La fin du monde, non, mais la fin du monde unipolaire, oui

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Alexandre Latsa - Sputnik Afrique
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La fin du monde n’a finalement pas (encore?) eu lieu et on peut dire que l’année 2012 ne s’est pas seulement écoulée sous le signe du pouvoir, mais aussi sous le signe de la confirmation et de l’accélération des grandes tendances économiques et politiques qui se manifestent depuis le début de ce siècle.

La fin du monde n’a finalement pas (encore?) eu lieu et on peut dire que l’année 2012 ne s’est pas seulement écoulée sous le signe du pouvoir, mais aussi sous le signe de la confirmation et de l’accélération des grandes tendances économiques et politiques qui se manifestent depuis le début de ce siècle.

Le début du déclin américain, le déclassement de l’Europe, la montée en puissance d’une Chine qui devrait accéder au statut de première puissance du globe.

Il y a aussi et surtout l’émergence de puissances régionales qui, fédérées, sont susceptibles d’être les moteurs de l’économie de demain. Symbole de ce grand rééquilibrage, la visite en cette fin d’année du président russe en Inde, les deux pays ayant reconnu le droit au nucléaire civil pour l’Iran. On peut aussi mentionner la visite du président Brésilien en Russie, le Brésil qui appuie désormais la position russe en Syrie, confortant l’apparition d’une nouvelle diplomatie des BRIC qui va sans doute faire entendre sa voix de plus en plus souvent dans le futur. Il y a donc les BRICS bien sur mais aussi les "Onze prochains" (N-11) que sont Bangladesh, Egypte, Iran, Nigeria, Pakistan, Philippines, Vietnam, Mexique, Indonésie, Turquie et Corée du Sud, les quatre derniers étant connus sous l’acronyme MIST.

L’émergence de cette architecture multipolaire se confirme dans un monde qui semble plus chaotique et instable que jamais, que l’on pense à l’effondrement économique en cours d’un Occident qui fait face a la pire crise financière de son histoire moderne, ou aux terribles tensions qui ravagent le monde musulman, tensions dont l’épicentre se situe aujourd’hui sans aucun doute en Syrie. Ce pays, berceau des civilisations les plus anciennes, se détruit malheureusement peu à peu sous nos yeux, depuis deux ans.

Il est finalement sans doute de plus en plus difficile de prévoir ce qui va se passer et de plus, le discernement n’a jamais semblé autant manquer aux analystes. Il est très intéressant et souvent amusant de revenir en arrière, et de comparer l’évolution du monde réel avec les prévisions de certains spécialistes autoproclamés qui se sont exprimés dans les tribunes les plus lues du Mainstream médiatique.

Sur ce sujet, la revue Foreign Policy a récemment publié un best-off des prévisions politiques les plus ridicules de ces derniers mois. Certaines concernant la géopolitique sont hilarantes. On retiendra les prévisions délirantes de Xan Smiley dans The Economist qui assurait en novembre 2011 que non seulement le président Assad ne finirait pas l’année 2012 ou encore que le printemps arabe permettrait l’apparition de régimes plutôt démocratiques. Sur la Russie c’est sans doute la très libérale Masha Gessen qui mérite la palme d’or, elle qui écrivait avec en décembre 2011 que Vladimir Poutine ne passerait pas le printemps 2012 et surtout pas l’élection présidentielle. Elle écrivait aussi que le régime russe allait être emporté par la révolution démocratique née l’hiver dernier. Quand à Gordon Chang, après avoir reconnu que sa prédiction d’effondrement du parti communiste chinois en 2011 n’avait pas eu lieu, il affirmait le 29 décembre 2011 que celui-ci ne survivrait pas à 2012, entrainant la Chine dans le chaos. Enfin, l’institut de recherche pour la paix d’Oslo envisageait de son côté en octobre 2011 que le prix Nobel de la paix serait attribué à Gene Sharp (le théoricien des révolutions de couleurs), à l’association russe Mémorial ou à la radio russe d’opposition Echo de Moscou… Il est difficile de ne pas sourire en relisant ces prédictions pleines de naïveté et/ou d’idéologisme.

Même si j'ai l'air de prêcher pour ma paroisse, je dois dire que l'on ne trouve pas de "délires" de ce genre dans les colonnes de RIA Novosti. Les tribunes de Fedor Lioukanov, par exemple, s'imposent en matière de relations internationales, tandis que les analyses économiques continues de l’économiste solitaire Jacques Sapir semblent se confirmer de semaine en semaine. Il est difficile de trouver de grossières erreurs dans les pages de RIA-Novosti et ce travail est de plus en plus remarqué. Récemment, le correspondant d’un très célèbre groupe de médias français me confiait discrètement: "Maintenant je lis tout le temps RIA-Novosti en français, c’est vraiment du super boulot".

Bien sur personne n’est en mesure prévoir les événements de 2013, la futurologie est une science bien risquée et les choses vont sans doute bien trop vite, mais une chose est certaine, l’époque si elle est risquée, est passionnante.

Il est d’usage de présenter ses vœux à cette période de l’année et je le fais avec plaisir, en remerciant les lecteurs de RIA-Novosti, qui cette année ont été plus nombreux à me lire et à m’écrire. Merci du fond du cœur et rendez vous en 2013!

L’opinion exprimée dans cet article ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction, l'auteur étant extérieur à RIA Novosti.

Alexandre Latsa est un journaliste français qui vit en Russie et anime le site DISSONANCE, destiné à donner un "autre regard sur la Russie".

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"Un autre regard sur la Russie": La faillite des révolutions colorées

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