Pourquoi les voitures électriques ne sont pas aussi écologiques qu'on le pense

© RIA Novosti . Daniil Nizamutdinov, Vladimir DobrovolskiyPourquoi les voitures électriques ne sont pas aussi écologiques qu'on le pense
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Les voitures électriques, présentées en nombre au Mondial de l'auto à Paris, n'améliorent pas vraiment la situation écologique sur notre planète.

Les voitures électriques, présentées en nombre au Mondial de l'auto à Paris, n'améliorent pas vraiment la situation écologique sur notre planète.

La Mercedes-Benz SLC Electric Drive, forte d'une puissance de 740 chevaux, était l'un des clous du Mondial de l'auto 2012, qui a ouvert ses portes le week-end dernier. A deux jours de l'ouverture du Salon à Paris, de l'autre côté de La Manche, le véhicule électrique anglais Nemesis établissait un record de vitesse de 244 km/h lors d'un essai près de la ville d'York.

S'ils sont déjà devenus les plus puissants et les plus rapides de leur catégorie : que souhaiter de plus pour les véhicules "verts"? Aussi paradoxal que cela puisse paraître, il serait préférable qu'ils soient désormais un moyen de transport propre – car ils polluent l'environnement de la même façon, voire davantage, que les voitures à essence.

Une première preuve est apportée si l'on observe d'où provient l'électricité qui recharge ces véhicules électriques, et que l'on calcule le coefficient de performance de l'ensemble de la chaîne : centrale électrique – lignes à haute tension – voiture électrique. Car la voiture elle-même ne bougera pas d'un centimètre sans batteries chargées.

La propreté écologique douteuse des voitures électriques n'est pas un secret pour les gouvernements et les organisations supranationales qui les promeuvent. C'est pourquoi ils doivent former le marché des voitures électriques par des méthodes non marchandes.

Une voiture avec sonnerie

Le confort de la voiture électrique est indéniable. Le conducteur dispose seulement d'un volant, de deux pédales, et un porte-gobelet prend l'emplacement du levier de vitesse comme pour souligner le confort de l'électrocar.

Les moteurs électriques sont également moins chers à l'entretien. Les révisions sont trois à quatre fois moins fréquentes que pour un moteur à explosion. En cas d'accident, le véhicule ne prendra pas feu, n'explosera pas et au quotidien, le moteur ne fait aucun bruit - ni à l'intérieur ni à l'extérieur du véhicule - ce qui crée, toutefois, un danger pour les piétons. C'est la raison pour laquelle on parle actuellement d'équiper les voitures électriques de sonneries, afin que les passants les entendent approcher grâce à leur mélodie.

Par ailleurs, les véhicules de série classe-C – type Ford Focus - n'ont rien d'une simple attraction pour enfants. Ils atteignent 100 km/h en 5 secondes et peuvent rouler à une vitesse de 130-140 km/h, ou encore parcourir 300 kilomètres sans recharger les batteries.

Sans le problème du faible nombre de stations-service pour "faire le plein" et le coût, la voiture électrique deviendrait dès aujourd'hui un sérieux concurrent pour les véhicules essence. Mais il n'existe, pour l'instant, aucun réseau développé de stations spécialisées et les promoteurs utilisent aujourd'hui d'autres arguments de vente.

Un super crédit pour une super voiture

D'après la législation de l'Union européenne, l'émission de CO2 par les voitures fabriquées sur son territoire ne devra pas dépasser 130g au kilomètre en 2015, et 95g de CO2/km en 2020.

A partir de 2012, le non-respect des normes indiquées exposera les constructeurs automobiles à une amende, fixée pour chaque véhicule à 5 euros pour 1g de CO2 dépassé, 15 euros pour 2g, 25 euros pour 3g, et 95 euros pour chaque gramme supplémentaire.

Sur les sites des concessionnaires, il est facile de trouver les caractéristiques des voitures Mercedes, BMW et d'autres constructeurs qui font la fierté de l'industrie automobile européenne, et de constater que beaucoup de leurs modèles n'entrent pas dans les normes d'émission européennes.

