est sur le point de commencer.

Depuis fin février, le gouvernement de Berlusconi demande à l’Union européenne d’accorder à Rome des fonds pour les soins médicaux, l’alimentation et l'expulsion des réfugiés. Mais seulement 18 millions d’euros ont été proposés à Rome au lieu des 200 millions d’euros demandés. Les Italiens sont surtout indignés par le fait que les jeunes Arabes qui arrivent à pénétrer sur le territoire français sont renvoyés non pas dans leur pays d’origine, mais en Italie. Cela signifie que leur reconduite à la frontière sera prise en charge par l’Italie. Au cours de toutes les dernières réunions, une aide supplémentaire a été refusée à l’Italie, car le flux des clandestins n’a pas été considéré comme suffisamment important pour justifier l'octroi de subsides.

Et les Italiens n’ont pas hésité à prendre une décision de Salomon. Ils ont commencé à distribuer aux clandestins des titres de séjours européens sans le consentement de leurs voisins européens.

L’Italie s’est simplement mise à octroyer aux immigrés des permis de séjour provisoires dans l’espace Schengen. Selon la législation de l’Union européenne, ces documents permettent de se déplacer librement dans cette zone.

Cette mesure a été prise afin de jouer un mauvais tour à la France, où la majorité des réfugiés économiques tunisiens souhaitent se rendre. Les Français ont tiré la sonnette d’alarme en découvrant à la frontière avec l'Italie des groupes de Tunisiens, dont certains comprenaient 500 personnes, progressant en territoire français. Interrogés sur la manière dont de telles "colonnes" avaient pu traverser l’Italie du Sud au Nord en passant inaperçues, l’Italie répondait aux collègues français qu’elle n’en avait aucune idée. Puis un phénomène similaire a été observé à la frontière autrichienne. Paris et Vienne ont menacé de fermer leurs frontières. Cela n’aurait pas encore signifié la fin de l’espace Schengen, mais pas loin.

En fait, le seul soutien que les voisins du Nord, à savoir l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, la Hongrie, la Norvège, le Portugal et l’Espagne, se sont engagés à fournir à l’Italie et à Malte consiste à accueillir 100 (!!!???) clandestins chacun.


L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

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