Baisse de la cote de popularité de Poutine: la rançon du succès

© RIA Novosti . Yana Lapikova / Accéder à la base multimédiaVladimir Poutine
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La cote de popularité de Vladimir Poutine, facteur de stabilité en Russie pendant des années, a accusé un fléchissement en fournissant un sujet de réflexion aux journalistes et aux sociologues.

La cote de popularité de Vladimir Poutine, facteur de stabilité en Russie pendant des années, a accusé un fléchissement en fournissant un sujet de réflexion aux journalistes et aux sociologues. Le Centre Panrusse d'étude de l'opinion publique (VTsIOM) a créé un scoop en faisant remarquer dans son étude publiée jeudi dernier que  la cote de popularité du premier ministre russe était actuellement de 51%.

Or, avant les élections législatives du 4 décembre, la moyenne mensuelle de la popularité du premier ministre se maintenait à 61% et faisait preuve d’une stabilité impressionnante avec des fluctuations de 1-2% seulement.

Deux questions se posent: savoir ce qui s’est produit et ce que Vladimir Poutine devrait entreprendre afin de remédier à cet état des choses. Quant aux motifs de l’événement, les sociologues les formulent facilement en évoquant les résultats relativement faibles du parti Russie Unie aux législatives, la déception d’une grande partie de la société par le "roque" Poutine-Medvedev annoncé le 24 septembre et même par les fluctuations saisonnières de la cote de popularité qui seraient liées à l’atmosphère généralement dépressive du mois de décembre.

Le directeur adjoint du Centre analytique Levada, Alexeï Grajdankine, fait remarquer une autre source possible du mécontentement de la population, à savoir l’effort du gouvernement pour passer les problèmes sous silence. La manie de ne parler que des succès et de taire les problèmes, caractéristique de la campagne législative de Russie Unie, a porté ses fruits dont l’opposition a bénéficié.

"Tout effort pour passer sous silence les événements dans le pays, de les éluder et de refuser d’y réagir, nuit à la perception par la population du travail des dirigeants du pays. Après la catastrophe du sous-marin Koursk (en août 2000 - ndlr), Poutine s'est dérobé pendant un certain temps à tout commentaire et a gardé le silence. Finalement, au cours de cette période, sa cote de popularité a chuté de 8 points, fait remarquer Alexeï Grajdankine. Au cours de la dernière campagne législative, le Kremlin a également souvent réagi de cette manière à diverses questions en refusant de fournir des explications."

Valeri Fedorov, directeur du VTsIOM, qui a publié le premier les statistiques à sensation sur la cote de popularité de Poutine, estime que le premier ministre russe est, dans une certaine mesure, victime de son propre succès.

"Sous Vladimir Poutine (depuis 2000 – ndlr), la société russe s’est remise d’aplomb, le passé ne la tente plus, elle exige du nouveau et du meilleur, a commenté Valeri Fedorov les résultats de son enquête dans un entretien accordé à RIA Novosti. Or, un homme politique qui brigue un troisième mandat présidentiel doit offrir à la société une version améliorée de lui-même.

Un Poutine version 2.0 est vraiment indispensable pour remporter la victoire. Le premier ministre en est conscient mais il n’est pas pressé d’étaler tous les changements. Le fait est qu’une très grande partie de la société apprécie justement l’ancien Poutine, et perdre le soutien de cette frange de l'électorat est encore plus dangereux que d'échouer à s’assurer la sympathie de la "classe moyenne", impatiente et qui a acquis une réelle aisance matérielle."

Selon M. Fedorov, la demande de renouveau est le signe d’une société qui se trouve sur la bonne voie, et elle différencie favorablement les Russes d’aujourd’hui des participants aux élections législatives de décembre 1995 suite auxquelles les communistes ont créé la fraction la plus nombreuse au parlement russe.

"Si la population est nostalgique du passé, cela dénote une frustration très grave au sein de la société due à la destruction de son mode de vie habituel et au fait qu’on ne lui offre rien en échange, fait remarquer Valeri Fedorov. C’est ce qui se produisait très largement dans les années 1990."

La baisse actuelle de la cote de popularité de Vladimir Poutine ne provient pas de la nostalgie mais, au contraire, d’une aspiration à des changements rapides. La demande de renouveau se manifeste dans toutes les couches de la société, non seulement au sein de l’opposition radicale. Et Vladimir Poutine est bien contraint de réagir à cette demande.

Toutefois, contrairement aux dernières années d’existence de l’URSS, lorsque la population exigeait également des changements, les Russes d’aujourd’hui ont une vision nettement moins idéaliste des hommes politiques et n’attendent d’eux aucun miracle du genre de l’alignement du niveau de vie dans l’île de Sakhaline (Extrême-Orient russe) sur les normes japonaises.

"Les Russes ont désormais une attitude sobre mais exigeante envers les hommes politiques, notamment envers Poutine, a résumé Valeri Fedorov. L’envergure des infractions aux législatives de 2011 n’a pas été supérieure à celle de 2007. La situation n’a pas changé dans les bureaux de vote, c’est l’attitude de la population envers cette situation qui n’est plus la même."

Alexeï Markine, vice-président du Centre de technologies politiques, averti qu’il serait prématuré de conclure que les derniers sondages présagent un rétrécissement continu de la cote de popularité de Vladimir Poutine jusqu’à celle du président ukrainien Viktor Iouchtchenko ou de Boris Eltsine à la fin de leur mandat (une cote allant de 4 à 10%). Selon Alexeï Markine, la popularité du premier ministre russe restera élevée pendant plusieurs années encore et oscillera entre 35 et 50%.

"C’est ce qu’on appelle la majorité paternaliste: les personnes qui apprécient surtout la stabilité et la protection sociale", c’est ainsi que Valeri Fedorov explique les secrets des "limites de la patience." "Afin de se maintenir au pouvoir, Vladimir Poutine devrait ménager cet électorat et ne pas le repousser. Parallèlement, il lui faudrait accéder aux demandes du nouvel électorat, qui n’affiche pas ces velléités paternalistes."

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

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