Cependant, les constructeurs ne risquent pas la faillite pour autant. Parallèlement à l'adoption, en 2009, des pénalités sur l'émission de CO2, ils ont obtenu un droit aux super-crédits.

Cette politique implique que chaque nouveau véhicule émettant moins de 50g de CO2 au kilomètre comptera, pour le constructeur en 2012 et 2013, comme 3,5 voitures dont l'émission est supérieure à la norme, pour 2,5 voitures en 2014 et pour 1,5 véhicule en 2015. À partir de 2016, les super-сrédits seront supprimés. 

Aujourd'hui, seuls les véhicules électriques peuvent afficher une émission de CO2 inférieure à 50g/km. Ils n'émettent même aucun gaz. Or, même les voitures hybrides les plus modernes n'émettent pas plus de 130g/km – mais le compte est encore loin des 50g/km. La fameuse Toyota Prius Hybrid émet, par exemple, 89g de CO2 par kilomètre.

L'objectif d'une telle politique était, tout d'abord, d'empêcher l'augmentation de l'émission des gaz à effet de serre, en hausse constante à cause des moyens de transport et qui atteignent aujourd'hui dans la région 12% des émissions totales de CO2. Deuxième objectif : réduire la consommation de carburant pour 2020 jusqu'à 4,1l/100km d'essence ou 3,6l/100km de gasoil, c'est-à-dire réduire la dépendance pétrolière de l'Union européenne.

L'origine de l'électricité

L'annuaire de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), Key World Energy Statistics 2011, montre que l'électricité est obtenue principalement en brûlant du charbon – cette technique représente 40,6% de la production mondiale d'électricité. Le charbon est suivi par le gaz naturel (21,4%). Par ailleurs, la part d'électricité fabriquée par les barrages, qui ne demande aucune combustion, s'élève à 16,2%. Les centrales nucléaires produisent quant à elles 13,4% de l'électricité dans le monde et enfin, le pétrole atteint 5,1%. Les sources d'énergie renouvelables – les sources naturelles de chaleur, dont l'énergie géothermique, solaire ou éolienne, ainsi que le biocarburant et les déchets – représentent 3,3%.

En d'autres termes, 67,1% du courant électrique mondial résulte encore de la combustion d'hydrocarbures. Un peu plus, même, car si le biocarburant et les déchets font partie des sources d'énergie renouvelables, il faut tout de même les brûler pour obtenir de l'électricité.

Il serait juste d'y ajouter les centrales nucléaires. Formellement, elles ne sont pas polluantes, lorsqu'elles sont intactes, mais les isotopes radioactifs des réacteurs de Tchernobyl, de Fukushima et de certaines autres centrales accidentées continuent jusqu'à aujourd'hui de circuler dans notre écosystème.

Bien sûr, toutes ces sources d'électricité "n'ozonisent" pas l'environnement. La question est de savoir dans quelle mesure l'essence des voitures est plus polluante.

Autant d'émissions, mais plus éloignées

Le coefficient de performance du moteur électrique le plus moderne s'élève à 95%.

Celui d'une centrale atteint près de 40%. Pendant le transit par les lignes à haute tension, la perte est d'environ 10%. Dans le réseau urbain et en rechargeant la batterie à partir d'une prise électrique, la perte est de 5 à 10%. Autrement dit, dans le meilleur des cas, le coefficient de performance de l'ensemble du système est de 43% - dans le pire, il ne s'élève qu'à 38%. 

Soit la performance des moteurs diesel aujourd'hui sur le marché. Les moteurs à essence sont en retard mais en général, leur coefficient est déjà supérieur à 30%.

Il s'avère que pour chaque kW (ou cheval) de puissance, une voiture électrique brûle environ autant d'unités conventionnelles de charbon ou de mazout qu'un moteur à explosion classique brûle d'essence ou de gasoil. 

