Le Partenariat oriental est impossible sans la Russie

© RIA Novosti . Oksana Dzhadan / Accéder à la base multimédiaRiga
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La Lettonie prendra la présidence du Conseil de l'Union européenne au premier semestre de 2015 dans des conditions complexes. Premièrement, toute la direction de l'UE va changer sensiblement suite aux législatives européennes de 2014.

La Lettonie prendra la présidence du Conseil de l'Union européenne au premier semestre de 2015 dans des conditions complexes. Premièrement, toute la direction de l'UE va changer sensiblement suite aux législatives européennes de 2014.

Deuxièmement, l'Ukraine sera encore un point chaud de l'Europe. De plus, à en juger par les différends actuels, la formation du gouvernent dit « européen », c'est-à-dire de la Commission européenne, va certainement traîner en longueur.

Au sommet du Partenariat oriental à Riga, les députés européens seront donc plus préoccupés par des questions intérieures qu'extérieures. Mais une problématique sera forcément soulevée : après l'échec du sommet du Partenariat oriental à Vilnius, l'utilité d'une collaboration entre Bruxelles et six autres pays hors UE (Azerbaïdjan, Arménie, Biélorussie, Géorgie, Ukraine, Moldavie) dans le cadre du Partenariat oriental est remise en question.

Une chose est évidente: il faut clore ce programme ou le modifier en profondeur. La Lettonie doit bien réfléchir pour ne pas manquer l'opportunité d'un coup politique original.

Un partenariat étouffant

L'histoire éphémère du Partenariat oriental a commencé après la guerre de 2008 dans le Caucase. Bien que ce programme s'appelle "partenariat", il était conçu de manière à étouffer  six pays postsoviétiques ayant des liens historiques et géographiques avec la Russie, tout en leur promettant un niveau de vie européen et un sursaut de démocratie. Il fallait "serrer ces pays dans les bras du partenariat" si fort pour qu'il n'y reste plus le moindre esprit russe.

L'unification du monde européen selon le modèle américain et la tentative de régler les problèmes de longue date par un assaut de cavalerie a tourné en terrible leçon en Ukraine.

En absorbant une mixture brassée dans la vengeance politique, Bruxelles a subi une forte indigestion et la situation a simplement explosé en Ukraine, avec ses 45 millions d'habitants. Désormais, l'UE craint le pire des scénarios.

La peur engendre un sentiment tout aussi fort qu'un amour passionné. Bruxelles a peur de Moscou et Moscou craint l'apparition de nouvelles bases près de Pskov et de Smolensk. Le pire est qu'on s'habitue peu à peu à la peur. Et on commence à tirer des plans politiques à partir d'elle: on ferme des chaînes de télévision, on cherche la cinquième colonne et on se dit poutinophile ou poutinophobe.

La tension monte, et avec elle la méfiance. Les dirigeants américains et russes affirment ouvertement qu'ils ne se font pas confiance. Les politiciens de rang inférieur, d'une génération qui ne se souvient pas de conflits militaires et de leurs terribles conséquences, insultent sans vergogne leurs opposants idéologiques. Et cela devient une routine politique.

Comment empêcher la guerre?

A l'heure actuelle à Riga, à deux pas de la rue parlementaire Ekaba, il est possible de visiter l'exposition 1914-2014 consacrée au 100ème anniversaire du début de la Première Guerre mondiale, organisée dans le cadre du projet européen "Riga, capitale culturelle de l'Europe". Elle n'est pas consacrée uniquement à l'art mais aussi au "soudain" qui se produit dans l'histoire. Quand les pays se disant bons voisins rassemblent leurs armées et partent combattre et tuer ces mêmes voisins alors que personne ne l'avait prédit.

Un dialogue de mauvais ton vaut mieux qu'une guerre efficace. Et il faut en prendre conscience maintenant, quand on peut encore parler calmement et être entendu. L'UE a aujourd'hui plusieurs axes de priorités politiques. Le premier: aller vers une plus grande unification des Etats-Unis, qui sont aujourd'hui l'acteur le plus influent sur l'arène politique européenne - il est difficile de trouver un pays membre de l'UE qui ne soit pas membre de l'Otan (il n'y en a aucun parmi les pays d'Europe de l'est).

Deuxième axe: une association quelconque avec l'Union eurasiatique en formation. Mais il ne faut surtout pas croire que Bruxelles devra choisir entre les deux. Les deux axes doivent être développés et remplis d'un contenu contemporain sans être dirigés contre qui que ce soit, sans esprit de vengeance ni outrage.

Il ne faut avoir fait Saint-Cyr pour comprendre que tout processus, en Europe, est impossible sans la Russie. On ne peut pas aller contre la géographie et toute action excluant la Russie se retourne, en fin de compte, contre l'Europe. L'exemple le plus récent - mais loin d'être le seul - est le programme Partenariat oriental, devenu tout simplement inutile après Vilnius, voire dangereux pour ses membres sous sa forme actuelle.

L'accord d'association avec l'Ukraine avait mis le pays face à un choix illustrant le mépris pour ses liens historiques et sociaux avec Moscou. Et la situation est devenue incontrôlable.

Un dialogue au lieu d'un conflit meurtrier

Dans cette situation compliquée, la Lettonie pourrait apporter une contribution significative aux relations en Europe de l'est. Sans s'oublier elle-même – à l'instar de la Pologne qui avait profité de sa présidence de l'UE pour créer des zones de circulation frontalière avec la région russe de Kaliningrad.

Aujourd'hui, en prévision du sommet de Partenariat oriental à Riga en 2015, il faut comprendre que Bruxelles fait également face à un choix qui a été insurmontable pour l'Ukraine à Vilnius. Cependant les deux orientations peuvent parfaitement coexister en paix. Et elles pourraient s'unir dans le cadre d'un Partenariat oriental "mis à jour" en éliminant tous les éléments inutiles engendrés par la vengeance et la volonté d'ériger des "zones tampons".

Il est primordial pour la Lettonie que la région baltique devienne une véritable zone d'amitié pour tous les pays de la région, y compris la Russie. Par conséquent il faut se débarrasser de la peur mutuelle - au moins tenter de le faire.

Le Partenariat oriental pourrait rétrécir jusqu'à un format de négociations avec des acteurs potentiels de l'UE, mais pourrait aussi grandir jusqu'à une nouvelle doctrine, où la préparation et la planification d'une feuille de route pour les futurs participants se déroule ouvertement avec la participation de la Russie. Et la création d'une zone économique commune de Lisbonne à Vladivostok ne serait plus alors aussi fantastique.

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

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