Seule différence, l'"émission" de la voiture électrique se produit en un point très éloigné et en soi, elle ne pollue donc pas l'air. Pour les grandes villes, ce genre de véhicules est donc une délivrance du point de vue écologique.

En clair : un passage total à la voiture électrique n'allégera pas les souffrances des ours polaires face au réchauffement climatique mais l'air deviendra plus respirable dans les villes.

Même les verts, qui devraient faire l'éloge du transport électrique, se plaignent. Selon leurs calculs, il s'avère qu'une hausse de 10% des ventes de voitures électriques augmenterait les émissions de gaz à effet de serre de 20%.

Pour essayer de sortir de cette situation controversée, les verts exigent que les véhicules électriques ne puissent être rechargés qu'avec de l'électricité obtenue par des moyens écologiquement propres.

Leurs calculs ne pourront pas être ignorés. La Commission européenne se penche sur leurs estimations et prendra ensuite une décision.

Le second avènement

Par ailleurs, les chiffres de 500 000 voitures électriques vendues par an sont une exagération des médias. Cette statistique est gonflée par le fait que, dans ce calcul, l'on prend également en compte les voitures dont le moteur électrique n'est qu'auxiliaire. 

Ces voitures hybrides sont des VEH (Véhicule électrique hybride) ou VHER (Véhicules hybrides électriques rechargeables). Les premières ont un moteur électrique supplémentaire qui se recharge pendant le trajet et pour l'autre catégorie les batteries peuvent également être rechargées à partir d'une prise électrique.

Parfois même, les véhicules à hydrogène sont inclus dans la catégorie des voitures électriques s'ils sont également munis de deux moteurs. L'un à carburant, qui brûle l'hydrogène et recharge les batteries, et l'autre, électrique, qui fonctionne à partir des batteries et propulse le véhicule.

Selon les estimations des experts, ce sont précisément ces voitures à hydrogène qui pourraient libérer presque entièrement (à 99,6%) l'industrie automobile de sa dépendance pétrolière. Or, le remplacement total du parc automobile mondial par des voitures électriques ne réduirait cette dépendance que de 25%, compte tenu de l'origine de leur "carburant" – le courant électrique.

Quant aux véhicules électriques à batterie, d'après l'AIE, leur nombre a dépassé le niveau de l'année 1912 en novembre 2011 seulement.

Peu s'en souviennent mais il y a cent ans, des voitures électriques roulant jusqu'à 23 km/h et possédant une autonomie de 80 kilomètres faisaient concurrence aux voitures à essence. Dans les années 1930, elles n'ont pas survécu et ont complètement disparu. Aujourd'hui, on assiste à leur second "avènement", dont un peu moins de 40 000 unités ont été vendues dans le monde l'année dernière.

"Les constructeurs ou les acheteurs ne bénéficient pas de "subventions écologiques", et les voitures électriques sont plus chères que les véhicules classiques. 3 millions de véhicules sont vendus chaque année en Russie, dont 100 ou 200 voitures hybrides dans le meilleur des cas - et quelques unités seulement de voitures purement électriques. Cette part de marché se maintiendra en Russie pendant encore dix ans", prédit Sergueï Tselikov, directeur général de l'agence Avtostat.

"Même les voitures hybrides les plus abordables ne sont pas populaires sur le marché russe. Et même si les voitures électriques devenaient courantes, cela ne se produirait pas avant une cinquantaine d'années", renchérit Alexandre Aguibalov, directeur du groupe d'investissement AG Capital.

On peut faire appel au respect des gens pour la nature ou influer sur le marché automobile avec des mesures répressives mais en fin de compte, les gens voteront avec leur portefeuille pour tel ou tel moyen de locomotion.

On pourrait même imaginer qui opterait pour des voitures électriques : les services de taxi urbain, le personnel des compagnies d'électricité et de distribution, qui feront le "plein" avec une réduction d'entreprise. Ou encore les blondes et les intellos à lunettes incapables de maîtriser une boîte à vitesses, même automatique. Difficile d'inventer un meilleur transport pour tous ces gens.

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction  

 

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